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Séquestré et battu à mort à Karo Kalyptis : Desveaux Augustin, victime d’un règlement de comptes sur fond de trafic de drogue ?

C'est dans cette maison à Karo Kalyptis que Desveaux Augustin (photo ci-contre) a été séquestré et tabassé avant d'être secouru par la police.

«Mo pa pou kapav donn okenn lanket aster-la.» Ce sont les dernières paroles de Desveaux Augustin après son admission à l’hôpital Jeetoo où il a rendu l’âme peu après. Le rapport d’autopsie indique que cet habitant de Baie-du-Tombeau a succombé à un «hemorrhagic shock». Les premiers éléments de l’enquête policière indiquent qu’il a été séquestré et battu à mort dans une maison, à Karo Kalyptis. De puissants trafiquants de drogue opérant dans un cartel sont soupçonnés d’avoir commandité son kidnapping et son agression mortelle. La police a déjà procédé à deux arrestations. Récit.

Son enlèvement et son agression mortelle ressemblent à un scénario de série sur les narcotrafiquants… Desveaux Augustin, 54 ans, ne donnait plus signe de vie depuis trois semaines, selon sa demi-sœur Christine Jolicoeur. Le 10 juin, le quinquagénaire, un habitant de Cité Florida, Baie-du-Tombeau, a finalement été retrouvé séquestré et blessé dans une maison, à Karo Kalyptis. Il a été conduit à l’hôpital Jeetoo où il est décédé peu après. Le rapport d’autopsie indique qu’il a succombé à un «hemorrhagic shock». La police privilégie la thèse d’un règlement de comptes. Pourquoi ? Qui pourrait lui en vouloir ? Et pour quelles raisons ?

 

Le 10 juin, vers 21h15, un constable affecté au poste de police d’Abercrombie se rend à la salle L2 de l’hôpital Jeetoo pour interroger Desveaux Augustin qui, un peu plus tôt, ce soir-là, avait été secouru par des policiers qui s’étaient rendus à Karo Kalyptis suite à un appel anonyme. Mais le quinquagénaire n’a pas souhaité donner de déclaration écrite sur les circonstances de son agression. «Mo pa pou kapav donn okenn lanket aster-la», a-t-il seulement lancé au policier, avant de pousser son dernier soupir vers 1h05.

 

La police a déjà procédé à l’arrestation de deux suspects dans cette affaire. Jean Éric Baptiste, un maçon de 26 ans, a été arrêté dans la maison où Desveaux Augustin était séquestré. Cet habitant de Terre-Rouge fait l’objet d’une charge provisoire de murder. Il est détenu à Plaine-Verte. La police a également procédé à l’arrestation d’une habitante de Bois-Marchand, le 12 juin. Elle fait également l’objet d’une charge provisoire d’assassinat. Cette enquête, menée initialement par la CID, a été confiée à la MCIT.

 

D’autres suspects recherchés

 

D’autres suspects sont recherchés. D’après les premières indications de l’enquête policière, ce serait de puissants trafiquants de drogue opérant dans un cartel qui auraient commandité le kidnapping et l’agression de Desveaux Augustin qui a succombé aux nombreux coups reçus. Pour quel motif ? D’après Christine Jolicoeur, la demi-sœur de Desveaux Augustin, ce dernier travaillait comme contracteur en bâtiment et effectuait aussi des travaux de soudure. Il vivait seul à Cité Florida.

 

C’est par le biais de la presse que Christine Jolicoeur dit avoir appris que son frère aurait été victime d’un règlement de comptes et qu’il aurait été tabassé à mort par des hommes de main de puissants trafiquants de drogue opérant dans un cartel. «Mo pa kone kifer zot inn bat li. Mo pa kone osi si li ti pe fer bann tranzaksion ek bann trafikan ladrog. Mo pa konn so lavi prive», précise notre interlocutrice.

 

La police disposerait d’informations selon lesquelles Desveaux Augustin serait impliqué dans plusieurs transactions louches. Il aurait été pris pour cible par un cartel qui le soupçonne d’avoir détourné Rs 30 millions, émanant d'un trafic de drogue, pour de puissants trafiquants. Cette affaire est d’ailleurs diversement commentée dans la région de Karo Kalyptis.

 

Certains avancent qu'il y aurait aussi une histoire de détournement de fonds. Serait-ce pour cette raison qu’il a été kidnappé et agressé ?

 

Secouru par la police

 

D’après certaines rumeurs, les hommes de main des trafiquants de drogue l’auraient retrouvé quelques jours plus tôt. Ils auraient battu Desveaux Augustin à coups de poings pendant deux jours, avant que ce dernier ne soit secouru par les policiers du poste de police d’Abercrombie, qui auraient été alertés par des voisins ayant entendu la victime hurlant de douleurs. Selon certaines informations, le cartel reprocherait également au quinquagénaire d’être l’informateur de la police suite à la saisie d’une grosse cargaison de haschisch à Roche-Bois, il y a quelques jours. La valeur marchande de la drogue saisie était évaluée à plusieurs millions de roupies. Cette affaire était-elle la goutte d’eau qui a fait déborder le vase ?

 

Interrogé, le suspect Jean Éric Baptiste, qui porte le sobriquet de Rasta, a d’abord nié les faits qui lui sont reprochés. Mais par la suite, il a déclaré que Desveaux Augustin aurait été séquestré et tabassé à coups de poings et de morceau de bois pour une affaire de mœurs. Jean Éric Baptiste essaie-t-il de couvrir ledit cartel ? Les limiers de la MCIT comptent le cuisiner à nouveau dans les jours à venir. Ils privilégient la thèse d’une «correction» qui aurait mal tourné, une pratique courante chez les trafiquants de drogue.

 

Pour les proches de Desveaux Augustin, à Rodrigues, ce décès «est une épreuve». Ils ne souhaitent donc pas faire de commentaires pour le moment. Mais d’après son entourage, le quinquagénaire ne manquait de rien à Rodrigues.

 

Desveaux Augustin était notamment très connu dans le milieu du football après avoir évolué dans l’équipe de foot de Saint-Étienne à Roche Bon Dieu et Flamengo mais aussi comme arbitre. La nouvelle de son décès a d’ailleurs provoqué une onde de choc dans la 21e circonscription, où ses funérailles auront d’ailleurs lieu.

 

Patrice Milazar, premier arbitre international de football rodriguais, peine toujours à croire que son «mentor» n’est plus de ce monde. «Il a été le premier à croire en moi et m’a beaucoup encouragé. C›est grâce à lui que je suis l'arbitre que je suis. Je ne vais jamais oublier ses paroles : ‘‘Patrice, to pou al lwin dan arbitraz.’’ Voilà ce qu’il m’avait dit sans même m’avoir vu à l’œuvre», confie le sifflet no 1 de Rodrigues, qui a officié lors de plusieurs compétitions africaines. Desveaux Augustin avait également l’œil pour découvrir des talents, poursuit-il. «Je ne cesserai jamais de le remercier. Je regrette de ne pas le lui avoir dit une dernière fois. Merci teacher !»

 

Crosby, le frère de Desveaux Augustin, qui a aussi officié comme arbitre, a également connu une fin tragique. Il est décédé suite à un accident de la route il y a quelques années. C’est le cœur lourd de tristesse que les proches de Desveaux Augustin doivent aujourd’hui faire face à un terrible coup du sort, en attendant de connaître toute la vérité sur la mort de celui qu’ils chérissaient tant… 

 

Texte : Jean Marie Gangaram, Elodie Dalloo et Rehade Jhuboo