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Démission annoncée de Roshi Bhadain : Les habitants du nº18 en mode «wait and see»

 Tous les matins, Coolen Arnachellum et Ramesh Ramdooss décryptent l’actualité.

L’ancien ministre du MSM veut quitter son poste de député pour protester contre le projet de Metro Express. Une partielle se profile donc à Belle-Rose/Quatre-Bornes. Qu’en pensent ceux qui habitent cette localité ?

Journal du jour ouvert, conversations débridées. Ça commente l’actualité tous les jours dans ce petit coin de la circonscription n° 18 (Belle-Rose/Quatre-Bornes). Une habitude de ces amis à la retraite.«On se retrouve là tous les jours», confie Ramesh Ramdooss qui parle sous le regard de son pote Coolen Arnachellum. Ce matin du samedi 17 juin, la revue de la presse a néanmoins plus de saveur. Les grands titres les concernent directement. Eux qui vivent dans cette localité qui semble attirer toute l’attention en ce moment. Là où pourrait avoir lieu une élection partielle dans un futur proche. 

 

L’ancien ministre de la Bonne Gouvernance, désormais au sein de l’opposition, a annoncé au Parlement qu’il comptait démissionner afin de dire son désaccord concernant le projet de Metro Express. Toutefois, le député de la circonscription a dit se donner une semaine (après consultation avec le leader de l’opposition Xavier-Luc Duval). Roshi Bhadain patientera, dit-il, le temps d’en finir avec le Committee of Supply et la Private Notice Question du leader du PMSD concernant le projet de métro. 

 

L’objectif du leader du Reform Party ? Mettre le gouvernement (s’il présente un candidat) face à son électorat pour une petite «compète» de popularité. Et lancer une sorte de référendum sur le métro (s’il est candidat et est élu : le message sera clair, doit estimer l’ancien ministre MSM). Les copains retraités ont compris son message. Mais pas forcément dans le sens que le souhaite Roshi Bhadain : «Ce sera une élection correction. Pour le gouvernement mais aussi pour l’ancien ministre de la Bonne Gouvernance. Il n’est pas un héros. Il faisait partie de l’équipe dirigeante jusqu’à ce qu’il n’obtienne pas ce qu’il voulait. Il n’est pas parti par principe», explique Coolen Arnachellum. Les habitants de la localité n’ont pas oublié, dit-il, les fausses promesses du gouvernement Lepep : «Ce sera une occasion de dire ce que nous pensons de leur performance.» Et le dernier Budget, présenté par Pravind Jugnauth il y a quelques jours, a attisé leur ressentiment. «C’était du n’importe quoi», affirme Ramesh Ramdooss.

 

De mots échangés, ils parlent des «scandales» qui secouent le gouvernement, du Premier ministre pour qui ils n’ont pas voté, des dettes du pays et d’une relance qui se fait attendre. Et traitent, en passant, l’ancien ministre MSM de «voyou» : «Il ne vient jamais ici dans sa circonscription. Mais bon, on imagine que maintenant, on va le voir.» Mais qu’il ne vienne pas devant l’atelier de Vikash Gungabissoon ! Il risque de ne pas être bien accueilli : «Rezma zot ki pe koz ar mwa. Si enn lot dimunn ti koz Bhadain isi mo ti pou pous li.» En face de son «bureau», où il répare télés et autres petites choses, une des nombreuses affichettes jaunes présentes dans la circonscription où on peut lire : «Metro lor la ri – NON. L’imposte – NON. Dinosaure – NON.» Et Vikash fait comme s’il ne la voit pas. 

 

Du bluff ?

 

D’ailleurs, dit-il, il ne pense pas que Roshi Bhadain démissionnera : «Li pe dir li pou. Il ne l’a pas encore fait, non ? Vous croyez qu’il va abandonner son salaire de député ? Je ne crois pas. C’est du bluff.» Sanjay Choolun, à quelques kilomètres de là, est bien de cet avis : «Je ne le crois pas. C’est un imposteur. S’il avait eu le ministère des Finances, tou ti pou korek, Pravind ti pou so bondie, li ti pou dan lakwizinn À un moment, estime-t-il, Roshi Bhadain devra cesser cette farce. Ce «stratagème» pour attirer l’attention. Et qui est dénoncé par les membres du gouvernement. «Au final, il ne fera rien. De toute façon, même s’il démissionne, ça ne changera rien au paysage politique. Nous avons la majorité et la confiance du peuple», affirme une proche du MSM, habitante de Quatre-Bornes. 

 

Ça ne changera rien non plus pour Reshma Joyekurun, coiffeuse. Elle n’attend pas cette partielle. Comme de nombreux habitants de la circonscription à qui nous avons parlé, elle ne s’y intéresse pas : «Les politiciens sont tous les mêmes. Ils viennent, font de belles promesses et au final, ne les réalisent pas. Nous, on continue à travailler, à tras trase et à vivre notre vie.» Et c’est vrai ! À côté de ces conversations provoquées autour de la politique, la vie de ce samedi au n° 18 continue avec son habituelle nonchalance. Là, un marchand gato delwil vend baja et gato pomdeter. Ici, bringelle, pommes de terre et oignons attendent d’être achetés pour être les ingrédients d’un repas de week-end. Une grand-mère se promène avec son petit-fils pour faire des emplettes dans le centre-ville : «Je ne comprends pas cette histoire d’élection. Quatre-Bornes, c’est une bonne ville.»

 

À quelques pas de là, une autre personne âgée, Renée Grubert, attend non loin de l’église sous son parapluie multicolore :«La politique ? Des élections ? Je n’ai rien à dire.» Une maman qui achète un roti n’a pas envie de s’épancher sur un sujet «inutile». Et un homme qui grille sa cigarette en attendant son journal lance : «Ça ne m’intéresse pas.» Un autre devant son magasin ose un timide : «C’est bien. Gouvernman pe tro fer», avant d’ajouter, contradictoire :«Le MSM est fort ici.»

 

Par contre, derrière le comptoir de sa boutique, un monsieur d’un certain âge n’hésite pas à prendre quelques minutes pour nous faire son analyse politique. Ah ! De l’animation dans Quatre-Bornes, des oriflammes, des meetings, des rallyes, un peu de désordre mais pas trop, ça ne lui déplairait pas. Même s’il n’y a pas d’enjeux, dit-il, à cette partielle : «Le rapport de force entre le gouvernement et l’opposition ne se modifiera pas.» D’ailleurs, dit-il, il ne votera pas : «C’est une perte de temps.» Surtout que l’idée du Metro Express, ça lui plaît bien : «C’est un progrès pour le pays. Pourquoi il faudrait revenir en arrière ?» Parce que c’est un gouffre financier et que le pays s’est lourdement endetté pour un projet dont la rentabilité est au centre de toutes les interrogations. 

 

C’est ce que lui répondrait Shannon de Belle-Rose et fan de Bhadain : «S’il démissionne, il fait un acte noble. Et c’est quelque chose que nous attendons, nous, les jeunes. Ces élections seront un moyen pour nous de nous exprimer et de dire aux politiciens malhonnêtes que nous voulons autre chose de notre classe politique.» Que d’espoirs et d’attentes entourent Roshi Bhadain. Enfin, pas pour tout le monde. Adout Rungtoar, qui kas enn poz accolé à une boulangerie, n’a rien non plus contre le projet qui sera bientôt mis en chantier. Mais il s’interroge sur la santé mentale de Roshi Bhadain : «Li fou. S’il démissionne, qui va voter pour lui ? Et même s’il est élu, qu’est-ce que ça changera ? Il sera de retour là où il est, c’est tout. C’est incompréhensible.» Et il a beau suivre les analyses sur les enjeux politiques d’une telle décision et sur ceux d’une victoire de tel ou tel parti, il n’en démord pas : «C’est une perte de temps.»

 

Néanmoins, il compte bien suivre le «feuilleton» dans les journaux, dit-il. Et est prêt à avoir une conversation débridée dès que Roshi Bhadain démissionne. S’il le fait… 

 


 

Unie ? 

 

Ou plutôt désunie ? L’opposition fera-t-elle bloc autour de Roshi Bhadain s’il se présente en tant que candidat ? C’est la question du moment. Pour l’instant, seul le MMM a affirmé qu’il alignerait un candidat si ces partielles ont lieu. Du côté des autres partis de l’opposition, aucune décision n’a encore été prise. Néanmoins, il semblerait qu’un rapprochement ponctuel entre le PMSD et le Reform Party ne soit pas à écarter. Par contre, le PTr ferait face à une bataille interne. Deux camps se dessinent : ceux qui veulent qu’Arvind Boolell se présente et ceux qui estiment que s’il remporte la joute électorale, le rôle de leader de Navin Ramgoolam serait menacé.

 


 

En attendant… 

 

Sa décision était très attendue. Et c’est vrai que cela faisait des semaines déjà que l’ancien ministre de la Bonne Gouvernance annonçait sa démission pour protester contre le projet de Metro Express. Mais avant ce vendredi 16 juin (avant qu’il ne prenne la parole dans le cadre des débats budgétaires au Parlement), ce n’était que des mots. D’ailleurs, s’il a clarifié son intention, il n’a pas non plus encore franchi le pas. Il a juste annoncé qu’il démissionnerait dans une semaine. Avant son annonce attendue, l’ancien ministre de la Bonne Gouvernance a dénoncé les agissements du gouvernement, affirmant que le Budget présenté par Pravind Jugnauth mène le pays à la banqueroute. Il a dénoncé la spirale du surendettement et l’absence de projets pour créer des emplois et relancer l’économie. Il a rappelé la dangerosité financière du Metro Express (en plus du fait qu’il risque de rendre plus ardue la circulation au n° 18). D’ailleurs, estime-t-il, ce système de transport n’est pas une solution au problème de congestion routière.

 


 

Allez-vous aligner un candidat en cas d’élection partielle au no 18 (Belle-Rose/Quatre-Bornes) ?

 

En marge d’une éventuelle démission de Roshi Bhadain au no 18, nous avons demandé à des partis politiques s’ils allaient aligner un candidat en cas d’une élection partielle ? Réponses…

 

Paul Bérenger, Leader du MMM : «Définitivement un candidat»

 

«Bhadain a dit qu’il allait démissionner la semaine prochaine. Nous attendons de voir. Nous mettrons définitivement un candidat en cas de partielle au no 18. Au MMM, nous en avons discuté, nous avons déjà identifié celui qui sera candidat et nous connaissons tous qui a été candidat dans cette circonscription dans le passé.»

 

Alan Ganoo, Mouvement patriotique : «Développements»

 

«À la lumière des développements, le MP va décider de ce qu’il va faire. À ce stade, le parti n’exclut pas la possibilité de mettre un candidat pour les partielles.»  

 

Mamad Khodabaccus, secrétaire général du PMSD : «On attend de voir»

 

«Pour le moment, nous n’avons pris aucune décision. On attend de voir si Roshi Bhadain va démissionner et nous aviserons à la lumière des événements.»

 

Arvin Boolell, Parti travailliste : «Décision collective»

 

«Monsieur Bhadain a dit qu’il allait soumettre sa démission. Je suis sûr qu’il va honorer son engagement. À la lumière de ce qu’il va faire la semaine prochaine, le parti va se rencontrer et on va prendre une décision collective pour savoir si on va aligner quelqu’un en cas d’élection partielle.» 

 

Étienne Sinatambou, Porte-parole du gouvernement : «Un non-event»

 

«Pour le gouvernement, le projet de démission de Roshi Bhadain est un non-event. Il n’y a rien à dire à ce sujet. Nous en parlerons quand il se passera quelque chose.»

 

Textes : Yvonne Stephen-Lavictoire, Christophe Karghoo et Amy Kamanah-Murday