• Étoile d’Espérance : 26 ans d’engagement, de combat et d’espoir
  • Arrêté après l’agression d’un taximan : Iscoty Cledy Malbrook avoue cinq autres cas de vol
  • Golf : un tournoi caritatif au MGC
  • Le groupe PLL : il était une fois un tube nommé… «Maya L’Abeille»
  • Nilesh Mangrabala, 16 ans, septième victime de l’incendie du kanwar à Arsenal - Un rescapé : «Se enn insidan ki pou toultan grave dan nou leker»
  • Hippisme – Ouverture de la grande piste : les Sewdyal font bonne impression
  • Sept kendokas en formation à la Réunion
  • Plusieurs noyades et disparitions en mer : des familles entre chagrin et espoir
  • Mobilisation du 1er Mai : la dernière ligne droite avant le grand rendez-vous
  • Le PMSD secoué : démissions, rumeurs et confusion…

Un «pasteur» arrêté pour attouchements sexuels sur des adeptes : Le douloureux témoignage de deux présumées victimes

L’homme de 66 ans a été arrêté après que trois femmes ont porté plainte contre lui.

Elles ont vécu l’enfer, disent-elles, entre les mains d’un homme qui dirige une secte chrétienne. Après plusieurs années à se murer dans le silence, ces femmes ont décidé de le dénoncer à la police. Le «pasteur» a été arrêté et relâché sous caution et ses présumées victimes espèrent que justice sera rendue. Voilà leur terrible histoire…

Des familles brisées, des adolescences détruites, des vies gâchées… Les séquelles que cet homme, qui se présente comme un pasteur, aurait laissées dans la vie de ses victimes – tant physiques que morales – sont multiples. Ces derniers jours, plusieurs anciennes adeptes d’une secte ont trouvé la force nécessaire pour mettre un terme au calvaire qu’elles ont vécu durant plusieurs années et dénoncer celui qui aurait abusé d’elles sexuellement durant des années.

 

Alors que le «pasteur» en question, un sexagénaire répondant au nom de Rajesh Hosanee et habitant Résidence Barkly, a été arrêté et remis en liberté conditionnelle cette semaine, elles sont plusieurs à avoir accepté de revenir sur ces événements marquants et douloureux de leur vie – période durant laquelle elles ont subi des attouchements de la part de cet homme en qui leurs proches avaient une confiance aveugle. Elles espèrent ainsi encourager d’autres jeunes femmes ayant subi les assauts de ce «pervers» à venir de l’avant pour le dénoncer. Elles sont convaincues qu’il y en a beaucoup d’autres mais qu’elles sont bien trop effrayées pour sortir de leur mutisme.

 

Elsa* fait partie de celles qui ont enfin osé briser le silence. Pendant bien trop longtemps, elle a vécu avec son lourd secret. Mais récemment, elle a appris qu’elle n’était pas la seule à avoir subi le même sort entre les mains de Rajesh Hosanee. Elle a alors finalement trouvé le courage nécessaire, avec l’aide de sa psychologue et 15 ans après son calvaire, de dénoncer l’individu qui aurait ruiné sa jeunesse. Aujourd’hui âgée de 33 ans, Elsa est une jeune femme brisée et solitaire, qui a déjà fait deux AVC à cause du stress. Pour cause, après avoir perdu sa mère alors qu’elle n’était qu’une adolescente, elle a dû couper les ponts avec son père. Le motif derrière ce chamboulement familial : un mouvement chrétien qu’anime le «pasteur» Rajesh Hosanee.

 

Tout a commencé alors qu’elle n’avait que 9 ans. En instance de divorce, son père s’était tourné vers ce qu’il considérait comme une «église chrétienne», non reconnue par l’État, afin que celle-ci lui permette de se remarier. Mais ce groupe de prière était loin de ressembler aux autres car le «pasteur» Rajesh Hosanee imposait des règles bien particulières à ses fidèles en prétendant qu’il s’agissait de celles d’un mouvement américain. Et vu qu’il avait décidé qu’il était hors de question pour le couple de divorcer, ses conseils ont été suivis. Pour des raisons qu’Elsa ignore encore à ce jour, son père était devenu l’un des plus fidèles adeptes de cet «ensorceleur» et c’est la raison pour laquelle il avait incité son épouse et ses deux enfants à se «convertir».  «Notre père voulait que l’on suive à la lettre ce que prêchait cet homme. Nous n’avions pas le droit de fréquenter les membres de notre famille qui n’étaient pas adeptes de cette église parce que le pasteur l’avait ordonné. Et nous ne pouvions pas faire de sorties sans qu’il nous en donne l’autorisation», dit-elle.

 

Calvaire

 

C’est à l’âge de 14 ans, soit quelque temps après le décès de sa mère d’un cancer, que le calvaire d’Elsa a réellement commencé. «Le pasteur estimait que mon frère et moi avions besoin de nous ressourcer après la mort de notre mère et avait insisté pour nous accompagner, avec notre père, à l’hôtel.» Aveuglé par la confiance qu’il avait placée en Rajesh Hosanee, le père d’Elsa n’a donc pas refusé lorsque ce dernier aurait insisté pour discuter seul à seul avec l’adolescente dans la chambre d’hôtel. «Le pasteur m’a dit que d’après la parole de Dieu, mon corps lui appartenait parce qu’il était “le mari de l’église”. Il m’a dit que je devais faire tout ce qu’il me demanderait et que je devrais, entre autres, lui offrir ma virginité.» Elsa n’a pas trop de choix : «Je n’étais qu’une gamine et vu que mon père était sous son emprise, j’ai dû, contre mon gré, accepter qu’il me touche et j’ai été contrainte de lui caresser les parties intimes.»

 

Son calvaire a duré cinq ans, cinq années durant lesquelles elle a dû accepter sans broncher que cet homme envahisse son intimité parce qu’elle pensait que c’était «tolérable» et «normal» selon sa foi chrétienne. C’est finalement à 19 ans, lorsqu’elle s’est confiée à son petit ami d’alors, qu’elle s’est rendu compte qu’elle n’était que la victime d’un «pervers». Elle a alors déserté le toit familial et abandonné l’église, provoquant ainsi la colère de son père, qui l’a, depuis, reniée. Après des années de cauchemar, elle se dit toutefois «soulagée que la vérité ait fini par éclater au grand jour et que d’autres femmes aient trouvé le courage de le dénoncer». Mais elle estime qu’«il aurait mérité une sanction bien plus sévère (voir hors-texte)». Elle lance un appel aux autres victimes de Rajesh Hosanee afin qu’elles contribuent à mettre un terme à ses agissements en le dénonçant.

 

Tout comme l’a fait Meera*, une autre victime du «pasteur» qui a accepté de se confier. Le cas de cette femme de 41 ans est bien particulier car, dans sa famille, elle ne serait pas la seule victime de cet homme. Sa fille Priya, aujourd’hui âgée de 24 ans, aurait subi le même sort. Meera raconte qu’il y a environ 12 ans, elle avait intégré cette «église chrétienne» alors qu’elle traversait une mauvaise passe et ce, sur les conseils de l’époux d’une amie. Son époux et sa fille, qui n’était alors qu’une adolescente, l’avaient suivie et s’étaient «convertis».

 

Durant les cinq premières années, il n’y a eu aucun souci. «Mon époux était toujours avec moi, le pasteur n’avait donc pu me toucher.» Mais un beau jour, lors d’une session de prière, les choses dérapent. «Le pasteur m’a conduite dans une autre salle prétextant qu’il allait faire une imposition des mains sur moi. Il a tenté de m’embrasser et de me caresser mais je l’ai repoussé. Il m’a menacé et m’a demandé de ne rien dire au risque d’avoir des problèmes.»

 

Exaspérée par le comportement abusif du «pasteur», Meera en a donc parlé à l’épouse du prédateur. Mais son initiative n’a pas eu le résultat escompté. «Le pasteur a commencé à lancer des rumeurs sur mon époux et les autres adeptes se sont rangés de son côté. Nous avons donc pris la décision d’abandonner l’église.» L’une des meilleures décisions de sa vie, dit-elle. Surtout qu’elle a appris par la suite que sa fille, qui avait 12 ans à l’époque, avait également subi des attouchements à plusieurs reprises de la part de Rajesh Hosanee.

 

À ce stade de l’enquête, trois femmes ont consigné une plainte contre le «pasteur» au cours de ces dernières semaines afin de dénoncer ses agissements. Mais aux dires de nos interlocutrices, ses victimes seraient beaucoup plus nombreuses. Parmi, certaines auraient choisi de ne pas aller de l’avant afin d’éviter d’être montrées du doigt, d’autres pour éviter les conflits avec leur conjoint, ou encore pour ne pas avoir à revenir sur cette période traumatisante de leur existence. 

 

(*Prénoms fictifs)

 

Elodie Dalloo

 


 

Rajesh Hosanee : «Je laisse à Dieu seul le pouvoir de juger»

 

À Barkly, les voisins ne connaissent pas grand-chose de Rajesh Hosanee, sinon qu’il a exercé comme facteur durant des années et ne se mêle pas vraiment au voisinage. Dans sa cour, deux voitures sont garées et des chiens aux aguets semblent prêts à franchir sur quiconque oserait pénétrer chez lui. Lorsque nous nous présentons chez lui le matin du samedi 20 avril, c’est avec beaucoup d’hésitation qu’il sort pour venir à notre rencontre, suivi de près par sa femme qui semble un peu étourdie.

 

Les cheveux grisonnant, portant un T-shirt bleu et un short à carreaux de la même couleur, il avance vers nous avec méfiance. Comprenant qui nous sommes, notre interlocuteur refuse d’abord de nous faire une quelconque déclaration sur les accusations portées contre lui. «Je refuse de dire quoi que ce soit à ce sujet. J’ai dit ce qu’il fallait à la police et je reste muet vis-à-vis des autres car chacun interprète et dit ce qu’il veut. Je laisse à Dieu seul le pouvoir de juger», nous confie-t-il, en nous faisant comprendre d’un geste de la main de quitter les lieux, toujours sous le regard de sa femme qui semble toujours aussi perdue.

 

Ce grand discret de Barkly et gourou d’une secte qui compte seulement 40 disciples, selon sa version à la police, s’est retrouvé du jour au lendemain sous le feu des projecteurs après la parution d’un article, fin mars, où une ancienne fidèle de la secte le dénonce pour attentat à la pudeur. Suite à cela, le samedi 6 avril, trois autres victimes du gourou sont sorties de leur mutisme et ont porté plainte contre lui, au poste de police de Beau-Bassin, Flic-en-Flac et Coromandel. Elles affirment toutes que durant plusieurs années, elles ont été victimes d’attouchements de la part de celui qui se dit messager de Dieu. Appelé à donner sa version des faits sur cette affaire, le mardi 16 avril, au poste de police de Beau-Bassin, l’accusé a nié en bloc toutes les allégations portées contre lui.

 

Il s’est présenté en compagnie de ses hommes de loi, Mes Akeelesh Caussy, Vassen Payendee et Mahendra Saulick, et a confié, dans sa déposition aux enquêteurs, que c’est un coup monté et que toutes ces allégations ont pour toile de fond une histoire de vengeance. Toujours selon ses dires, son assistant, qui est un ancien policier, souhaite se venger de lui à travers sa fille car suite à une altercation, il aurait été destitué de son rôle en public. Quid des autres allégations ? Rajesh Hosanee souligne dans sa déposition : «J’ai toujours une personne à mes côtés lors des impositions des mains et je ne fais rien de plus. D’ailleurs, je suis un homme religieux et ne touche aucun salaire. Ce sont mes disciples qui contribuent pour la location du bâtiment où j’opère.»

 

Il a comparu devant le tribunal de Rose-Hill, le mardi 16 avril, pour les deux premières plaintes et a dû s’acquitter de deux cautions de Rs 10 000 et signer deux reconnaissances de dette de Rs 25 000. Pour la troisième plainte, Rajesh Hosanee a été arrêté le 15 avril par la police de Flic-en-Flac et a comparu devant le tribunal de Bambous le même jour. Le gourou a payé une caution de Rs 25 000 et signé une reconnaissance de dette de Rs 250 000. Il a aussi été examiné par un médecin légiste le jeudi 18 avril et une date sera bientôt fixée pour un exercice de reconstitution des faits.

 

Valérie Dorasawmy