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Shamima Patel : «Avant je pensais que le cancer n’arrivait qu’aux autres»

Son message est clair : la lutte contre le cancer, c’est tout le temps et pas uniquement pendant quelques semaines de campagne. À l’occasion du mois rose ; octobre étant le mois international de sensibilisation au dépistage du cancer du sein, nous donnons la parole à Shamima Patel, elle-même ayant connu ce cauchemar. Aujourd’hui, c’est au sein de Breast Cancer Care Association qu’elle mène le combat au nom de tous les malades du cancer du sein.

Quand on vous dit mois rose, que répondez-vous ?

 

Je pense tout de suite à la sensibilisation et à la conscientisation. C’est l’occasion de faire passer plus de messages autour du cancer du sein, de parler de ses ravages et, surtout, c’est une façon de dire qu’on en guérit si on s’y prend à temps. Ce mois, c’est aussi l’occasion pour un message d’espoir et surtout pour faire comprendre qu’avoir un cancer ne signifie pas que c’est la fin.

 

Avec le recul, comment parlez-vous aujourd’hui de votre maladie ?

 

Aujourd’hui, cela fait six ans depuis que j’ai eu mon cancer du sein. Je suis en pleine forme mais cette épreuve a complètement changé ma vie. Si je n’avais pas eu le cancer, je n’aurais jamais fondé mon association. Aujourd’hui, j’ai une réponse. Je sais pourquoi j’ai eu cette maladie. Elle m’a permis de m’investir d’une mission : mon engagement dans le social et plus particulièrement pour venir en aide aux personnes atteintes de cancer. J’avais une carrière, j’étais manager à Variety Food Ltd, et j’ai décidé de tout arrêter. Certes, je faisais les deux à un certain moment mais je sentais que je ne me donnais pas à fond. J’ai donc fait un choix et je sais que j’ai pris la bonne décision. Je suis maintenant épanouie. Avec mon association Breast Cancer Care, je me suis embarquée dans une belle aventure humaine faite de rencontres, de découvertes, de leçons de vie et d’apprentissage.

 

Vous estimez-vous chanceuse ?

 

À 200 % car j’aurais pu ne plus être là aujoud’hui. Je m’estime aussi chanceuse car grâce à l’associtaion et le travail qu’on effectue, je peux dire en toute humilité qu’on a pu sauver des personnes. Grâce à mon engagement, je me dis que je suis aussi comme un exemple pour d’autres personnes. Je fais souvent des visites dans des hôpitaux durant lesquelles les malades me disent merci pour mon travail. Pour tout cela, j’estime que je suis chanceuse. Depuis deux ans, nous travaillons avec une vingtaine de femmes, des combattantes, des survivantes qui ont eu recours à nos services et qui, aujourd’hui, oeuvrent pour l’association. Avec ce résultat, je ne peux absolument pas m’arrêter.

 

Avez-vous aujoud’hui peur de la maladie ?

 

Personne n’est à l’abri. Je peux à n’importe quel moment faire une rechute. J’en suis tout à fait consciente. Le risque est là. Mais si cela arrive, comme pour la première fois, je vais me battre car la vie est tellement belle.

 

Avez-vous changé votre mode de vie ?

 

Certes, je fais aujourd’hui beaucoup plus attention ; à mon mode d’alimentation particulièrement. Je mange beaucoup plus de légumes, de verdures et d’aliments bons pour le corps. Mais c’est vrai que j’ai complètement changé ma façon de vivre. Je le dis franchement, avant, j’étais une fêtarde et je le reconnais, je pensais que cela n’arrivait qu’aux autres. Désormais, je vois la vie autrement. Je ne dis pas que je ne sors plus ou que je ne vois plus mes amis, c’est juste que j’ai maintenant trouvé ma voie. J’ai maintenant des priorités et je sais que ma place se trouve au sein de mon association, entourée de personnes de bonne volonté, pour aider les autres.

 

Aujourd’hui, vous menez une véritable bataille pour les malades du cancer. Vous sentiez-vous concernée par cette réalité avant ?

 

Franchement, avant, je pensais que le cancer n’arrivait qu’aux autres. Je n’ai jamais pensé que je pouvais en avoir un. Depuis, j’ai réalisé que ça peut toucher n’importe qui, peu importe sa situation, sa couche sociale. Le cancer ne choisit pas quand il frappe… Il frappe tout simplement.

 

Vous recevez souvent des messages d’intimidation… Qu’est-ce qui dérange dans votre engagement ?

 

Ce qui dérange c’est que je me livre sans détour. Ce qui dérange, c’est mon franc-parler. Ce qui dérange aussi, c’est que je suis une femme musulmane et que je parle ouvertement de mes seins. Quand je prends la parole, je ne cherche pas à me faire de la pub. C’est juste que je veux informer. Je veux partager mon expérience. Je veux que la palpation devienne un geste régulier pour la femme. J’ai parlé, et je continuerai à le faire. Je me dis que ces personnes qui me critiquent ne connaissent pas ma réalité et ne connaissent pas la réalité de ceux et celles qui ont ou qui ont eu un cancer. On ne sort pas indemne d’une telle épreuve. C’est pour cela que je continue sur ma lancée. Heureusement, les intimidations ont cessé. Mais si intimidations il y a encore, ce n’est pas ce qui va m’arrêter. J’ai le soutien de ma famille et de mes amis et ça me suffit.

 

Comment opère votre association ?

 

Tout se passe très bien heureusement. Le mois dernier, nous avons accueilli huit nouvelles recrues et ça ne cesse d’augmenter. Cela veut dire que nos campagnes ont eu de l’effet, que les gens nous connaissent et maintenant les messages passent. En deux ans, nous sommes fiers de dire que nous avons maintenant deux centres. Le premier à la route St Paul, à Vacoas, et un second à Rodrigues, qui s’appelle Merline Augustin Breast Care Centre, en hommage à une de nos membres qui nous a aidés dans notre combat et qui est décédée. Parmi nos projets : ouvrir un troisième centre dans le Sud.

 

Je dois dire que nous sommes un peu dans le flou avec la nouvelle loi concernant le CSR. On n’est rien sans nos sponsors. Selon la nouvelle loi, les compagnies n’ont plus le contrôle sur leurs fonds et elles ne savent pas à qui iront l’argent. C’est pour cela que nous sommes dans l’incertitude concernant nos projets à venir. à ce propos, j’ai d’ailleurs demandé une rencontre avec le ministre des Finances. J’ai fait venir des perruques que j’ai distribuées en deux mois. Comment faire avec les nouvelles demandes si nous n’avons plus de fonds ? Je tiens à préciser que tous nos services, nos encadrements, les supports psychologiques et autres sont gratuits. Parmi les nouveautés : un appareil ultrasons pour faire des échographies afin d’aider celles qui n’auront plus à attendre des mois pour avoir ce service à l’hôpital. Nous avons aussi notre application Palpappsqui offre des vidéos d’explications et qui sert aussi de rappel chaque mois pour la palpation.

 

Travaillez-vous en collaboration avec d’autres ONG pour la même cause ?

 

Plus il y a d’associations qui oeuvrent pour la cause, mieux c’est. J’ai de très bonnes relations avec Elizabeth Dalais de Link to Life. On s’entraide mais chaque ONG fait son travail de son côté. Chacun a sa façon de faire.

 

Quel est votre message en ce mois spécial pour le cancer du sein ?

 

Mon message est simple et s’adresse aux femmes : que la palpation devienne un réflexe. C’est important. Faites le geste et faites-le chaque mois. Aux malades, je leur dirai aussi qu’elles ne sont plus seules et qu’elles peuvent désormais compter sur des associtations comme la nôtre.

 

Bio express

 

C’est en 2010 que la maladie s’est invitée dans la vie de Shamima, mariée à Ismaël et maman de deux filles : Fatimah et Aisha. Depuis, celle qui a aujourd’hui 49 ans, fondatrice et présidente de Breast Cancer Care Association, a décidé d’être une porteuse d’espoir. Elle est passée par toutes les phases, a été le visage d’une campagne, est souvent sollicitée pour des témoignages et a même été critiquée pour son engagement. Mais Shamima a toujours insisté qu’il ne faut pas avoir peur du cancer.

 

«Ce n’est pas une honte d’avoir un cancer. Osez les dépistages, soutenez les associations qui militent contre le cancer, parlez-en autour de vous car ça ne doit plus être un sujet tabou», nous confiait-elle il y a quelques années par rapport à ce qu’elle a vécu. 

 


 

Ma semaine d’actu

 

Quelle actualité locale a retenu votre attention ces derniers temps ?

 

J’ai toujours aimé la politique mais la politique qui fait avancer les choses, qui change la vie des gens. Je suis donc de très près l’actualité de SAJ qui va step down, qui ne va pas step down.Je ne cache pas avoir des ambitions politiques. Mais dans le but ultime d’aider à changer les choses, particulièrement dans le milieu de la santé où il y a beaucoup de lacunes. Je trouve triste qu’il n’y ait pas encore d’e-filingdans nos hôpitaux. Combien de gens ont perdu la vie à cause d’un problème autour de leur dossier. J’ai choisi de me donner à mon engagement social mais je suis de près l’actualité politique.

 

Et sur le plan international ?

 

Je suis les présidentielles aux États-Unis. Les deux candidats Hillary Clinton et Donald Trump viennent de deux mondes différents. La grande féministe que je suis est bien évidemment derrière Hillary Clinton et je ne comprends absolument pas comment des personnes peuvent soutenir Donald Trump.