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Maisons de squatters démolies : Quand vient la nuit…

 Sonam Neemaye et Francis Colfir vivent un cauchemar.

Une touche de lumière dans l’obscurité totale. Entendre une voix s’approcher avant même d’apercevoir la femme à qui elle appartient, c’est surréaliste. Mais Marie Brunette Lubin avait prévenu : «Zot pou vinn dan mare nwar.» Alors, c’est à l’aide de la torche de son portable qu’elle nous signale sa présence. Il est 19 heures et des poussières, et après avoir emprunté un long sentier boueux et plus qu’accidenté, nous tombons sur un spectacle de désolation éclairé par les phares de la voiture : des tôles froissées et des meubles défoncés. Des vies éclatées en petits morceaux éparpillés. Là où, il y a quelques jours, se trouvaient des maisons en tôle, il n’y a qu’un amas de débris. C’est le jeudi 3 août que la police a procédé à la démolition de certaines des habitations des squatters de Coteau-Raffin, petit coin de l’ouest de l’île. 

 

Et cette maman a perdu son toit comme une quinzaine de familles. Vendredi, elles ont demandé des explications au ministère des Terres et du Logement. Mais elles ne sont pas pour autant rassurées (aucune solution n’a encore été trouvée mais la mise à leur disposition d’une maison ou d’un lopin de terre est envisagée). Pour l’instant, Marie Brunette, 35 ans, vit dans la petite bicoque de sa cousine, qui se trouve dans la même localité, et ses deux filles, elle les a envoyées chez sa sœur, à Tamarin. Mais elle ne sait pas combien de temps cette solution de secours sera effective. La place est limitée chez ses proches. Pourtant, elle louait une petite maison, il y a quelques mois. Avec sa paye de Rs 5 000, cette employée de maison, qui vit seule avec ses enfants, arrivait à se débrouiller. Puis, le loyer a augmenté et, comme elle le dit, elle n’a eu d’autre choix que de tenter sa chance ici. 

 

L’histoire est plus ou moins la même pour Sonam Neemaye et Francis Colfir, qui ont trouvé refuge pour la nuit chez une voisine. Le couple et son enfant vivaient chez la maman de Sonam jusqu’à ce qu’ils s’y sentent à l’étroit (c’était une maison de deux chambres pour six personnes). Pour cette employée de maison et ce chauffeur, payer un loyer était financièrement difficile. Tout comme faire les démarches pour ouvrir un compte PEL afin de bénéficier d’une maison NHDC, expliquent-ils. Alors, ils se sont retrouvés à Coteau-Raffin, ont acheté des feuilles de tôle à la quincaillerie – «Nu repay tigit tigit», confie Francis – et ont construit leur petite maison. Maison dont il ne reste rien.

 

«Coup de poignard»

 

Et c’est avec les larmes dans les yeux que Sonam regarde les décombres de son ancienne vie et raconte leur existence simple entre ces fragiles murs : «La voir détruite, c’était comme un coup de poignard.» Ce vendredi soir, il fait froid. Et le moral n’est pas au beau fixe. Une brise glaciale souffle sur Coteau-Raffin et fait tinter les graines prises aux pièges dans les gousses des acacias. Le ciel est dégagé et sans éclairage public, les étoiles sont les reines de la nuit. Si Sonam, Francis et Marie-Brunette peuvent se reposer chez les voisins, ce n’est pas le cas de Michael Hélène, laboureur. Malgré la pluie du jeudi soir (et le matelas trempé), c’est à la belle étoile, dans une tente, qu’il passe ses soirées en attendant de reconstruire sa vie et sa maison : «Je ne vais pas partir de là.»

 

Comme lui, d’autres squatters ont le même objectif. Reconstruire au même endroit dès que ce sera possible : «Nous n’avons pas le choix. Nous n’avons nulle part où aller. Vous croyez que c’est simple de vivre ici sans eau et sans électricité, dans un endroit qui, à la moindre averse, devient boueux ? Mais c’est notre chez-nous», lance Marie Brunette. Mais avant ça, il faut pouvoir trouver de l’argent pour racheter des matériaux. «Nous n’avons pas encore repayé ceux que la police a écrasé et qui ne sont plus utilisables», confie Francis. Il s’indigne contre la façon de faire des autorités : «Quand il y a un cyclone, on a quand même des avertissements. Pour nous, il n’y avait rien.»

 

Et ces squatters ont aussi des rêves : obtenir un bout de terre du gouvernement ou même une maison. Pour en discuter, ils ont rejoint Michael dans son abri de fortune, sans lumière, construit à la hâte avec des bâches et quelques poteaux offerts.«Des gens nous donnent des coups de main», confie ce dernier. Dans cet espace peuplé de courants d’air, où les bougies ne restent pas longtemps allumées, sont entassées les affaires que Michael a pu sauver. Néanmoins, comme le déplore Sonam, de nombreuses choses ont été volées : «Malere pe kokin malere. Nous étions au travail quand on a détruit notre maison. Nous avons fait aussi vite que nous pouvions pour revenir. Mais c’était trop tard.» Les torches et les lampes led du laboureur ont disparu. 

 

Pour le dîner de Michael, une baguette et un bol de cari attendent. Et surtout, encore une nuit obscure.