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La vie anglaise de Swaleha Joomun

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Swaleha (à l’extrême droite) en compagnie de ses filles. L’aînée Rushda(à gauche), Lubnaa et Hayfaa. Au centre, le frère de Swaleha, Yassine. Photo prise dans un musée à Londres

Changer de destin ! Ne pas se transformer en un sous-produit de l’affaire Gorah Issac (voir hors-texte), ne pas devenir prisonnière. Faire des choix, tracer d’autres chemins. C’est ce que Swaleha Joomun s’est dit le 25 janvier 2003 quand elle prend l’avion en compagnie de ses trois filles pour l’Angleterre.

Cette veuve à l’allure fragile, pétrie d’un caractère d’acier, grande gueule, rebelle, controversée, celle qui provoque un mélange d’admiration et de haine, celle que beaucoup ont cru folle et hystérique et qui est sortie de l’ombre depuis l’affaire Gorah Issac dit avoir quitté l’île Maurice pour un «rendez-vous» avec «l’avenir» de ses filles.

En Angleterre (d’où on l’a contactée par téléphone et par email), Swaleha travaille en faisant des traductions de textes. «J’ai traduit récemment des textes évangéliques.» Là-bas avec ses filles, la vie lui est «agréable». «Nous nous sentons chez nous, bien dans notre peau. J’aime la facon dont la communauté musulmane est soudée et si bien organisée ici.» Pour Swaleha «c’est l’état d’esprit qui importe quand la vie change de cours; aussi étrange que cela puisse paraître, je n’avais pas de racines à Maurice. La transition n’a pas été difficile,» nous dit-elle.

Pourquoi partir ?

Ce départ de Maurice serait-il une fuite, l’abandon d’un combat pour celle qui, depuis 96, n’a pas arrêté de réclamer justice pour son défunt mari, quitte à utiliser des moyens qui ont choqué: circuler dans la voiture criblée de balles dans laquelle se trouvait son époux, organiser nombre de meetings publics, rédiger une poignée de lettres ouvertes, porter sa candidature aux élections de 2001 pour se désister après ?

Non, dit Swaleha, quitter Maurice ne signifie nullement abandonner son combat. « Dans la vie, les perspectives changent, dépendant de l’endroit où vous vous tenez. Beaucoup de choses auxquelles je croyais et qu’on avait voulu me faire avaler ont été ‘vues’ et ‘crues’ différemment. Je suis partie car je voulais dire non à ce qui me dégoûtait. La justice était bafouée au grand jour . La politique était devenue une ‘optical illusion’. Tout se rétrécissait autour de moi, la mentalité des gens surtout. La femme mauricienne est très mal encadrée, mais la musulmane est davantage mal encadrée, je crois. » Et puis, le temps passait, les filles grandissaient. « Mes priorités avaient changé. »

Alors, depuis qu’elle est partie dans ce bout d’Europe envers laquelle elle est « tellement reconnaissante » de lui avoir octroyé un permis de résidence, Swaleha dit que désormais ‘the sky is the limit.’

«Le pays se construit d’hommes, d’idées, d’opportunités. L’Angleterre m’a redonné ce que l’île Maurice m’a pris.C’est l’autonomie dans tous les sens.  Je suis sereine. Mes enfants sont épanouies.»

Trois enfants qui, depuis leur arrivée en Angleterre, «adorent» l’école et ne récoltent que des récompenses. (Voir hors-texte)

Loin de Maurice, l’insaisissable Swaleha reste quand même proche de l’actualité de l’île, écoute les radios à travers Internet et regarde la MBC. Comme d’habitude, sa langue reste bien pendue. «Tout est stérile là-bas chez vous. C’est le cirque habituel. Les over-achievers que sont nos ministres font beaucoup sans rien faire. L’île Maurice, c’est peut-être le soleil, mais c’est aussi l’obscurantisme, les préjugés, les prescriptions, le laisser-aller, c’est l’amateurisme et, surtout, le manque d’informations à tous les niveaux. » Garde-t-elle contact avec sa famille ? « De nos jours, être en contact est une question de technologie. Il y a le téléphone, l’Internet, les SMS. Tout est à portée de main. Mes filles ont même gardé contact avec leurs amies à travers le ‘chat’, » explique Swaleha qui compile actuellement « une genèse des événements » dans l’affaire Gorah Issac pour sortir ensuite un livre « basé sur une partie de ma vie » qui sera sa « part de vérité, » chaque histoire étant faite « de deux versions. »

Que pense-t-elle de Lyakaat Polin, le seul à avoir avoué sa participation au triple assassinat de la rue Gorah Issac? «La justice n’a pas de valeur à mes yeux». Mais elle affirme qu’elle a «pu pardonner à Lyakat, «le seul» qui lui a demandé « pardon.»

De la libération de Cehl Meeah - détenu trois années durant dans l’affaire Gorah-Issac et qui bénéfieciera ensuite d’un non-lieu - Swaleha affirme que «sa libération ne m’a nullement surprise car la poursuite n’avait aucune preuve contre lui. » A-t-elle des relations avec lui ? «Ben oui, disons que je lui ai parlé au téléphone plus d’une fois. »

En Angleterre depuis bientôt deux ans, Swaleha confie que ce qui lui manque est « un bon briyani ‘deg’, les confits pimentés de Plaine Verte. »

Comme quoi, le goût des souvenirs finit toujours par rattraper le destin…

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