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Alain Jeannot : «Que la route de 2022 soit celle du respect, de la cordialité et de la sécurité !»

«Comparé à l'année 2020, de janvier à mi-décembre, le nombre de fatalités dans la tranche d’âge des 16-25 ans a augmenté de 25 % ! Ce qui interpelle le plus, c’est qu’ils sont majoritairement des hommes circulant en deux-roues motorisés», explique Alain Jeannot.

«Le nombre de fatalités dans la tranche d’âge des 16-25 ans a augmenté de 25 %...» C’est le constat que fait Alain Jeannot, président du National Road Safety Council. En ce début d’année, il nous confie ses attentes par rapport à la sécurité sur nos routes.

Quels constats faites-vous de la situation sur nos routes en 2021 ?

 

Mon premier constat : entre le 1er janvier et le 15 décembre 2021, il y a eu une baisse d’environ 19 % dans le nombre de fatalités routières comparativement à la même période en 2020. Certes encourageante, cette chute pourrait bien être, en partie, associée aux mesures sanitaires relatives à la pandémie. Celles-ci ont réduit la circulation de véhicules, d’une part, et ont, d’autre part, limité l’exposition à la conduite en état de fatigue ou d’ivresse relative aux pique-niques et autres sorties récréatives nocturnes ; ceux-ci ayant été restreints pour de longues périodes.

Deuxième constat : la sévérité des accidents. Les véhicules sont réduits en un tas de ferraille. Cet aspect est révélateur, entre autres, de notre relation à la vitesse qui est non seulement une des causes principales des accidents mais aussi un facteur aggravant. Le fatality index, qui exprime le nombre de fatalités sur 100 casualties, est le seul indicateur qui soit d’ailleurs en hausse – d’environ 16 % – pour 2019 et 2020, comparé aux quatre années précédentes. Mon troisième constat : le nombre inquiétant d’utilisateurs de deux-roues motorisés parmi les victimes des accidents de la route. Au 15 décembre dernier, ils constituaient 60 % des fatalités routières !

 

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué sur la question de la sécurité au fil des mois écoulés ?

 

En ce qui me concerne, c’est le rajeunissement regrettable des victimes de la route. Comparé à l'année 2020, de janvier à mi-décembre, le nombre de fatalités dans la tranche d’âge des 16-25 ans a augmenté de 25 % ! Ce qui interpelle le plus, c’est qu’ils sont majoritairement des hommes circulant en deux-roues motorisés. Pourquoi ? Éducation ? Formation ? Machisme ? Prises de risques ? Modification des véhicules ? Vitesse ? Fatigue ? Substances intoxicantes ? Infrastructures inadaptées ? Autant de pistes qui méritent d’être davantage visitées.En dehors de toute cette panoplie, la plus pertinente reste le fait du grand nombre de DRM (deux-roues motorisés). Ils sont 25 fois plus exposés aux imprévus qu’un véhicule à quatre roues et notre pays compte parmi les 10 endroits au monde avec le plus de DRM par 10 000 habitants ! Cette situation ne date pas d’hier mais elle mérite d’être prise en considération dans l’évaluation et le contrôle des accidents.

 

Dans quel état d’esprit avez-vous pris la présidence du Road Safety Council ?

 

J’ai accueilli cette nomination avec humilité et espoir parce que, même si elle est essentiellement consultative, ce poste est une porte facilitatrice vers la concrétisation des idées dont le but final est la contribution à la protection durable des vies sur la route. Je remercie les autorités et le public pour la confiance investie en moi car il faut dire que l’accueil de cette nomination a été encourageant. C’est un engagement citoyen qui occupera mes pensées et mon temps, et qui, à titre d’information, est sanctionné par une allocation de Rs 8 000 mensuellement.

 

Pouvez-vous nous rappeler le rôle du Road Safety Council ?

 

Ce conseil, composé de représentants de plusieurs secteurs reliés directement ou indirectement à la route, a pour but de dégager des propositions relatives aux mesures à prendre pour réduire les accidents et autres méthodes de promotion à l’éducation routière au ministre du Transport. Il analyse également les données associées aux accidents, contribue à assurer la coordination entre les différents acteurs du secteur et passe en revue l’efficacité et le cost effectiveness des actions mises en place. Ce ne sont là que quelques responsabilités du NRSC. Ce qui est intéressant, c’est qu’il est comme une plateforme commune. Car la sécurité routière ne concerne pas que la police ou la Traffic Management Unit.

Lorsque la population somnole au volant parce qu’elle compromet son sommeil, c’est un risque. Lorsqu’elle est impolie chez elle, elle le sera sur la route. Or, ces deux exemples concernent essentiellement la santé et l’éducation ! Aussi, il est intéressant que tous soient conviés à la table du partage à la protection de la vie.

 

Quelles ont été les actions accomplies durant l’année 2021 ?

 

Le nouveau conseil a été constitué en octobre et la première et unique session de travail pour cette année-là s’est tenue le 8 décembre dernier. Je ne peux donc faire le bilan relatif au conseil pour 2021. À d’autres échelles, par contre, il y a eu pas mal de mesures et actions accomplies, à l’exemple de la volonté d’introduire la zone 30/40 dans les villes et la campagne de prévention récente en faveur des motocyclistes.

 

Quelles sont vos grandes attentes pour la nouvelle année concernant la sécurité routière ?

 

Dans l’idéal, je m’attends à ce que davantage d’attention soit accordée aux infrastructures routières, à savoir la maintenance de la route elle-même et celle des marquages et des mobiliers routiers. Une route bien entretenue est non seulement un atout majeur pour guider, informer et avertir les usagers mais elle appelle aussi au respect dans tous les sens du terme. J’aspire aussi à un changement de comportement de la part des usagers de la route. Qu’ils soient plus vigilants, prévoyants, visibles et respectueux. Je souhaite aussi qu’encore plus d’accent soit mis sur les usagers de la route vulnérables (usagers de DRM et piétons), qui, de janvier 2021 au 15 décembre 2021, constituent 80 % des vies arrachées sur la chaussée !

 

Quel est votre conseil pour les Mauriciens ?

 

Sur la route, nous sommes condamnés à vivre ensemble comme des citoyens responsables et respectueux si nous ne voulons y mourir ensemble comme des imbéciles incivils et étanches à l’idée que la vie n’y tient qu’à un fil. Alors, retroussons nos manches et prenons notre revanche sur tout ce qui conjugue avec imprudence et imprévoyance. Que la route de 2022 soit celle du respect, de la cordialité et de la sécurité !