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Des Chagossiens s’en vont au Vatican

Ces Chagossiens et descendants de Chagossiens ont leurs îles au fond du cœur et ne rêvent que d’y retourner… Une délégation du Groupe Réfugiés Chagos s’envole bientôt pour le Vatican. Elle rencontrera le cardinal Paul Gallagher, représentant de l’Ėtat du Vatican aux Nations unies, pour raconter son histoire.

Ses yeux ne quittent pas l’écran. Devant elle défilent les photos des terres qui l’ont vue naître il y a 60 ans, commentées par Olivier Bancoult, le leader du Groupe Réfugiés Chagos (GRC), et retraçant les souvenirs des Chagos. Alors, Jeannine Savrien ne peut que ressentir une vive émotion.   

 

Ces clichés, le cimetière, la vieille chapelle, les plages… elle les a vus maintes et maintes fois. Mais à chaque fois, cela lui fait le même effet. Comme un mauvais cauchemar qui ressurgit dans sa mémoire. Comme quelque chose d’horrible qui lui est resté en travers de la gorge, qu’elle n’arrive pas à digérer, à oublier. «C’est impossible», lâche-t-elle : «Comment oublier cette souffrance, cette injustice ?»

 

Jeannine fait partie de ceux et celles qui, depuis plusieurs années, se sont jetés corps et âme dans la lutte des Chagossiens pour retourner vivre dans leur «paradis perdu». Tous les moyens sont bons pour leur permettre de crier leur désarroi. Eux qui ont été, soulignent-ils, cruellement déracinés de leurs îles. C’est pour cette raison que Jeannine et d’autres natifs de l’archipel, ainsi que des descendants chagossiens, n’ont pas hésité à se joindre à la délégation du GRC pour se rendre au Vatican afin de rencontrer le cardinal Paul Gallagher, responsable de la Commision Justice & Paix et représentant de l’État du Vatican aux Nations unies, le mercredi 17 mai. 

 

«L’objectif est de partager notre histoire avec le maximum de personnes. Il faut que le monde sache ce qu’on nous a fait et ce que nous vivons»,confie Jeannine Savrien. Ce déplacement s’insère dans le cadre de la demande du gouvernement mauricien à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies (ONU), pour que la revendication de l’État mauricien sur l’archipel des Chagos et un droit de retour des Chagossiens sur leurs îles soient référés à la Cour internationale de justice. Cette motion sera débattue à l’ONU au mois de juin.

 

«Nous sommes à une période importante de ce combat qui dure depuis plusieurs années. La communauté chagossienne à Maurice a été interpellée par la position du pape François par rapport à l’accueil des réfugiés et autres peuples déplacés et/ou marginalisés. Ces représentants du GRC ont décidé de se rendre au Saint-Siège pour rencontrer l’archevêque Gallagher afin de demander officiellement le soutien du Vatican à cette démarche de l’État mauricien auprès de l’ONU. Nous carressons aussi l’espoir que la délégation puisse rencontrer le pape. Nous sommes en négociation»,a déclaré le père Jean Maurice Labour, vicaire général du diocèse de Port-Louis, lors d’une conférence de presse le mercredi 10 mai. 

 

«Que notre message passe»

 

Il était entourée du père Gérard Mongelard et du révérend Mario Li Hing, respectivement accompagnateur et aumônier des Chagossiens. «On a envie de donner une dimension internationale à la cause chagossienne. D’où notre démarche d’aller à Rome. Il faut que notre message passe. Le peuple chagossien a trop subi. Voilà 50 ans qu’on mène la lutte», soutient, pour sa part, Olivier Bancoult. 

 

Pas un jour ne passe sans que Jeannine ne pense à son archipel.«Je suis née sur l’île de Salomon et je suis arrivée à Maurice quand j’avais 10 ans. Mon rêve, c’est de retourner là-bas. Mes larmes coulent quand je suis dans mon lit le soir et quand j’y pense. Je pleure chaque 12 mars quand je vois flotter le drapeau national. Beaucoup de personnes ne connaissent pas l’histoire derrière l’Indépendance de Maurice. Nous, on le sait.»

 

Rosemonde Berthin, 63 ans, est également originaire de Salomon. En allant à Rome, elle se sent comme investie d’une mission : «Notre lutte, il faut en parler encore et encore.» Comme Jeannine et beaucoup d’autres, elle souhaiterait aller finir sa vie sur ces terres «bénies» avec son «magnifique lagon», ses «belles plages», sa nature et sa faune. «C’est vraiment le paradis», murmure Rosemonde. 

 

Si certains de ceux qui sont nés là-bas y ont laissé beaucoup de souvenirs, d’autres ont beaucoup entendu les histoires racontées par leurs parents ou grands-parents. Shirley Hilaire, 46 ans, est fille de Chagossiens et mettra aussi le cap sur l’Italie cette semaine pour faire entendre «la voix» des Chagossiens. Ses parents Mathilda Jacques et Otave Hilaire sont venus à Maurice pour faire soigner un de ses frères né là-bas et n’ont pu regagner leurs îles par la suite : «Ils me racontaient comment était la vie là-bas. Ici, il leur fallait toujours mettre la main à la poche pour subvenir à leurs besoins. Là-bas, quand ils avaient besoin de poissons, par exemple, ils n’avaient qu’à aller pêcher.»

 

Après tout ce qu’elle a entendu durant son enfance et aujourd’hui encore, Shirley est désormais animée par un seul désir : aller s’installer sur l’archipel de ses parents. «Mon père est décédé et n’a même pas pu être entérré avec ses parents», lâche-t-elle avec regret, sous le regard de son amie Eileen Rose, 52 ans, fille de Chagossienne. «Ma mère Mai-Rose avait 10 ans quand elle est venue ici avec ma grand-mère. Elles n’ont plus jamais pu y retourner. Ma maman a aujourd’hui 82 ans et vit en Angleterre», raconte Eileen qui, comme ses «frères et sœurs de la communauté chagossienne», est gonflée à bloc à l’idée d’aller au Vatican. «J’ai vécu dans une famille chagossienne, j’ai ressenti le déracinement, même si je n’y suis pas née. Je vais à Rome avec l’idée de toucher un plus grand nombre de personnes par rapport à notre réalité.» 

 

Regardant les images du pays de sa mère, elle ne peut s’empêcher d’être émue. Comme à chaque fois qu’elle pense à son peuple déraciné.

 


 

Appel à la solidarité nationale

 

Lors de la rencontre avec la presse mercredi, le père Labour a fait un appel à la solidarité nationale pour soutenir financièrement le GRC dans son déplacement. Un don est possible par virement bancaire : 

Bénéficiaire : Chagos Refugees Group SMB Ltd

Code Swift : STCBMUMU

Account number : 620 301 000 777 74 

Bank Code : 620

Bank Address : 1, Queen Street, Port-Louis.