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Un présumé pédophile accusé d’avoir abusé de mineures

Sa mère Anièce dit faire désormais tout son possible pour la protéger.

Dans le voisinage de Jocelyn Raymond Augustin, 53 ans, il n’était un secret pour personne que ce dernier abusait sexuellement de mineures de son quartier contre paiement. Il se chuchotait également qu’il prenait ses jeunes victimes en photo dans des poses obscènes. Ces clichés ont été découverts par la police, cette semaine, lors d’une fouille, et l’homme a été arrêté. Ses présumées victimes, elles, tentent de se reconstruire dans des conditions difficiles. À l’instar de celle que nous prénommerons Sarah (prénom fictif), âgée de 8 ans seulement.

Sarah est toute mignonne. Elle a un petit visage bien dessiné et de grands yeux noirs. Vêtue de son uniforme d’école, ses tresses ramenées en arrière, décoiffées après une journée bien remplie, elle a tout d’une petite fille normale. Curieuse, elle pose sans cesse des questions à sa mère, parle de tout et de rien, et s’interroge surtout sur notre présence à son domicile en ce vendredi après-midi. «Ce sont des journalistes. Ils ne te feront pas de mal», lui répond sa mère Anièce (prénom fictif) sur un ton rassurant. «Tu peux leur dire ce que ce monsieur t’a fait ?» Aussitôt la question posée, Sarah se réfugie dans sa chambre avant de revenir quelques minutes plus tard, sa peluche à la main. Assise dans un fauteuil qui a perdu tout son éclat, Sarah libère peu à peu sa parole. Les mots qu’elle prononce, les scènes qu’elle décrit avec une exactitude déconcertante, donnent froid dans le dos et font trembler sa mère Anièce qui ignorait presque tout du lourd secret de Sarah.

«Il m’a fait faire le ménage. Puis, il m’a demandé de me déshabiller. J’ai refusé. Mais il m’a obligée et je n’ai pas pu dire non. Les portes étaient fermées, je n’ai pas pu m’enfuir. Ensuite, il m’a obligée à caresser tout son corps. Je n’ai pas aimé. Et je ne suis plus allée là-bas», raconte Sarah d’une toute petite voix, la tête baissée, avant d’aller de nouveau se réfugier dans sa chambre. Anièce, choquée, était visiblement loin d’imaginer que sa petite fille, âgée de 8 ans seulement et qui n’a même pas encore de poitrine, avait subi des choses aussi horribles. Pas question pour cette mère de cinq autres enfants de pardonner à celui qui a fait du mal à sa petite poupée. Surtout quand elle lit toute la détresse qu’il y a dans les yeux de la fillette, une détresse qui risque de la poursuivre toute sa vie. «Ce pervers doit payer ! Sarah est encore une enfant qui ne connaît rien à la vie. Comment a-t-il pu lui faire des choses pareilles ? C’est un monstre», se révolte Anièce, d’un air dégoûté.

Ce «monstre», c’est Jocelyn Raymond Augustin, un habitant d’une longère à Baie-du-Tombeau, âgé de 53 ans. Le mardi 10 juin, il a été arrêté aux petites heures du matin par la police, à son domicile, suite à des renseignements obtenus sur son compte au fil des derniers mois. Chez lui, les enquêteurs de la CID de Port-Louis Nord ont retrouvé un ordinateur, un téléphone portable et deux tablettes tactiles dont l’une contenait plusieurs photos de jeunes filles complètement dénudées qui n’ont pas plus de 16 ans. Parmi, des clichés de la petite Sarah, que Jocelyn Augustin aurait faits d’elle le même jour où il lui aurait demandé de se déshabiller et de le caresser sur tout le corps. Un scénario qu’il aurait répété avec ses autres jeunes victimes, allant parfois même plus loin jusqu’à coucher avec certaines d’entre elles.

«Elle a été piégée»

Mais comment Sarah s’est-elle retrouvée chez cet individu que son voisinage qualifie désormais de «pervers» et de «malade sexuel» ? Selon Anièce, qui travaille comme bonne à tout faire, c’est parce que sa fille se serait liée d’amitié avec des jeunes filles «peu recommandables» qui l’auraient entraînée dans cet enfer. «Ma fille aînée habite une case en tôle dans une longère située non loin de celle où habite cet homme. Et quand je suis au travail, Sarah va régulièrement rendre visite à sa sœur et c’est là qu’elle a fait la connaissance de ces filles qui lui ont demandé de les accompagner chez Raymond Augustin. Sarah ne savait pas ce qui l’attendait sur place. Elle n’a fait que suivre ses petites camarades. C’est ainsi qu’elle a été piégée», explique Anièce qui, depuis que l’affaire a éclaté, ne laisse plus la petite fille se balader seule dans le quartier.

Mais pour les voisins de cette famille, cela est arrivé car la petite serait parfois livrée à elle-même. «Sa mère a un penchant pour la bouteille. La petite traîne jusqu’à fort tard dans la nuit. Parfois, elle demande à manger aux passants. Elle fait pitié. À un moment, elle n’allait plus à l’école. Mais elle a repris le chemin de l’école récemment», avance des voisines que nous avons interrogées. Une autre ajoute : «CDU (NdlR : Child Development Unit) bizin pran zenfan la !» Ces accusations, Anièce les balaie d’un revers de main. Elle reconnaît que sa fille sort de temps en temps, mais nie qu’elle traîne jusqu’à fort tard. Elle nie également être portée sur la bouteille : «Pa akoz mo miser mo oblize soular !»

Pauvre, la famille de la petite Sarah l’est incontestablement. Derrière cette sombre affaire de pédophilie alléguée, il y a aussi une terrible réalité : une misère noire qui saute aux yeux et prend à la gorge. La maison où vivent Anièce et les siens se constitue en tout et pour tout d’une seule pièce en dur où il n’y a ni électricité, ni eau. «Nou pena ni delo ni kouran depi 4 an. Zis sa lakaz la ki pé protez nou kont lapli ek siklonn, soutient Anièce. La nuit, on s’éclaire avec des bougies. Concernant l’eau, des voisins nous aident. Mon mari vient de décrocher un emploi comme aide-camionneur. Et moi, je travaille deux à trois fois par jour pour environ Rs 300.» Dans cette situation de pauvreté qui touche le quartier entier, les jeunes filles deviennent parfois les proies faciles de pervers. Jocelyn Raymond Augustin en aurait profité.

Quelques voisins du quinquagénaire ne cachent pas qu’ils savaient que des choses louches se déroulaient au domicile de ce dernier. «Les filles venaient chez lui dans l’après-midi. À 17 heures, plusieurs d’entre elles faisaient la queue devant chez lui. Ce sont ces filles qui venaient le solliciter. Quand il n’ouvrait pas la porte, elles lançaient des pierres dessus pour qu’il le fasse. Elles venaient pour avoir de l’argent et de quoi manger. Ce sont des filles qui n’ont pas d’encadrement, qui sont livrées à elles-mêmes. Et elles racontaient ce qu’elles faisaient au domicile de ce type à qui voulait l’entendre», confie une voisine sous le couvert de l’anonymat.

«Lor Facebook»

Justement, qui sont ces filles qui se rendaient au domicile de Jocelyn Raymond Augustin ? Selon les enquêteurs, la plupart d’entre elles habiteraient non loin du présumé pédophile. «Elles viennent presque toutes de la même longère», soutient notre interlocutrice qui nous conduit là-bas. À l’entrée, plusieurs femmes, assises sous un arbre, jouent au domino. Certaines d’entre elles tiennent leurs bébés en bas âge dans les bras. Quand nous leur demandons où habitent les familles des jeunes filles en question, elles éclatent de rire alors que l’une d’elles lance sur un ton moqueur : «Zot touni lor Facebook.» Pourtant, l’affaire n’a rien de comique. L’une des femmes précise que c’est un autre quartier qui est concerné par cette affaire qui éclabousse les environs.

Pourtant, selon la police et d’autres renseignements glanés sur le terrain, il s’agit bien de cette longère. Après une enquête de voisinage, on comprend que ce sont justement les filles de ces femmes qui sont au centre de cette affaire de pédophilie alléguée. D’ailleurs, l’une des jeunes filles que la police a identifiée avait été victime d’un pédophile en octobre 2013. Ce dernier, Sylvio Moura, est actuellement derrière les barreaux.

Mais pour comprendre comment ces jeunes filles issues de familles défavorisées se sont retrouvées dans une telle situation, il faut savoir dans quel environnement elles vivent, comme l’explique Rosie Khedoo, travailleuse sociale de la région : «Elles ne sont pas encadrées. La majorité de ces jeunes filles vivent avec leurs mères, les papas ayant déserté le toit conjugal. Certaines de ces mères ont des comportements à risques devant leurs enfants. Il n’est pas rare qu’une fille me dise que sa mère lui a demandé de dormir à même le sol car elle devait recevoir son amant, voire même plusieurs hommes à la fois. La pauvreté a bon dos alors que le vrai problème vient du comportement des parents», explique la travailleuse sociale (voir hors-texte).

Comportement à risques des parents, alcool, drogue, pauvreté… autant de fléaux qui menacent ce quartier au quotidien. Un quartier où certaines des maisonnettes en tôle entassées les unes sur les autres menacent de s’effondrer à tout moment. Là-bas, il n’y a pas de chemin goudronné, il faut emprunter des chantiers poussiéreux, parfois boueux, se faufiler à travers des labyrinthes où l’on croise souvent des enfants marchant pieds nus et vêtus du strict minimum. Les ordures accumulées ici et là, l’odeur nauséabonde qui s’en dégage donne presque envie de vomir. Des conditions de vie inhumaines auxquelles viennent s’ajouter des drames comme la pédophile que subissent certains enfants. L’affaire qui a éclaté durant la semaine écoulée ne le montre que trop bien.

 


Rosie Khedoo, travailleuse sociale :«Ce qui se passe là-bas dépasse l’imagination !»

Plus de 40 ans à faire du travail social, mais elle ne se lasse pas. Rosie Khedoo continue sa lutte pour la protection des droits des enfants avec la même passion. Et l’affaire de pédophilie alléguée à Baie-du-Tombeau ne la laisse pas insensible. D’ailleurs, le quartier où cela s’est produit n’a aucun secret pour elle. «Ce qui se passe là-bas dépasse l’imagination. Ces gens-là sont pauvres, je ne dis pas le contraire. Mais ce n’est pas la pauvreté qui est responsable de cette affaire de pédophilie. Ce sont les comportements à risques de ces mères célibataires qui élèvent seules leurs adolescentes. Car il y a des familles très pauvres qui vivent là-bas, mais qui éduquent leurs enfants et leur inculquent des valeurs morales», explique Rosie Khedoo.

 

Cette longère est un environnement à risques selon la travailleuse sociale Rosie Khedoo.

Travailleuse sociale acharnée sur le terrain, elle se faufile à travers les labyrinthes des longères pour faire de la sensibilisation. «Mon équipe et moi-même sommes sur le terrain. On inculque des valeurs morales aux mères et aux parents en général. Certains ont la volonté de s’en sortir et ont fait des efforts considérables. D’autres ne lèvent pas le petit doigt et influencent leurs enfants de façon très négative. On peut dire que les filles qui sont mêlées à cette sombre affaire de pédophilie n’ont pas vraiment reçu d’amour. Certaines d’entre elles disent qu’elles ne sont pas bien nourries, d’autres affirment que leurs mères ont des relations sexuelles sous leurs yeux. L’éducation même des parents est à refaire», précise-t-elle. Ajoutés à cela, la cigarette, l’alcool et autres substances ainsi que la prostitution sont des maux qui gangrènent le quartier. «Certaines de ces filles sont scolarisées, mais elles ne vont que très rarement à l’école. Pour se justifier, les parents disent qu’ils n’ont pas de nourriture à donner à leurs enfants pour le déjeuner. J’ai trouvé de l’emploi pour plusieurs d’entre eux. Mais ils refusent de travailler. Certains reçoivent des pensions de l’État et vivent que de cela, en assistés. Ce n’est plus possible. J’ai un message à leur transmettre. Levez-vous, cherchez du travail et menez une vie décente.» Pour Rosie, il n’y a qu’une solution à envisager pour en finir avec ce mode de vie où la promiscuité règne en maître. «Le gouvernement doit reloger ces familles et raser une bonne fois pour toutes ces maisonnettes en tôle.»

 


 Jocelyn Raymond Augustin nie avoir eu des relations avec les mineures

Depuis son arrestation, il n’a cessé de répéter la même chose aux limiers de la Criminal Investigation Division (CID) de Port-Louis Nord. Si le présumé pédophile Jocelyn Raymond Augustin, 53 ans, a avoué avoir pris des clichés à caractère sexuel de plusieurs jeunes filles de sa localité, il nie avoir abusé d’elles sexuellement. Les enquêteurs, menés par le chef inspecteur Hossenbacus, ne sont cependant pas de cet avis. Une enquête est d’ailleurs toujours en cours pour faire la lumière sur cette terrible affaire.

Tout commence il y a quelques mois, lorsque les policiers de cette unité ont eu vent qu’un présumé pervers faisait des photos indécentes de fillettes. L’homme conserverait lesdites photos sur un ordinateur portable. Après six mois d’enquête, les enquêteurs de la CID de Port-Louis Nord font une perquisition au domicile de Jocelyn Raymond Augustin, à Baie-du-Tombeau, aux petites heures du matin, le mardi 10 juin.

Sur place, les policiers saisissent deux tablettes tactiles ainsi qu’un smartphone. C’est le contenu d’une des tablettes qui choque les limiers. L’un de ses fichiers contenait des photos indécentes de plusieurs filles. Selon nos informations, il y avait deux catégories : des photos des filles étrangères adultes et des clichés de fillettes mauriciennes. Un autre fichier contenait des clips pornos étrangers uniquement.  Interrogé, le principal concerné, qui vit seul depuis de nombreuses années après s’être séparé de son épouse, a fait comprendre aux hommes du chef inspecteur Hossenbacus qu’il garde les photos et les clips étrangers pour les regarder car il a régulièrement des pulsions sexuelles. Il déclare aussi aux policiers qu’il garde les photos des fillettes pour son plaisir personnel. Cependant, il nie avoir abusé d’elles sexuellement.

Jocelyn Raymond Augustin a comparu devant le tribunal de Pamplemousses mardi après-midi. Il fait l’objet d’une charge provisoire de child ill-treatment en vertu de la Child Protection Act. Il risque 20 ans de prison s’il est trouvé coupable. La police a objecté à sa remise en liberté sous caution et il a été placé en détention policière. Il a été interrogé à deux autres reprises, mais à chaque fois, il a nié avoir abusé des fillettes.

Selon nos informations, le présumé pervers, qui est père d’une fille de 28 ans, et qui n’a pas de casier judiciaire est musicien dans une secte où il joue du clavier pendant les célébrations et autres rassemblements. C’est au sein de ladite secte qu’il repérait certaines de ses proies. L’une d’elles aurait déjà été victime d’un autre présumé pédophile qui est en détention depuis quelques mois. La police a déjà identifié deux des présumées victimes de Jocelyn Raymond Augustin. Les membres de la CID de Port-Louis Nord font de leur mieux actuellement pour identifier une troisième victime. Affaire à suivre…
 


Enfants maltraités : Où porter plainte ?

Il faut dénoncer tout cas de maltraitance envers les enfants aux autorités concernées en contactant le bureau de l’Ombudsperson for Children sur le 454 3010 ou le 454 3020, ou le ministère de l’Égalité des Genres et de la Protection de l’Enfant sur le 113.