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Élections villageoises : enn ti koz-koze ar vilazwa/z

Première ligne : Amit Seebarat, Jeremiah Pathan, Glorine Maloupe, Ouman Teelokee, Mikael Gujadhur. Deuxième ligne: Shanon Goundan, Julie Joyram, Dravish Ramanah, Vince Pillay, Anuradha Hurree, John-Steeven Couronne.

Bonzour ! Le réveil est électoral dans les villages aujourd’hui, dimanche 22 novembre. Après huit ans sans élection, les habitants/es des 130 villages du pays (ils sont 526 597 électeurs) devront voter pour leurs conseillers (neuf par village). 5 347 candidats/es sont en lice, certains/es évoluent en groupe ou alors sont indépendants/es, certains/es affichent leur couleur politique (miroir de ce qui se passe à l’échelle nationale), d’autres se présentent sans ces liens. Si les résultats devraient être disponibles dès ce soir, avec un counting le jour même du voting, il se peut qu’ils soient disponibles demain, lundi 23 novembre, en cas de contre-temps, a précisé la commission électorale. En attendant l’issue de cette élection, nous avons demandé aux habitants/es de plusieurs régions rurales de nous dire comment ils vivent cet événement dan vilaz et ce qu’ils/qu’elles attendent de ces élus/es qui seront leurs représentants/es. 

Dans l’indifférence et le questionnement. Ils n’y croient pas. Changement ? Amélioration de la qualité de vie ? Prise en charge des problèmes qui affectent le quotidien des villageois/es ? Qu’une élection et que des nouveaux représentants puissent se charger de ça, c’est une grosse blague pour Adil, habitant de Rivière-des-Anguilles : «Les candidats font beaucoup de bruit mais quand les élections sont finies, on ne les voit plus. Alors, à quoi bon souhaiter des choses pour mon village ? Les élus ne feront rien.» Jeremiah Pathan, de Rose-Belle, partage le même avis : «Tout ça, ça ne m’intéresse pas ! Je le vois, plutôt, comme une perte de temps.» Marine de Grand-Bois aussi n’attend absolument rien. D’ailleurs, elle questionne le principe même de la campagne : «Je trouve ça pas top que des gens viennent nous voir juste pour nous offrir des choses et s’attendent à ce qu’on vote pour eux en retour.» Dit comme ça, ça n’a évidemment pas l’air d’être une chose constructive. C’est pour cela qu’il faudrait changer le système, c’est ce qu’estime Vince Pillay, d’Arsenal : «N'est-il pas grand temps d'apporter une réforme au niveau des élections villageois afin de bouger vers un système plus équitable où les habitants peuvent élire leurs conseillers de district ? Car, au final, toutes les décisions se font au niveau du District Council ?» Lui n’attend rien de ce rendez-vous électoral : «Il suffit de voir l’affichage sauvage ! Il est clair que les partis sont toujours ancrés dans le passé. C’est rigolo de voir qu’ils proposent des clean-up campaigns alors qu’ils sont en train de polluer l’environnement avec leurs affiches.»

 

Des hommes et des femmes de qualité. Mais il n’y a pas que du défaitisme dans l’air ! Pour des villageois/es, cette élection peut également être synonyme de changement, de mieux-être et de mieux-vivre. À condition, bien sûr, de donner leur chance aux personnes qui le méritent : «Ça peut être une bonne chose pour le village, à condition, bien sûr, que les personnes compétentes soient élues, qu’elles viennent, ensuite, en aide aux gens qui ont besoin d’elles», confie Julie Joyram de Surinam. Dravish Ramanah veut y croire également. L’habitant de Piton préfère être positif : «C’est l’opportunité de donner l’occasion à des personnes de représenter notre village et de faire de leur mieux afin d’améliorer les infrastructures.» Glorine Maloupe de Quartier-Militaire espère que le changement sera porteur d’unité et de confiance : «Ces élections permettront de renouer la confiance entre les élus et les habitants.» Shanon Goundan de Chamouny rêve d’une opération met prop : «Il est grand temps de passer un grand coup de balai et de se débarrasser des morpions qui jouissent des avantages afin d’avoir un groupe avec une approche écologique et qui va travailler pour l’habitant.»

 

La drogue et l’insécurité. Mikael Gujadhur, qui vient de Trou-d’Eau-Douce, estime que la priorité des élus devrait être la suivante : «Aider les jeunes à ne pas tomber dans la drogue.» Le problème de la consommation de substance illicite pa get rezion. À Rivière-Noire, Sheila s’inquiète de ce fléau qui ne cesse de prendre des proportions incontrôlables : «Surtout chez les jeunes. On en voit régulièrement dans un état second et on ne se sent pas en sécurité. Alors, il faudrait que ceux et celles qui sont des Decisions Makers s’intéressent à ce problème et travaillent avec les ONG qui essaient tant bien que mal d’apporter leur contribution dans ce domaine.» À Grand-Gaube, chez Anuradha Huree, c’est la sécurité qui est au cœur des attentes : «Il y a trop de cas de vols ou d’attaques sur les piétons. Et même dans les cours et les maisons des résidents. Nous avons bien besoin de patrouilles policières plus régulières dans la région et plus de caméras de surveillance sur les routes intérieures de Grand-Gaube et de Calodyne.» Elle évoque également l’insécurité sur le parking d’un supermarché de la région, la conduite imprudente de certains chauffeurs et la présence de quad bikes sur les routes du village côtier : «Alors qu’ils ne sont pas supposés rouler sur les chemins goudronnés et mettent à risque les usagers et piétons, et leur propre sécurité face aux véhicules qui circulent.»

 

Infrastructures et loisirs. Zéro développement. C’est le constat de John-Steeven Couronne de Bois-d’Oiseaux : «Depuis les dernières élections, il n’y a eu aucun développement dans mon village, contrairement à ce que j’ai pu voir dans d’autres localités de la circonscription qui compte deux ministres. Depuis 2012, rien n’a bougé ni les bus stops ni les drains. J’espère qu’il y aura du changement avec une nouvelle équipe.» Mikael Gujadhur, lui, souhaite que des mesures rapides et efficaces soient prises : «Plus d’infrastructures pour ceux qui partent vers l’Île-aux-Cerfs (parking, sécurité, police, entre autres). Et sur les routes également afin qu’elles soient plus sûres : feux, ralentisseurs, trottoirs, par exemple.» Ouman Teelokee d’Albion propose : «Une open gym à la plage qui, d’ailleurs, devrait être plus souvent nettoyée, un projet pour la protéger, un bureau de poste, l’agrandissement de la route principale d’Albion, la possibilité d’y ajouter des trottoirs.» Il souhaite également qu’il y ait plus d’activités : «Pourquoi pas un concert.» À plusieurs kilomètres de chez lui, Anuradha Hurree évoque également l’absence de loisirs et d’activités : «Ce serait bien de pouvoir organiser des activités sociales et sportives pour les jeunes de la région, avec les vacances qui arrivent. Et même pour les personnes âgées qui restent à la maison, sans rien pour les distraire.»

 

Un changement de mentalité. C’est le souhait de Shanon Goundan de Chamouny : «L’un des principaux changements que je souhaite, c’est un changement de mentalité ! Nous devons commencer à prendre en charge notre village et ses habitants à court et à long termes.» Il faut revoir la sémantique du développement : «Nous devons arrêter la même vieille mentalité. Ce n’est pas seulement changer l’éclairage public, goudronner ou célébrer les festivités. C’est une approche holistique écologique. Le but, c’est d’encourager les habitants à faire leur propre développement, leur propre business. Ça va créer plus d’emplois de qualité. C’est ce que nous appelons un bon développement écologique dans le respect de l’environnement.» Pour lui, il est temps que les villages et leurs conseillers se tournent vers le développement durable et participatif : «Nous avons besoin d’une politique participative où toute grande décision est prise avec les habitants car il s’agit avant tout de leurs habitats et vies.» Il est également important de promouvoir l’entrepreneuriat et la culture des terres : «Un des avantages de vivre dans un village, c’est qu’il y a une abondance des terres où l’on peut planter et cultiver. Nous devons aussi commencer à faire des jardins communautaires, avec pour but d’encourager les adultes et enfants à se reconnecter à la terre, à avoir une connaissance et un savoir-faire de l’agriculture.» Des élus de qualité pourront apporter ces changements : «C’est le rôle des élus du village d’encourager et de donner des formations. Des coopératives peuvent être créées et avoir un label Eat local. L’industrie sucrière est en train de mourir à Maurice. Les villageois doivent aussi commencer à changer et à évoluer. Il est possible de louer des terrains sucriers qui sont abandonnés à des villageois afin qu’ils y plantent et/ou fassent des développements écologiques comme la fabrication des tant vakwa.» Mikael Gujadhur rejoint Shanon Goundan dans cette réflexion et se tourne vers l’importance de la nature et sa protection : «Il faut plus d’activités de conscientisation pour la protection des plages de la localité.»

 

Pour des villages touristiques. L’habitant de Trou-d’Eau-Douce croit en ce concept, en cette nécessité de se réinventer. Mais il faut que les élus suivent et investissent : «Des campagnes de pub pour promouvoir nou zoli vilaz touristik.» C’est le next step, estime Shanon Goundan : «Nous avons vu depuis ces derniers temps et avec la Covid, que les touristes qui viennent aujourd’hui à Maurice, préfèrent dépenser moins et être plus en contact avec la population pour vivre l’authenticité.» Le développement serait inclusif en allant vers ce concept : «Les villages ont un atout particulier, certains sont proches de la mer, d’autres proches des montagnes. Nous devons commencer à encourager le tourisme chez l’habitant.»

 

Mais aussi. Shanon Goundan évoque le problème des chiens errants, la nécessité de promouvoir le tri sélectif et le recyclage des déchets. Mikael Gujadhur estime, lui, que les élus devraient trouver un plan d’aide afin de tendre la main aux pêcheurs affectés par le naufrage du Wakashio et la marée noire qui a suivi, mais aussi aux plus vulnérables. Anuradha Huree demande à ce que, dans le village, le tapage sonore soit verbalisé.

 

Un baromètre. Amit Seebarat, habitant de Surinam, préfère parler politique. Il n’a pas de doute, ces élections seront un baromètre pour le gouvernement : «Un an après les élections générales, et surtout après l’ère Covid, beaucoup de choses ont changé (les augmentations de prix, le report du PRB et celui de l’augmentation des pensions). Après les résultats, nous aurons un aperçu de l’état d’esprit des villageois vis-à-vis du gouvernement.»