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Touria Prayag : «Il y a des souffrances réelles derrière les charges provisoires»

L’auteure de Provisional Charges - The untold human stories, lancé le vendredi 3 juin, revient sur les raisons qui l’ont poussée à écrire ce livre. Face à l’étendue du problème et de la violence des arrestations, la rédactrice en chef du magazine Weekly a pris sa plume pour dénoncer ce qu’elle considère comme «inacceptable dans une démocratie» et «une violation des droits humains». Rencontre.

Qu’est-ce qui vous a motivée à écrire ce livre ?

 

L’élément déclencheur a été ma rencontre avec Hassenjee Ruhomally et son épouse Farihah, arrêtés suite à une plainte du ministre Showkutally Soodhun qui leur reprochait d’avoir fait circuler un write-off memod’Apollo Bramwell, ternissant son image. J’ai rencontré Hassenjee Ruhomally pour la première fois dans le cadre d’une interview pour Weeklyalors qu’il était sur son lit, chez lui, après une délicate opération cardiaque qui avait eu lieu après sa première arrestation. J’ai été témoin de leur souffrance, à lui et son épouse, et de l’humiliation qui leur a été infligée. Je l’ai vécu avec eux, mais malgré ça, ils sont restés très braves et ont voulu se battre pour que cette injustice n’arrive pas aux autres. Je voulais soutenir leur combat. Je me suis rendu compte qu’ils n’étaient pas les seuls et qu’il y en avait d’autres qui subissaient des humiliations, des violences, des viols de leur intimité.

 

Raconter le drame humain de ces personnes était un choix de narration évident pour vous ?

 

On a trop souvent parlé de lois et on a trop souvent demandé qu’elles changent. Mais c’est toujours resté dans l’abstrait. On lutte pour les droits humains dans l’abstrait, dans un contexte légal que l’homme de la rue ne comprend pas forcément. Toutefois, quand on entre chez ces personnes, dans leur intimité, dans leurs souffrances, vous rencontrez leur famille, vous entendez leurs enfants pleurer, ça s’approche de vous et ça vous fait réagir. Et c’était ça mon but à travers ce livre.

 

Certaines critiques regrettent que les intervenants du livre ne soient que des personnes connues et ayant un certain pouvoir. Pourquoi eux ?

 

Ce roman ne pouvait pas être un répertoire de tous ceux qui ont connu ces injustices, sinon ce ne serait plus un roman. Mes intervenants sont des personnes qui ont fait la Une, mais ils ne sont pas forcément tous riches et connus. Ce sont des personnes simples qui sont devenues malheureusement célèbres pour l’injustice qu’elles ont connue. Le livre parle aussi de gens peu connus que les protagonistes ont rencontrés pendant leur détention. Des gens qui ont été oubliés dans l’enfer de la détention. Évidemment, j’aurais pu choisir de répertorier tous ceux qui ont subi cette injustice-là, mais on n’en aurait jamais fini et je ne suis pas sûre que l’impact du roman aurait été le même.

 

La cause est plus importante que tout cela. Si le pays se réveille et constate qu’il y a des souffrances réelles derrière ces charges, une injustice énorme et une perception de vengeance politique dans certains cas, et que cela déclenche un vrai débat sérieux sur la fin de ces charges provisoires, les gens qui ont accepté de faire partie de ce livre auront atteint leur but. Il ne faut pas avoir honte de défendre des causes justes, même quand on choisit, pour les présenter, des gens qui ne sont pas les pires lotis. L’injustice ne doit pas être acceptée, qu’elle soit subie par des gens connus ou pas.

 

Pour d’autres, il y a aussi la perception d’un certain parti pris contre l’actuel gouvernement. Aviez-vous envisagé cette critique ?

 

Est-ce qu’on a déjà eu, dans l’histoire récente de ce pays, une vague d’arrestations de cette envergure ? Aussi spectaculaire, violente et systématique ? J’ai aligné des cas qui peuvent être perçus comme une vendetta politique. C’est une vague d’arrestations arbitraire qui n’a pas de précédent. Est-ce que je dois aller trouver une vague similaire dans le passé pour pouvoir parler de l’injustice qu’ont subi les protagonistes du livre ? Il n’y en a pas eu. Si vous en connaissez, donnez-moi des noms ! Si demain je dois écrire un livre sur la chute de la BAI, est-ce que je dois aller chercher une autre BAI dans le passé pour être juste ? Il n’y en a pas. Parler de biaspolitique, c’est vraiment diminuer la violence de cette injustice et la souffrance de ces personnes, et diluer le débat. Soyons sérieux et concentrons-nous sur l’essentiel. Mobilisons-nous pour qu’il n’y ait plus ce genre de violence sous aucun gouvernement !