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Dev et Shyam Seeburun se noient durant les pluies torrentielles - Leur soeur Chandra Devi : «Kouma nou pou viv san zot ?»

Chandra Devi et sa soeur Jotika sont inconsolables depuis le décès tragique de Shiam et Dev Seeburun.

Après avoir perdu leur mère, il y a dix mois, et leur sœur aînée, il y a deux ans et demi, les Seeburun sont cette fois frappés d’un coup par un double deuil avec le décès tragique de Dev et Shyam. Ces deux frères ont péri noyés durant les pluies torrentielles. Un terrible drame dont ces habitants de Forest-Side ne savent pas s’ils pourront se remettre un jour. Des membres de la famille ainsi que des voisins témoignent…

Le temps ne guérit pas toujours la douleur. Souvent, il faut juste apprendre à vivre avec, l’apprivoiser. Mais lorsque le malheur frappe à nouveau, la souffrance resurgit avec encore plus de force, doublement, triplement… Chandra Devi Seeburun en sait quelque chose. Cette habitante de Forest-Side est abasourdie de chagrin depuis qu’elle a appris le décès de ses deux frères d’un coup, dans des circonstances dramatiques. Dix mois seulement après le décès de sa mère et deux ans après celui de sa soeur aînée. Les dépouilles de Dev, 52 ans, employé d’une compagnie de textile, et de Shyam, un Security Officer de 50 ans, ont été repêchées sur les berges du ruisseau Poule d’Eau, non loin de l’église St-Clément, dans leur localité, le 30 avril. La veille, leur frère Janmajaye Seeburun, alias Baby, avait consigné une déposition à la police, vers 11h30, pour signaler leur disparition. Ses frères avaient disparu depuis le 28 avril au soir, jour où le pays était sous le coup d’une alerte de pluies torrentielles.

 

Le rapport d’autopsie indique que Dev s’est noyé après avoir succombé à une dislocation du cou et que Shyam est décédé par asphyxie due à la noyade. Les deux frères avaient des blessures à la tête. Un double décès tragique bien difficile à accepter pour les autres membres de cette famille. Comme en témoigne Chandra Devi Seeburun, 56 ans. «Li difisil aksepte lamor mo bann frer», confie-t-elle, complètement ébranlée. Célibataire, elle vivait sous le même toit que ses quatre frères. «Nous étions tous très proches. Mes deux frères décédés étaient très gentils et généreux. Ils ne refusaient jamais leur aide aux autres. Je ne sais pas ce que je vais devenir sans eux», pleure Chandra Devi. Son frère Shyam était également célibataire alors que Dev était divorcé. Sa fille aînée Danshika, âgée de 15 ans, vivait avec lui, alors que sa cadette Ayushi, âgée de 6 ans, vivait avec sa mère. Danshika est sous le choc. «Mo papa ti bon. Tou seki mo ti rode mo ti gagne. Mo ti ser ousi ti bien pros ek nou papa», souligne l’adolescente, avec grande tristesse.

 

La fratrie des Seeburun comptait sept enfants dont quatre frères – Dev, Shyam, Baby et Kaviraj – et trois soeurs – Chandra Devi, Jotika et une autre qui est décédée il y a deux ans et demi. Un décès que tous pleuraient toujours et auquel s’est ajouté l’immense douleur de perdre leur mère le 24 juin 2020. Et voilà que ce nouveau drame vient les mettre à genoux une nouvelle fois. Et de quelle manière ! «Enn moman bien dir pou nou fami. Dey mo mama nou pankor fini. Nou ankor dan tristes pou nou gran ser. Get ki ariv nou fami ankor. Li difisil pou aksepte. Kouma nou pou viv san zot aster ?» lâche Chandra Devi, avec douleur et regret. Sa soeur Jotika, qui habite Rivière-du-Poste, s’est, elle, murée dans la douleur et le silence mais la fille de cette dernière, Jessika Ramnawaj, arrive à nous dire quelques mots. «Nou ti kouma dir bann bon kamarad. Mamou Dev ti fek donn mwa enn four pou kwi gato an kado pou mo laniverser le 11 mars», souligne la jeune femme qui chérira à jamais les bons souvenirs laissés par ses oncles.

 

«Ils étaient inséparables»

 

Mais comment les deux frères ont-ils pu périr noyés ? Que s’est-il passé ce jour-là ? Leur entourage tente péniblement de reconstituer cette journée. Chandra Devi raconte que Dev, qui travaille dans la même compagnie qu’elle, a rencontré Shyam dans le centre-ville de Curepipe : «Ils étaient inséparables. Dev travaille à La Tour Koenig et Shyam était en congé ce jour-là. Ils ont fait une petite virée avant de se rendre à une boutique de notre quartier pour acheter des provisions.» Clency Camoin, propriétaire de la boutique en question, confirme que les deux frères sont effectivement venus dans son commerce ce jour-là. Des clients dont il était très proche. Cela faisait 21 ans qu’ils s’approvisionnaient chez lui. «Ils étaient toujours gentils et serviables. Shyam ti kontan badine. Zot ti vinn kot mwa toulezour pou pran dipin gramatin ek pate tanto parski mo ena ousi enn patisri. Zot ti bann dimounn bien trankil. Zame mo pann gagn problem ar zot. Mo bien afekte mwa ousi par zot disparision. Dernye fwa monn trouv zot ti sa merkredi swar-la, ver 20 er, kan monn ferm la boutik. Ti ena gro lapli. Mo ti met zot komision dan enn bwat ek enn sak rafia kan zot inn ale. Monn gagn enn sok kan monn tann dir zot inn disparet.»

 

La boutique de Clency Camoin se trouve à environ 400 mètres de la demeure des frères Seeburun. Ces derniers devaient traverser un pont situé 200 mètres plus loin pour rentrer chez eux à la rue Henri Robert. Tout laisse croire qu’ils se sont noyés lorsqu’ils ont été emportés par les flots de la rivière qui était sortie de son lit avec les grosses averses. Clency Camoin confirme que «la rivyer ti deza pe deborde» lorsque les deux frères ont quitté son commerce : «Mo finn aprann ki zot inn kas enn baraz tol pou evit pas lor pon-la. Mo panse zot inn mank lekilib. Kouran la rivier ti for sa ler-la. Enn madam ki res par laba ti ramas de-trwa komisyon divan so laport landime.»

 

Un bruit étrange

 

Cette dame, c’est Chantal Mootoosamy. Elle habite en face du pont. Elle se souvient effectivement avoir entendu un bruit étrange ce soir-là : «Mo ti trouv de dimoun dan nwar pe kas enn baraz tol. Ti ena boukou delo. Mo lakour ti fini inonde. Landime monn sorti ver 7 er, kan mo tifi inn desann pou tir so loto pou al travay. Lerla monn trouv bann komision divan laport dan enn bwat ek enn sak rafia. Monn ramas bann komision-la ek met zot dan enn sak. Mo abitie fer sosial. Monn gard sa pou bann dimounn ki dan le bezwin. Monn sorti apre pou al kot mo kwafez. Se laba ki monn aprann disparision sa de frer-la. Apre, monn al direk CID ek sa sak komisyon-la.»

 

Dès qu’ils ont appris la disparition des deux frères, les habitants du quartier se sont joints à la famille pour faire des recherches. Edley Camoin, un neveu du boutiquier Clency, est de ceux qui ont effectué des battues dans la région. «Je connais Dev et Shyam depuis que je suis petit. Je les considérais d’ailleurs comme des membres de ma famille. Nous avons organisé des recherches jusqu’à 21 heures, le 29 avril. Nous avions créé un groupe de discussion sur WhatsApp pour faciliter la communication entre tous les habitants du quartier. C’est un ami qui travaille à la municipalité de Curepipe qui a fait la découverte macabre. Je suis allé voir. Quel choc ! Il m’est difficile de croire qu’ils sont morts. Nous étions si proches», soutient-il.

 

La police a interrogé plusieurs témoins afin de faire la lumière sur les circonstances de ces deux noyades : Chantal Mootoosamy, les deux frères Baby et Kaviraj Seeburun ainsi que Clency Camoin et Lan Yue Fong qui tient un commerce à la rue Frederic Bonnefin. La police a également organisé une reconstitution des faits avec Chantal Mootoosamy qui habite dans l’angle des rues Gustave Bestel et Chandraya Lane. En attendant que la police boucle son enquête, les proches des deux frères Seeburun pleurent amèrement ces derniers, se demandant s’ils pourront un jour surmonter la douleur causée par ce double drame.

 

Texte : Jean Marie Gangaram et Stéphanie Domingue