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Kelly, 12 ans, abusée sexuellement par son beau-père séropositif

Sheryl est celle qui a découvert que sa sœur était abusée sexuellement par nul autre que son beau-père.

Elle a été privée de l’amour de son père biologique et sa mère a démissionné de ses responsabilités. Quasiment livrée à elle-même, Kelly* a tantôt été admise dans un couvent pour enfants en difficulté, tantôt envoyée au Rehabilitation Youth Centre. À sa sortie de l’établissement, elle a élu domicile chez son beau-père, qui est séropositif, et aurait été abusée sexuellement par ce dernier à plusieurs reprises. Sheryl*, sa sœur, revient sur son histoire.

On ne choisit pas sa famille, dit la chanson. Kelly*, 12 ans, en est la triste illustration. La jeune fille a été livrée à elle-même dès sa plus tendre enfance, privée de l’amour et de l’encadrement d’un père, mais aussi d’une mère qui, du jour au lendemain, n’a plus donné signe de vie. Et comme souvent le malheur s’acharne, Kelly aurait été abusée sexuellement par son beau-père Cyril*, chez qui elle vit depuis le mois de juin, à plusieurs reprises.

 

C’est dans cette modeste demeure, plantée au milieu d’un terrain en friche et dépourvue d’électricité, que Kelly aurait, selon ses dires, été forcée à avoir des relations sexuelles non protégées avec son beau-père qui est séropositif. «Il a brisé la vie d’une innocente. Il doit payer pour ce qu’il a fait», lâche Sheryl*, la sœur de Kelly. C’est elle qui a fait éclater l’affaire. «Il y a quelques jours, je suis allée la voir au domicile de son beau-père. Le soir, je les ai surpris en flagrant délit. Ils dormaient dans le même lit et moi j’occupais un matelas posé sur le sol, dans la même chambre», se souvient Sheryl.

 

Cette nuit-là, dit-elle, elle n’a pas fermé l’œil tant les interrogations se bousculaient dans sa tête. «J’ai creusé l’abcès avec ma soeur dès le lendemain matin. Elle m’a fait des révélations troublantes. Elle a dit qu’elle avait été abusée par Cyril et que son calvaire durait depuis le mois de juin. J’étais tellement bouleversée que je ne savais pas quoi faire sur le coup. Mais le même soir, la même scène s’est répétée et le lendemain, j’ai abordé le sujet avec Cyril. Il m’a suppliée de ne pas le dénoncer à la police, car il comptait épouser ma sœur et emménager avec elle dans une autre maison», explique Sheryl.

 

Ces aveux lui ont glacé le sang et elle a décidé d’avertir la Child Development Unit. C’était le vendredi 3 octobre. Une enquête policière a été ouverte et a conduit à l’arrestation du beau-père de Kelly. Celui-ci n’a pas nié les faits qui lui sont reprochés, à quelques détails près. «J’ai bien eu des relations sexuelles avec elle. Mais c’était avec son consentement», a-t-il affirmé aux enquêteurs du poste de police de la rue Pope-Hennessy, placés sous la houlette du chef inspecteur Ramesh Badal.

 

Sheryl, elle, persiste et signe. «Il a abusé d’elle de force. Elle me l’a dit. Je crains qu’elle ne soit déjà contaminée par le virus du sida, car Cyril est séropositif», s’inquiète-t-elle. Vêtue de son uniforme de femme de chambre, Sheryl semble porter le poids du monde sur ses frêles épaules, n’ayant elle-même pas eu une vie facile. Mais, pour l’heure, c’est sa sœur qui la tracasse. Celle-ci a été admise à l’hôpital psychiatrique Brown-Sequard, car elle se serait montrée violente et insultante envers un médecin de la police qui tentait de l’examiner le lundi 6 octobre. «Elle vit peut-être les pires moments de sa vie», lâche Sheryl, les larmes aux yeux.

 

«Nous avons tous un père différent...»

 

Et des moments difficiles, dit-elle, Kelly en a connu toute sa vie. «Nous sommes issues d’une famille de six enfants. Mais nous avons tous un père différent. Je ne sais pas où se trouvent les autres. Ma mère, elle, est également introuvable depuis des années. Kelly est le seul membre de la famille avec qui je suis en contact», confie Sheryl. Son père, Kelly ne l’a jamais connu : «Selon notre mère, le père de Kelly a disparu avant même qu’elle ne vienne au monde. C’est à ce moment-là qu’elle aurait fait la connaissance de Cyril qui aurait accepté de donner son nom de famille à Kelly. Mais je me demande parfois si ce n’est pas son vrai père, car ils se ressemblent physiquement. Seul un test ADN pourra éclaircir tout ça.»

 

Depuis toute petite, Kelly est donc ballottée de gauche à droite. «Ma mère n’était jamais présente pour nous. Elle avait plusieurs partenaires. Et un beau jour, elle a disparu. Kelly a été placée chez des bonnes sœurs à Rose-Hill. Mais trois ans plus tard, elle était devenue agressive avec les religieuses et a été placée au Rehabilitation Youth Centre de Beau-Bassin pendant un an, avant d’être autorisée à sortir le 15 juin», raconte Sheryl. À sa sortie de l’établissement, c’est son beau-père qui est venu la récupérer.

 

Nous avons rencontré Anne*, la mère de ce dernier, dans un faubourg de la capitale. Elle assure que toute cette affaire ne tient pas la route. «C’est une vengeance. Je ne sais pas pour quelle raison mais Sheryl veut se venger de mon fils. C’est moi qui ramène les sous à la maison et qui nourrit tout le monde. La mère de Kelly a disparu et c’est mon fils qui s’est toujours occupé d’elle. Voilà ce qu’il récolte aujourd’hui. Mon fils n’a jamais couché avec cette fille, c’est complètement faux», assure Anne, 73 ans.

 

Son opinion, c’est que Kelly est une jeune fille en manque de repères. «Elle se balade avec plusieurs jeunes hommes à longueur de journée. Elle aurait même des relations sexuelles avec eux», dit-elle. Des propos que les enquêteurs chargés de ce dossier ne démentent pas. «Elle est sexuellement active et a même un petit copain. Mais le plus inquiétant, c’est le fait qu’elle aurait eu plusieurs partenaires sexuels», avance une source proche de l’enquête.

 

Pour ne rien arranger, Sheryl avance que sa sœur serait enceinte. «Son ventre est déjà bien arrondi. Cyril m’a dit qu’il l’avait emmenée chez un médecin pour effectuer plusieurs tests médicaux», dit-elle.

 

À seulement 12 ans, l’avenir de Kelly est aujourd’hui fait d’incertitudes. La faute à l’absence d’un encadrement parental et familial.

 

* Prénoms fictifs

 


 

Véronique Wan Hok Chee, psychologue : «La place de cette ado n’est pas à l’hôpital psychiatrique Brown-Sequard»

 

«Elle a besoin d’être encadrée par des personnes qui pourront l’aider à surmonter cette dure épreuve. Elle a besoin d’être suivie par un psychologue et par des gens qui pourront lui apporter de la chaleur humaine.» Véronique Wan Hok Chee, psychologue, est catégorique : la place de Kelly, abusée sexuellement par son beau-père séropositif, «n’est pas à l’hôpital psychiatrique Brown-Sequard».

 

Par ailleurs, notre interlocutrice fait ressortir que la jeune fille a été victime d’un manque d’encadrement familial. «Les parents doivent prendre leurs responsabilités. Mais dans bien des cas, ceux qui démissionnent de leurs responsabilités n’ont eux-mêmes pas bénéficié d’un encadrement correct. Donc, ils répètent les erreurs de leurs parents et trouvent cela tout à fait normal», explique-t-elle. Et d’ajouter : «Livrée à elle-même, cette ado n’a point de repère et est donc devenue, malgré elle, une proie facile. Malheureusement, des personnes sans scrupule ont profité d’elle. Il lui faut désormais un suivi psychologique et des personnes qualifiées qui pourront l’aider à se reconstruire.»