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Association pour les handicapés de Malherbes : Prendre un enfant par la main…

De l’alphabétisation aux classes de dessin et de peinture, les enfants sont pris en charge par des enseignants spécialisés.

Pour offrir de nouvelles perspectives d’avenir à ceux qui sont lourdement handicapés, Marie-Rose Gaspard et plusieurs autres parents ont créé, il y a dix ans, une école spécialisée et un foyer d’accueil où ils bénéficient de meilleures conditions de vie. Un engagement au nom de l’amour qui ne laisse pas indifférent…

Autour d’elle, des rires, des cris, des gestes d’affection, des voix qui s’élèvent alors qu’on ne les avait jamais entendues auparavant, quelques mots prononcés au hasard qui ont toute leur importance. Elle voit Nathanael, l’un des premiers bénéficiaires de l’association. Il ne parle pas beaucoup, mais arrive à s’exprimer beaucoup mieux qu’avant. Il y a Bruno, trisomique, qui a fabriqué une lampe à partir de noix de coco et tous les autres qui ne cessent d’avancer. Chaque jour, des petits pas en avant. Lorsqu’elle regarde autour d’elle, Marie-Rose Gaspard ne peut que sourire et être fière du chemin parcouru.

 

«Ce sont souvent les parents qui ont tendance à enfermer l’enfant, à le limiter dans son handicap alors que lui aussi est capable de faire et de réaliser tellement de choses. Ici, ce que nous voulons, c’est aider l’enfant à se développer, faire ressortir son potentiel et son talent», dit-elle avec conviction. Aujourd’hui, avec plusieurs autres parents et son équipe, elle gère une école spécialisée pour les enfants vivant avec un handicap physique ou mental, mais aussi un foyer d’accueil pour ceux qui se sont retrouvés livrés à eux-mêmes, placés par la Child’s Development Unit(CDU) dans des centres. Elle qui n’a jamais imaginé en arriver là ne peut qu’être heureuse aujourd’hui devant tous ces visages qui sourient, ces rires, ces cris, ces petits et ces grands pas, ces choses qui sont réalisées chaque jour et qui la confortent dans son idée.

 

Porteur d’un handicap

 

Marie-Rose Gaspard crée l’association pour les handicapés de Malherbes en 2006, poussée par son histoire personnelle. À l’époque, tout part d’un profond désir de partager son expérience, de venir en aide à ceux qui, comme elle, se retrouvent confrontés à la naissance d’un enfant porteur d’un handicap. Marie-Rose Gaspard se souvient encore de la venue au monde de son premier enfant, son fils Steeve. Très vite, la jeune maman qu’elle est remarque que quelque chose ne tourne pas rond et les examens médicaux finissent par confirmer ce qu’elle redoutait. Son fils est atteint d’un lourd handicap mental. Dans sa tête, tout se mélange. Apprendre que son enfant est porteur d’un handicap est déstabilisant et douloureux. Comme pour de nombreuses mères dans cette situation, le bonheur d’accueillir ce petit être laisse place à la tristesse, les larmes, la peur, la désillusion devant cet enfant qu’on dit «pas normal». Mais, l’amour, dit-on, est capable de déplacer des montagnes et de surmonter nombre d’épreuves.

 

Au cours des années qui suivent la naissance de Steeve, Marie-Rose apprend à accepter la différence de son fils, à l’aimer pour ce qu’il est, à se réjouir de chaque petit pas en avant, même si aux yeux des autres, ils ne sont pas vraiment importants. Les difficultés se sont, certes, accumulées tout au long du parcours, mais elles n’ont jamais empêché Marie-Rose de se battre pour offrir à son fils les meilleures conditions de vie possible. Au lieu de le garder entre les quatre murs de la maison par honte, par peur du regard des autres, elle l’emmène avec elle partout.

 

Déjà, elle pense à l’avenir. Que fera-t-il quand elle ne sera plus en mesure de s’occuper de lui ? Alors, elle lui apprend des choses sans relâche. Même s’il faut tout recommencer à chaque fois, elle ne baisse pas les bras. Un jour, pourtant, elle a bien failli. Alors que Steeve se trouve avec d’autres enfants de son école à la gare de Curepipe, il s’égare et se trompe d’autobus. Se retrouvant dans un endroit qui lui est inconnu, il disparaît pendant 24 heures. La peur au ventre, Marie-Rose et sa famille remuent ciel et terre pour le retrouver. Cet épisode, dit-elle, aurait pu la décourager. Mais non. Cela n’a fait que renforcer son ambition de rendre Steeve autonome.

 

C’est pour toutes ces raisons et bien plus encore que créer l’association et l’école est devenu une évidence. «Au fil des années, j’ai ressenti le besoin de venir en aide aux autres qui, comme mon fils, doivent vivre avec un handicap. Nous avons commencé avec huit enfants au centre social de Malherbes. Nous n’avions aucun moyen, mais nous organisions des activités trois fois la semaine, puis tous les jours jusqu’au jour où nous avons décidé d’ouvrir une école pour permettre à ces enfants d’avoir un lieu où ils pourraient se développer et s’épanouir»,souligne la fondatrice de l’association qui accueille des autistes, des trisomiques, des handicapés physiques, ceux qui souffrent de déficience mentale ou encore de paralysie cérébrale.

 

De huit enfants au départ, l’école accueille aujourd’hui 45 enfants, mais aussi des adultes venant de la région de Curepipe et des environs. Les bénéficiaires sont classés en fonction de leur quotient intellectuel préalablement déterminé par un médecin. Certains ont droit à des classes académiques avec un enseignant spécialisé, d’autres à des activités qui ont pour but de développer leur mental. Entre les ateliers de musique, de peinture, de sport, de jardinage, de menuiserie et autres, les bénéficiaires ont fort à faire.

 

Les adultes, eux, passent leurs journées dans l’atelier vocationnel mis en place par l’association. Adrien, l’un des bénéficiaires, s’est découvert une véritable passion pour la réalisation de bougies. Après avoir appris à les fabriquer, il a recommencé l’exercice à la maison et en a même vendu quelques-unes dans son quartier. «Il y a une grotte pas loin. Je demande au gardien de me garder les bougies qui ont fondu. Je les récupère et ensuite je les transforme. J’ajoute des couleurs, des paillettes. Je les rends jolies», dit-il, visiblement très content de lui. Comme lui, ils sont plusieurs à s’épanouir et à arriver à surmonter leur handicap. 

 

Un blocage

 

Pour Mary-Jane Gaspard, qui s’occupe de la gestion de l’école avec sa mère, le but de cet établissement est de permettre à ces enfants de bénéficier d’une éducation adaptée à leurs besoins, de recevoir les soins nécessaires et de faire en sorte qu’ils développent une certaine autonomie. «C’est un long processus, surtout qu’un bon nombre de nos bénéficiaires ont des problèmes de comportement. Ils n’arrivent pas à extérioriser leurs émotions, ce qui crée un blocage. Nous avons une équipe importante faite de psychologues, de thérapeutes, de physiothérapeutes à leur chevet, qui les accompagnent quotidiennement», explique la jeune femme.

 

En 2013, sa mère et elle constatent avec aberration que plusieurs enfants atteints de lourds handicaps physiques et mentaux se retrouvent livrés à eux-mêmes. Certains ont été abandonnés, d’autres sont nés de parents porteurs d’un handicap, certains sont internés à l’hôpital Brown-Séquard de Beau-Bassin. Pour leur venir en aide, elles présentent un projet au ministère de la Sécurité sociale et finissent par ouvrir un shelter. Des 17 premiers bénéficiaires, 11 vivent toujours dans ce foyer d’accueil qui reste un refuge pour ces enfants qui n’ont nulle part où aller. «Ce sont des enfants très sensibles et il nous faut absolument les protéger car certains ont vécu des choses affreuses, comme des actes de maltraitance ou des sévices sexuels. Ils ont été placés chez nous par la CDU et nous veillons à leur offrir un quotidien plus joyeux», souligne Mary-Jane Gaspard.

 

Dans cette maison où tout est mis en œuvre pour leur bien-être, les enfants sont entourés d’une équipe qui veille sur eux 24h/24 et 7j/7. Gérer l’école et le foyer, ce n’est pas évident pour l’association qui ne cesse de recevoir des demandes pour accueillir d’autres bénéficiaires. Comme pour beaucoup d’associations, les fonds sont limités, ce qui restreint les projets. Après une toiture qui ne cesse de couler, Marie-Rose Gaspard et son équipe envisagent aujourd’hui de trouver un espace plus grand qui pourrait mieux profiter aux enfants et qui permettrait aussi d’accueillir de nouveaux bénéficiaires.

 

Pour cela, l’association espère pouvoir compter sur l’aide des sponsors et des Mauriciens. Car Marie-Rose Gaspard et sa fille Mary-Jane ainsi que toute leur équipe sont convaincues d’une chose : ces enfants ont besoin d’eux. Au foyer comme à l’école, explique la jeune femme, c’est le contact avec les autres, l’interaction, l’intégration, mais aussi l’amour qu’ils reçoivent qui les poussent à s’ouvrir aux autres et au monde.