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“Je ne serais pas surpris si déjà Paul Bérenger a envoyé des émissaires pour amadouer Navin Ramgoolam”

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Une alliance PTr/MMM est dans le domaine du possible, laisse entendre Dev Virahsawmy, ancien dirigeant du MMM.

Q : Quelle est votre analyse des résultats de l’élection
partielle au No 7 ?

R
: Cette élection partielle, selon moi, devrait être analysée
de la façon suivante : si le candidat du gouvernement avait gagné,
on aurait pu conclure que le gouvernement a le soutien de la population rurale;
si l’Opposition avait gagné avec un léger écart, on
aurait pu interpréter que l’électorat était toujours
avec le gouvernement, mais qu’à cause d’un mécontentement
quelconque, il a voté contre. Mais dans la mesure où l’écart
entre les deux candidats s’est creusé, il faudrait revoir l’analyse.
L’écart de 2 600 votes fait constater qu’il y a une majorité
importante qui ne soutient plus le gouvernement. Je sais maintenant que des éléments
du MMM, quand ils ont constaté qu’ils allaient être sérieusement
battus, ont créé des désordres pour intimider l’électorat.
Résultat : au moins 15% de l’électorat n’est pas allé
voter : conséquence directe des désordres. J’arrive à
la conclusion que le gouvernement a eu ‘ène baté bef’
et que l’électorat a clairement démontré qu’il
n’est pas d’accord avec l’Accord Med Point. Paul Bérenger
a bien compris cela; voilà pourquoi aujourd’hui il est paralysé
politiquement et incapable de prendre des décisions, craignant de mécontenter
l’électorat hindou. On a aujourd’hui un Premier ministre qui
ne gouverne plus. Sa façon de temporiser dans l’affaire ICAC le démontre.
Il sait que ses calculs communalo-castéistes n’ont pas marché.
Je ne serais pas surpris si déjà Paul Bérenger a envoyé
des émissaires pour amadouer Navin Ramgoolam.

Q : Vous semblez oublier qu’en septembre 2000, la population,
dans sa grande majorité, avait voté pour l’Accord Med Point.

R :
L’électorat a voté en 2000 contre Navin Ramgoolam.
Les ethnies majoritaires dans les villes ont peut-être voté pour
l’Accord Med Point, mais à la campagne, ils ne l’ont pas
fait. Ils ont voté pour sir Anerood Jugnauth et contre Navin Ramgoolam,
mais pas pour Paul Bérenger. Ce que SAJ et Bérenger ont fait en
2000, c’est ce qu’on appelle en mauricien ‘mette lak are l’électorat’.

Q : On constate depuis quelque temps des remous au sein de l’ICAC.
Que faudrait-il faire pour que cet organisme retrouve sa sérénité
?

R :
Je vais être honnête. Je trouve très difficile
de combattre la corruption dans le cadre du laisser-faire capitaliste. Le système
capitaliste repose essentiellement sur la cupidité et l’égoïsme
et, donc, c’est un système qui, automatiquement, encourage la corruption.
Les plus grands corrompus sont les grands holdings, les grosses boîtes
et les multinationales qui ont derrière eux une administration pourrie
qu’est celle de George W. Bush. Liés à ces corrupteurs et
ces corrompus se trouvent les politiciens véreux et opportunistes qui
ne pensent qu’à leurs intérêts. Aujourd’hui,
tous ceux au pouvoir justifient cette situation monstrueuse. Dans ce contexte,
je ne vois pas comment ils vont éliminer la corruption, quand eux-mêmes
en sont les premiers bénéficiaires. Ce que je dis s’applique
aux politiciens de tous bords qui reçoivent des soutiens financiers des
capitalistes. On nous avait promis, à la mort de l’ECO pour protéger
un politicien, la création de l’ICAC qui allait faire un travail
exemplaire. Mais que voit-on ? Une déchéance.

Q : Faudrait-il que des têtes tombent à l’ICAC ?

R
: On va changer des hommes, ce sera un changement de détails.
La situation restera la même. La corruption, le business et la politique,
c’est blanc bonnet et bonnet blanc. Le PM ne peut pas gouverner, car il
est paralysé par la frayeur communale. Paul Bérenger ne peut toucher
au No 1 de l’ICAC parce que ce dernier est un hindou.

Q : Il y a eu un récent remaniement ministériel. Votre
point de vue ?

R :
C’est un remaniement qui n’en est pas un. Voilà
un gouvernement à mi-mandat qui, sachant bien que Maurice a un retard
en ce qui concerne la présence de femmes en politique - on est les derniers
au sein des pays de la SADC - rate l’occasion en or pour faire entrer
un autre élément féminin au sein du Cabinet. Paul Bérenger
a admis publiquement que sa préoccupation première a été
des considérations communalo-ethniques. Les grands principes et les compétences
ne comptent pas; seule l’arithmétique électorale compte.
Le leader du MMM a perdu toute crédibilité et n’est qu’un
vulgaire agitateur politique et ne deviendra jamais un grand leader ou un homme
d’État.

Q : On sent le règlement de compte dans vos propos...

R :
J’ai toujours dit ce que je viens de vous dire. Je me suis
retiré de la politique active, mais je suis attristé par ce que
le MMM est devenu. Le MMM est devenu un parti de lèche-bottes, de communalistes
et d’opportunistes.

Q : Comment voyez-vous l’avenir du MMM en vue des prochaines
législatives ?

R :
En ce moment, Maurice va dans le sens d’une situation semblable
à celle qui existait en 1983. On va se retrouver avec un pays qui va
être cassé sur une base ethnique, comme ce fut le cas en 1967 quand
44% de la population avait voté contre l’indépendance sur
une base ethnique et non idéologique.. En 1983, les hindous se sont regroupés
pour faire face aux autres ethnies menées par Bérenger. En 2004,
on se retrouve dans la même situation. Ce qui nous montre que le combat
contre le communalisme que Bérenger disait mener n’a pas eu lieu.
Une erreur fondamentale faite par le gouvernement en 1982 a été
de vouloir combattre le communalisme. Il n’a pas aboli le “Best
Loser System” mais a interdit les équipes de football qui portaient
des noms qui favorisaient le communalisme. Résultat : le communalisme
n’est pas parti, mais le foot est mort. Bérenger aime changer les
lois pour tirer un avantage personnel ou pour donner l’impression qu’il
est un homme vertueux.

Q : Et le PTr, après avoir été dopé par
sa victoire au No 7, quel est son avenir ?

R :
Le PTr a le vent en poupe car Navin Ramgoolam est perçu
comme SAJ le fut en 1983. Navin Ramgoolam va regrouper les hindous et Paul Bérenger
la population générale.

Q : Le MSM dans tout ça ?

R :
Le MSM va disparaître, car il est né au pouvoir et
ceux qui l’ont soutenu avaient leurs propres intérêts économiques
à défendre. Il faut toutefois reconnaître que sir Anerood
Jugnauth avait du charisme. Avec son départ, on a un parti orphelin de
leader.

Q : Y aura-t-il un grand chamboulement dans la configuration politique
lors des prochaines législatives ?

R :
Je ne serai pas surpris que, sous la pression du secteur privé
et du grand capital qui n’aime pas la présente situation, Paul
Bérenger soit appelé à s’allier avec le Parti travailliste
et qu’il accepte de céder la place de Premier ministre à
Navin Ramgoolam et de se rendre au Réduit.

Q : Depuis le dernier remaniement ministériel, il y a eu quelques
soubresauts au sein des instances du MMM. Votre lecture de cette situation en
tant qu’ancien membre de ce parti ?

R :
À un moment, il y avait une réelle démocratie
au sein du MMM. Paul Bérenger l’a tuée et s’impose
comme un autocrate. Quelques-uns vont crier mais, sachant bien que Bérenger
peut les détruire s’il le veut, vont se taire bientôt. Paul
Bérenger croit qu’il peut diriger le pays comme il dirige le MMM.
Son autoritarisme va lui coûter très cher car le peuple ne va pas
accepter cela.

Q : Dans une interview qu’il a donnée à notre confrère
‘Week-End’, Paul Bérenger dit “que certains militants
ont moins bien vieilli que d’autres et c’est dommage”. Vos
commentaires ?

R :
Le vrai militantisme qui animait le MMM au début est mort
depuis longtemps.

Q : Vous sentez-vous visé par les propos de votre ancien leader
?

R :
Les opinions de M. Bérenger sont le cadet de mes soucis.
Je ne le prends pas au sérieux ce Monsieur. Je suis resté un militant
du mauricianisme, de la langue mauricienne et un anti-capitaliste et un anti-impérialiste.
Si c’est cela mal vieillir, je suis très content.

Q : Si vous deviez refaire de la politique, dans quel courant actuel
vous vous sentiriez le mieux à l’aise ?

R
: Connaissant mon tempérament, je ne pourrais plus refaire
de la politique active. Aujourd’hui, les politiciens n’avalent pas
des couleuvres, mais des éléphants. Je ne suis pas disposé
à le faire. Je fais un travail qui me plaît et je sens que je vais
quitter derrière moi des douzaines de recueils de poèmes, de pièces
de théâtre, de romans, de nouvelles, de traductions de grandes
oeuvres classiques.

Q : Le directeur général de l’Organisation mondiale
du Commerce (OMC), Supachal Panitchpakdi, sera l’invité d’honneur
de Maurice pour l’anniversaire de
l’indépendance
du pays. Cela vous interpelle-t-il ?

R : L’OMC est un instrument entre les mains de puissants
pays et les petits pays comme le nôtre n’auraient aucune chance
avec cette organisation. Que le grand patron de l’OMC soit l’invité
d’honneur pour le 12 mars démontre clairement dans quel camp se
trouvent nos dirigeants politiques.

Q : L’avenir du MMM après Paul Bérenger, comment
l’entrevoyez-vous ?


R : Après Paul Bérenger, le MMM finira comme
le PMSD a fini après la mort de Gaëtan Duval.

Jean-Claude Dedans

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