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Procès des agresseurs de Shaïna, violée à 13 ans et tuée à 15 ans, en France - Parveen Hansye : «Ma fille a été privée de son enfance»

La famille Hansye compte sur ce procès pour laver l'honneur de sa petite princesse.

C'est à titre posthume que la première séance du procès dans l'affaire Shaïna – une jeune fille d’origine mauricienne – s'est tenue en début de semaine. Ses agresseurs, initialement accusés de viol, ont finalement été jugés pour agression sexuelle en réunion, entre autres. Ils risquent entre neuf mois et un an de prison ferme. Parveen, la mère de Shaïna, compte sur ce procès pour laver l'honneur de sa petite princesse qui, deux ans après le viol collectif, a hélas été tuée par son petit ami. Témoignage d’une mère meurtrie… 

Ils se sont installés dans la région de Creil, dans l’Oise, en France, il y a plusieurs années. Shakeel et Parveen Hansye, originaires de l’île Maurice, avaient alors des projets plein la tête. Chanceux de bénéficier d’une situation financière stable, ils n’ont jamais manqué de quoi que ce soit. Il y a un peu plus d’une vingtaine d’années, ils ont accueilli avec joie leur premier enfant : un fils, Yasin. Sept ans plus tard, leur bonheur atteint son apogée lorsque la mère de famille tombe à nouveau enceinte. «Mon époux voulait absolument que nous ayons une fille. En apprenant que j’en attendais une, il était aux anges. Nous étions tous prêts à accueillir cet enfant bien avant son arrivée», raconte Parveen avec nostalgie. C’est ainsi que le 11 août 2004, elle donne naissance à Shaïna. «Notre famille était complète. Shaïna était notre petite princesse.»

 

Shakeel et Parveen Hansye ont des souvenirs heureux de leur enfance. Ils ont eu la possibilité de vivre ouvertement, librement, à Maurice. Ils avaient souhaité une vie similaire pour leurs deux enfants. «J’ai moi-même connu mon époux très jeune et je me suis mariée à l’âge de 15 ans.» Même si Shaïna a toujours été leur petite protégée, ses parents n’ont jamais voulu lui imposer des restrictions. «Elle était libre de ses choix. Elle pouvait jouer en bas de l’immeuble lorsqu’elle le souhaitait ou sortir avec ses amis. Elle n’a jamais été forcée, non plus, à porter le voile. Elle voulait vivre à la française», confie Parveen. Cependant, dans la cité de Plateau Rouher, de nombreuses personnes ne partageaient pas cet avis. Victime d’un viol collectif à l’âge de 13 ans, puis harcelée et tabassée, Shaïna a vécu le martyr pendant plusieurs mois. Et alors qu’elle allait enfin mieux, elle a été brûlée vive en octobre 2019, alors même qu’elle était enceinte.

 

D’après les parents de Shaïna, «son viol a été le début de sa descente aux enfers. Elle a été privée de son enfance». À l’époque, âgée de 13 ans, «elle regardait les dessins animés, jouait à la poupée, mais surtout, croyait au prince charmant, aux contes de fées». Elle a commencé à rêver après avoir fait la connaissance de Djibril, qui allait devenir son petit ami, à la sortie du collège. «Je ne l’ai jamais empêchée d’avoir un copain», confie Parveen. Au début, Shaïna était sur un petit nuage. Elle le croyait gentil, attentionné, jusqu’à ce qu’il change de comportement. «Il voulait d’elle des choses dont elle ne voulait pas.» Son cauchemar a commencé lorsque Djibril se serait servi d’une photo d’elle dénudée – obtenue sous la contrainte – pour lui faire du chantage et la forcer à avoir des rapports sexuels avec lui. Il aurait menacé de publier le cliché si elle ne le rejoignait pas dans une clinique désaffectée du quartier le 31 août 2017, avait-elle déclaré aux enquêteurs. «Son amie l’avait accompagnée mais le jeune homme lui avait demandé d’attendre à l’extérieur. Elle l’a entendue se débattre et hurler. Elle a déposé dans l’affaire en tant que témoin», raconte Parveen.

 

D’après l’article du site d’informations Le Monde, qui a permis de médiatiser l’affaire, son petit ami et ses deux copains lui auraient enlevé de force son pantalon et l’auraient filmée, tout en menaçant de publier des images dénudées d’elle. Elle aurait crié, se serait débattue, jusqu’à ce que Djibril lui mette la main sur la bouche pour la faire taire. Ensuite, ils l’auraient violée. Après avoir pu échapper à ses bourreaux, sous le choc, elle a compris que la scène avait déjà été partagée sur les réseaux sociaux. D’autres jeunes du quartier l’interpellaient dans la rue, en la traitant de tous les noms. Lorsqu’elle s’est rendue au commissariat de Creil accompagnée de ses parents après les faits, «elle s’est montrée très courageuse. Elle n’avait rien à cacher». 

 

Elle a relaté les détails glaçants de son agression à l’enquêtrice. Elle a clairement dit, dans sa déposition, avoir été violée mais l’enquêtrice, semble-t-il, a mis en doute sa crédibilité. D’ailleurs, dans son compte-rendu, elle a mentionné en majuscules : «DISONS QU’AU COURS DE SON AUDITION, Shaïna NE MANIFESTE AUCUNE ÉMOTION PARTICULIERE.» Idem du côté de la médecin légiste qui l’examine. Elle a bien constaté de nombreuses ecchymoses, notamment à l’intérieur des cuisses, mais a néanmoins commencé son rapport en mentionnant : «On ne perçoit pas d’affect, de tristesse, de honte ou de sentiment de culpabilité.»

 

Décision en délibéré

 

Ce lundi 31 janvier et ce mardi 1er février, c’est à titre posthume que la première séance du procès des agresseurs de Shaïna s’est tenue. Celle-ci a eu lieu à huis clos au tribunal correctionnel pour enfants de Senlis, les prévenus étant mineurs au moment des faits : deux d’entre eux, dont Djibril, le principal concerné, étaient âgés de 14 ans, et les deux autres, de 16 et 17 ans. Depuis l’ouverture de l’enquête, ils nient les faits qui leur sont reprochés et prétendent que c’est Shaïna qui aurait harcelé son petit ami. «Pourtant, lorsque ses agresseurs ont entendu dire que nous avions porté plainte, ils s’étaient concertés et avaient préparé leur ligne de défense. Les enquêteurs avaient obtenu comme preuve des messages échangés», précise Parveen.

 

De plus, pendant l’audience, une courte vidéo de l’agression, retrouvée par les enquêteurs, a été diffusée. Dans celle-ci, on voit l’adolescente assise sur un banc, partiellement dénudée et tentant de cacher son sexe sous les injures de ses agresseurs. Elle tente de les repousser lorsque la vidéo s’interrompt. «On nous a conseillé de ne pas la visionner mais vu qu’on nous répétait que ma fille mentait, nous sommes restés. Même si nous n’avons pas vu l’acte sexuel, nous avons pu constater qu’il y avait de la violence. Nous avons clairement pu voir qu’elle n’était pas consentante et que la version des prévenus n’était pas cohérente», insiste sa mère.

 

Initialement mis en examen pour viol, les trois plus jeunes prévenus ont tout de même été jugés pour une agression sexuelle et des violences en réunion, ainsi que pour avoir filmé et partagé la scène. L’ex-petit ami de Shaïna est aussi, pour sa part, poursuivi pour des pressions graves en vue d’obtenir des faveurs sexuelles. Quant au plus âgé, il est soupçonné d’une agression sexuelle commise le 24 août 2017. Les deux plaintes avaient été déposées le même jour. Le parquet a requis entre neuf mois et un an de prison ferme contre les quatre jeunes. Le tribunal correctionnel pour enfants de Senlis a mis sa décision en délibéré au 1er mars. Cette décision a-t-elle été à la hauteur des attentes et espérances de la famille Hansye ? «Je ne peux pas me prononcer dessus. Ils auraient pu prendre deux mois, cela ne m’aurait pas dérangée. J’espère juste qu’au terme de ce procès, ils assument leur part de responsabilité et que le public se rende compte que ma fille n’a été qu’une victime. J’espère pouvoir laver son honneur.»

 

Un cauchemar

 

Parveen n’oubliera jamais à quel point les mois suivant ce drame avaient été difficiles pour sa petite princesse à l’époque. «Elle n’avait que 13 ans. Sa vie avait été complètement chamboulée.» Elle poursuit : «Avant son viol, elle jouait comme tout le monde en bas de l’immeuble. Après son agression, elle ne voulait plus sortir, elle sombrait, elle avait honte car la vidéo avait été partagée, elle était harcelée. Elle a été hospitalisée, a dû voir un psychologue. Elle a même dû être placée dans un autre collège.» Ce qui lui avait permis de reprendre confiance en elle, dit Parveen, «c’est qu’elle avait fini par se rendre compte que les mentalités étaient différentes dans les autres localités. Les gens étaient plus ouverts. Elle était devenue plus courageuse. Elle avait surtout constaté que, quoi qu’il ait pu lui arriver, sa famille était là pour elle. Nous l’avons accompagnée. Nous avons tout fait pour qu’elle se sente toujours très entourée».

 

Mais en mai 2019, Shania fait à nouveau face à un cauchemar. Elle était sortie acheter des bonbons à la boutique du coin, accompagnée d’une amie, lorsqu’elle a croisé le chemin de son ex-petit ami Djibril qui a menacé de lui faire du mal. D’ailleurs, il l’avait également menacée à plusieurs reprises sur les réseaux sociaux parce qu’elle avait porté plainte. «Elle a voulu se réfugier au parc, en pensant qu’elle y serait en sécurité mais il l’a suivie et a ramené des amis.» Ce jour-là, Shaïna a été tabassée sous le regard impuissant de son amie jusqu’à en perdre connaissance. L’un d’eux se vante même de lui avoir «mis un penalty dans la bouche».

 

La jeune fille est hospitalisée pendant deux semaines mais refuse de s’apitoyer sur son sort. Son père et son frère étaient dans une colère noire, se souvient Parveen. Ils ne voulaient pas rester les bras croisés mais Shaïna leur a tout de même répété : «Nous sommes des gens biens. Nous ne ferons pas comme eux. Nous n’allons pas nous rabaisser à leur niveau.» «Garder en tête ces paroles est ce qui nous permet de tenir le coup aujourd’hui», reconnaît Parveen. Mis en examen pour cette agression, Djibril a, une fois de plus, nié les faits qui lui sont reprochés. Le procès n’a pas encore eu lieu dans cette affaire.

 

Quelques mois plus tard, Shaïna avait fini par trouver la lumière au bout du tunnel. Elle avait réappris à faire confiance aux hommes, sans s’imaginer que quelqu’un d’autre allait en abuser. Au cours de l’été suivant son passage à tabac, elle rencontre Omar, de deux ans son aîné, dont elle tombe amoureuse. Elle avait repris goût à la vie. Deux mois après leur rencontre, soit le 25 octobre 2019, son corps nu et sans vie, partiellement calciné, est découvert dans un cabanon à Creil, alors qu’elle était portée manquante depuis plusieurs jours. Elle avait également été poignardée à trois reprises alors qu’elle était enceinte d’une dizaine de jours. L’autopsie attribue son décès à une asphyxie provoquée par l’inhalation de fumée, ce qui laisse deviner qu’elle a été brûlée vive.

 

Deux individus ayant contacté le commissariat de Creil sous l’anonymat dénoncent Omar comme l’auteur du meurtre. Son mobile : la grossesse non-désirée de la victime. Arrêté, il a enchaîné les explications confuses avant de choisir de garder le silence, même si, auprès de l’un de ses codétenus, il se serait vanté de l’avoir assassinée.

 

Et voilà comment l’existence d’une jeune fille, déjà bien malmenée par la vie, s’est tristement terminée…