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Profanation de tombes

Les restes de Sui Youn Siong ont été retrouvés dans l’herbe

Ils sont tristes, bouleversés, scandalisés. Eux, ce sont les proches des défunts dont les tombes ont été saccagées, au cimetière de Bois-Marchand, à Terre-Rouge, ces dernières semaines. Deux d’entre eux nous parlent de leur consternation face à cette situation incroyable, tout en lançant un appel aux autorités pour prendre les mesures nécessaires.

Scène d’horreur au cimetière de Bois-Marchand. Au milieu des hautes herbes, des déchets, des fleurs séchées et des tombes saccagées, git un corps en état de décomposition avancée, celui de France Ving Teen, décédé en 1984, à l’âge de 64 ans. Il a été arraché de son cercueil et jeté au sol sans ménagement. Un peu plus loin, des squelettes, rassemblés dans un drap rouge, ont subi le même sort. Pour l’heure, personne ne sait de quelles tombes ces ossements proviennent. Ce qui est sûr, c’est que ce cimetière, qui ne semble pas être entretenu et dont l’accès n’est même pas sécurisé par un portail, est devenu la cible d’un groupe de voleurs sans scrupules qui sévit dans le seul but de s’accaparer du plomb se trouvant à l’intérieur des cercueils.

Et bien que six personnes aient été arrêtées la semaine dernière pour avoir profané des tombes à Bois-Marchand, les saccages ont continué de plus belle cette semaine. Une affaire qui choque toute l’île Maurice, surtout les familles des défunts, dont la plupart sont issues de la communauté sino-mauricienne. Celles-ci crient au scandale et demandent à ce que les coupables soient punis. Parmi ces proches consternés et révoltés, Pierre Lim, 61 ans et habitant Grande-Rivière. Il se souviendra longtemps de cette vision d’horreur qu’il a eue le 4 avril. Environ 20 ans après le décès de sa grand-mère, Sui Youn Siong, le 5 avril 1994, la dépouille de cette dernière gisait devant lui, dans l’herbe du cimetière Bois-Marchand. «Ça a été un terrible choc pour moi. Le choc de ma vie», confie le sexagénaire, bouleversé. Ce jour-là, il s’était précipité au cimetière après avoir entendu à la radio que des tombes y avaient été profanées.

Pour Pierre Lim, le choc se mêle alors à la consternation. «Voir son propre sang dans un tel état a été une épreuve très difficile pour moi. Jamais dans ma vie je n’avais vu ni entendu une telle chose», témoigne-t-il. Mais la suite a été encore plus éprouvante, dit-il. Il a fallu récupérer le corps et le faire enterrer à nouveau. «Ce qui m’a le plus choqué, c’est le fait d’organiser un autre enterrement pour ma grand-mère», se désole Pierre Lim, en repensant à toute cette sombre histoire et à sa grand-mère, venue s’établir à Maurice avec sa famille alors qu’elle avait 60 ans et qui, dit-il, respirait la joie de vivre.

Pour Pierre Lim, comme les autres membres de sa famille et ceux des autres familles concernées par les profanations de tombes à Bois Marchand – 21 d’entre elles ont été saccagées –, «cette situation est affreuse et très grave». Le retraité fait un appel aux autorités afin qu’elles prennent les mesures nécessaires pour sécuriser davantage le cimetière. «Il est flagrant, en voyant cela, que pénétrer dans ce lieu est trop facile», dit-il. Un lieu où sont censées se reposer les morts, mais qui s’est transformé en lieu de carnage ces derniers jours.
Ce n’est pas Ah See Chung Tam Tsang, 67 ans, qui dira le contraire. «C’est très grave car même les morts ne peuvent plus reposer en paix de nos jours, c’est inacceptable», s’insurge  cet habitant de Chinatown, dont la femme et les parents sont enterrés à Bois-Marchand. En mars, le corps de son père a été enlevé de sa tombe, jeté à côté et le plomb à l’intérieur de son cercueil volé.

Un sacrilège qui a bouleversé toute sa famille. «Je considère la situation comme étant très grave car, de jour en jour, les cas de profanation augmentent. Les familles dont les proches sont enterrés là-bas vivent dans la crainte», explique-t-il, anxieux. «Les autorités doivent prendre les mesures nécessaires afin de revoir l’infrastructure du cimetière ;  d’autant que, la nuit, il n’y a aucun lampadaire dans les environs», poursuit Ah See.

C’est ce que pense également l’officier Ramlall Manoo, chargé du cimetière de Bois-Marchand. «Je pense que des mesures sévères devraient être prises afin que la situation ne se détériore pas. Car ce qui arrive est à la fois très triste et très grave», dit-il. Ramlall Manoo, visiblement accablé, explique que toute cette affaire a débuté le 19 mars. Et selon lui, même les employés du cimetière ne sont pas en sécurité : «Ils sont souvent victimes de menaces de la part du voisinage et d’autres individus.» Le peu de moyen dont il dispose ne lui permet pas de faire grand-chose pour améliorer la situation. Mais il espère que les autorités vont l’aider.

En attendant, il appelle tous ceux ayant des proches enterrés au cimetière Bois-Marchand à venir vérifier si les tombes de ces derniers n’ont pas été saccagées. Afin que les cadavres non-identifiés aient une chance de reposer en paix à nouveau dans leurs tombes respectives. Et que leurs familles puissent faire leur deuil... une seconde fois. Car profaner une tombe de la sorte, c’est un peu comme tuer à nouveau une personne déjà morte.

 


 

Ah Men Lim Fat, président de la Heen Foh Lee Kwon Society : «C’est un manque de respect total envers notre communauté»

Ah Men Lim Fat est un homme terriblement choqué et peiné par tout ce qui se passe actuellement au cimetière de Bois-Marchand. Le président de la Heen Foh Lee Kwon Society, sise à Port-Louis, qualifie ces actes barbares de «manque de respect total envers la communauté chinoise» et appelle les autorités à prendre les mesures qui s’imposent.«Ce n’est pas la première fois que le cimetière de Bois-Marchand est victime de ces actes. Nous avons fait des représentations à plusieurs reprises pour que le cimetière soit nettoyé et qu’un gardien y soit posté durant la nuit. Mais nos requêtes sont tombées dans l’oreille de sourds. Et c’est valable pour tous les gouvernements qui ont été au pouvoir. Personne n’a pris les mesures qui s’imposaient. L’administration régionale renvoie la balle au conseil de district de Pamplemousses et vice versa. Et voilà où on en est aujourd’hui. Nous sommes ouverts à toutes les propositions. Mais récemment, nous avons eu une rencontre avec les autorités. On nous demande de cotiser pour que le cimetière soit nettoyé. Nous ne sommes pas contre l’idée, mais il faudrait que cette mesure soit appliquée à tous les cimetières de l’île», avance Ah Men Lim Fat.

 


 

Le ministre Hervé Aimée : «On va renforcer la sécurité au cimetière de Bois-Marchand»

Le ministre des Collectivités locales prévoit plusieurs mesures pour renforcer la sécurité au cimetière de Bois-Marchand depuis que des caveaux ont été saccagés par des voleurs. «Le cimetière de Bois-Marchand s’étend sur une superficie de 83 arpents. Il n’y a que six à sept employés pour s’occuper d’un aussi grand cimetière. Il est un fait qu’il y a un manque d’effectif. Nous travaillons en collaboration avec la police qui a renforcé la sécurité au cimetière de Bois-Marchand et cela va continuer. Par ailleurs, après une descente des lieux, j’ai constaté que n’importe qui pouvait avoir accès à ce cimetière car il y a un autopont qui mène directement  à l’entrée de ce cimetière. Nous allons clôturer cette partie pour délimiter le cimetière de l’autopont. Dans un deuxième temps, nous allons installer des lampadaires pour mieux protéger les alentours. Car il n’est pas normal que même les morts ne puissent reposer en paix», a-t-il expliqué.

 


Père Labour : «La situation est très grave»

L’Église catholique partage la consternation de la population concernant la profanation de tombes au cimetière de Bois-Marchand. Le père Jean Maurice Labour, vicaire général du diocèse de Port-Louis, nous a déclaré que «la situation est très grave» : «Toute la population a été touchée par cet acte irrespectueux. Il n’y a plus de respect envers le corps humain.» Il précise que toutes les religions ont été choquées par ce qui s’est passé. «Le caractère sacré de la mort a été bafoué. C’est extrêmement dommage de constater le manque d’humanité et d’empathie dont les coupables ont fait preuve à travers cet acte honteux.»