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Swasti Ramsalia, femme battue, poignarde son compagnon Kisnen Veerabudren : quand une mère de famille passe de victime à accusée de meurtre

La suspecte a participé à un exercice de reconstitution des faits  le mercredi 15 janvier.

Elle a dû faire des allers-retours à l’hôpital, au poste de police et en cour aussi. Selon des proches, Swasti Ramsalia subissait depuis des années les coups de son concubin Kisnen Veerabudren. Puis, un jour, ça a été le drame. Lors d’une énième dispute, le mardi 14 janvier, la jeune femme a poignardé son compagnon. Et aujourd’hui, c’est sur elle que pèse une accusation provisoire de meurtre. L’entourage du couple témoigne… 

Chantage, humiliation, coups, injures… C’était le quotidien de Swasti Ramsalia, 38 ans, d’après ceux qui la côtoyaient. Cela faisait 14 ans qu’elle vivait en couple avec Kisnen Veerabudren, 45 ans, à Vacoas, mais très vite, la joie aurait laissé la place à la violence. Pourtant, malgré les allers-retours à l’hôpital, au poste de police et en cour, suite aux violentes disputes – elle a déclaré avoir déjà bénéficié d’un Police Protection Order pour des violences subies mais que celui-ci n’était pas à jour depuis un moment –, elle voulait croire à ses promesses de changement.

 

Alors, la jeune femme est restée à ses côtés. D’autant plus que le couple a aussi une fille, âgée de 12 ans. Mais le mardi 14 janvier, une énième dispute a viré au drame et Swasti Ramsalia passe aujourd’hui de victime de violence conjugale à accusée de meurtre. La jeune femme a infligé un coup de couteau à son concubin et ce dernier n’a pas survécu. Elle a été arrêtée par les limiers de la Criminal Investigation Division (CID) de Curepipe et plaide la légitime défense.

 

Pourtant, ce n’est pas d’un homme violent dont elle est tombée amoureuse, il y a quatorze ans. «Swasti venait de se séparer de son précédent compagnon, avec qui elle a eu deux fils. L’un d’eux vit aujourd’hui avec une tante à Vacoas et l’autre, avec son père à Pailles», explique un oncle de Swasti Ramsalia.

 

Cette dernière et Kisnen Veerabudren ont alors emménagé dans une maisonnette située au fond  d’une impasse, aux abords de la Ligne-Berthaud, à Vacoas. Swasti Ramsalia pensait alors pouvoir prendre un nouveau départ et tout  recommencer à zéro. «Elle était une gentille fille mais n’a pas eu de chance dans la vie», se désole notre interlocuteur. Très vite, elle s’est rendu compte que son conte de fées   tournait petit à petit au cauchemar.

 

L’homme qui partageait sa vie la rabaissait et la maltraitait constamment, selon les dires des connaissances du couple. D’après elles, Kisnen Veerabudren percevait une pension d’invalidité après avoir perdu l’usage d’un œil et ne travaillait donc que très rarement. Le peu d’argent qu’il gagnait en cumulant des petits boulots, il le dépensait quotidiennement pour s’acheter des boissons alcoolisées mais refusait que son épouse travaille. Il l’avait d’ailleurs contrainte à quitter son emploi dans un supermarché de la localité.

 

Hospitalisée

 

Mais la naissance de leur fille il y a 12 ans a donné un peu d’espoir à Swasti et ses proches. Kisnen finirait peut-être par changer. Mais non. «Même s’il adorait son enfant, sa naissance n’avait entraîné aucun changement en lui», confie tristement Géraldine Lecoquin, la concubine du cousin de Kisnen Veerabudren. Elle habite la même localité que le couple.

 

Notre interlocutrice serait une des rares personnes à qui Swasti Ramsalia se confiait depuis qu’elle s’était installée à Vacoas. «Nous étions proches. Li ti enn fam trankil. Zame li pa finn fer violans avek kikenn. J’étais consciente de tous les problèmes que le couple traversait mais je ne me suis jamais interposée. Swasti a même été hospitalisée à l’hôpital à plusieurs reprises à cause de lui mais je n’aurais jamais imaginé que la situation allait prendre une telle tournure», pleure-t-elle. Car avec les habitants de la localité, Kisnen Veerabudren se montrait toujours respectueux, à en croire Géraldine Lecoquin : «Avek nou, li ti touletan trankil. Il faisait preuve de violence uniquement entre les quatre murs de sa maison.» En effet, «il était toujours très sympathique», ajoute un autre voisin. «Il s’est toujours montré respectueux envers nous. La seule chose que nous aurions pu lui reprocher, c’est de nous avoir toujours emprunté de l’argent sans nous le rendre. Mais nous étions au courant du calvaire qu’il faisait vivre à sa femme.» Un calvaire qui s’est terminé en drame le mardi 14 janvier.

 

Ce jour-là, c’est Swasti Ramsalia, elle-même, qui avait donné l’alerte aux alentours de 16 heures, peu après avoir récupéré leur fille à l’école. Aux enquêteurs de la CID de Curepipe, la trentenaire a expliqué que le ton serait vite monté entre son compagnon et elle parce qu’elle avait regagné leur domicile plus tard que d’habitude. En colère, Kisnen Veerabudren se serait alors emparé d’une planche à découper pour l’agresser sous les yeux de leur enfant.

 

Elle dit n’avoir eu alors aucun autre choix que de se défendre avec un couteau de cuisine en le frappant à l’estomac. «Je n’avais pas l’intention de le tuer, j’ai juste utilisé le couteau pour qu’il se calme.» Mais Kisnen Veerabudren s’est écroulé sur un matelas et a perdu beaucoup de sang. Lorsque la police et les premiers secours sont arrivés sur place, le quadragénaire avait déjà rendu l’âme. Une autopsie pratiquée par les Dr Maxwell Monvoisin et Shaila Prasad Jankee a attribué son décès à une stab wound to the chest. Également témoin de la scène, la fille du couple a donné la même version que sa mère aux enquêteurs. Elle a affirmé que celle-ci était une femme battue. Elle a été confiée à des proches et est actuellement suivie par un psychologue.

 

Au lendemain du drame, vers 11h30, c’est sous forte escorte policière que Swasti Ramsalia est arrivée sur la scène du crime peu après sa comparution en cour de district de Curepipe, sous une accusation provisoire de meurtre. Au bout de l’impasse à la Ligne-Berthaud, Vacoas, se situe la maisonnette dans laquelle le couple a partagé des souvenirs, bons et mauvais, pendant environ quatorze ans.

 

Cependant, l’état des lieux laisse difficilement croire que des personnes y habitaient, il y a à peine quelque temps. Dans la cour de cette demeure dépourvue d’électricité : des meubles cassés, des jouets et divers déchets sont entassés sous un arbre. Selon des voisins, la maison appartiendrait à la mère de Kisnen Veerabudren. «Elle vivait également avec eux mais les disputes incessantes avec son fils l’ont poussée à quitter les lieux. Elle aussi se faisait agresser physiquement. Kisnen lui, réclamait sans arrêt de l’argent pour s’acheter des boissons alcoolisées et il s’énervait lorsqu’elle refusait de lui en donner», raconte un voisin.

 

Elle aurait ainsi eu recours à la justice, avec l’aide de ses autres enfants, afin de demander un ordre d’éviction, soutient le voisinage, de même que Géraldine Lecoquin. Selon un autre habitant de la localité, «la police s’est présentée chez eux à plusieurs reprises mais Kisnen n’a jamais voulu s’en aller. Les propriétaires de la maison avaient donc fait couper l’électricité. Pou bann lokazion spesial, bann vwazin ti pe mem ed zot ek donn zot kouran».

 

Pourtant, dans l’entourage du couple, nombreux sont ceux qui affirment que Kisnen Veerabudren était issu d’une famille aisée et avait tout pour réussir. Mais malgré l’aide de sa famille, il est tombé dans le fléau de la drogue et a rencontré beaucoup d’ennuis avec la justice. Il était notamment fiché à la police comme récidiviste et avait été arrêté plus d’une dizaine de fois pour des affaires de drogue, d’agression ou de vol. Sollicitée, sa famille n’a pas souhaité faire de commentaire. Elle a organisé les funérailles de Kisnen Veerabudren le mercredi 15 janvier.

 

Quant à Swasti Ramsalia, elle se retrouve aujourd’hui sur le banc des accusés pour le meurtre de son compagnon après avoir subi les coups de ce dernier pendant des années.

 


 

Marie-Noëlle Elissac-Foy, porte-parole de Stop Violans Kont Fam : «La femme doit être reconnue dans son statut de victime»

 

Bien souvent, lorsqu’une femme est appréhendée pour le meurtre de son époux, elle est reconnue uniquement en tant qu’accusée et non en tant que victime par les médias et les autorités lorsqu’elle a agi en légitime défense. Pour Marie-Noëlle Elissac-Foy, porte-parole de la plateforme Stop Violans Kont Fam, il serait impératif pour les services de police de rassembler tous les éléments de l’enquête avant de porter un jugement. «Le passé de l’accusée doit être pris en considération pour que la femme soit reconnue dans son statut de victime. Il faut tenir compte de sa souffrance.»

 

Elle estime qu’il y a un dysfonctionnement au niveau de l’application des lois puisqu’il n’y a aucun suivi au niveau des autorités. «Dans le cas de Swasti Ramsalia, elle n’avait pas pu faire renouveler son Protection Order. La police aurait dû mettre en place un processus de suivi et de monitoring pour veiller à ce qu’elle ne soit pas en danger. Ne l’aurait-elle pas renouvelé parce qu’elle subissait des pressions ? Avait-elle peur ? Il ne faut pas oublier que si elle l’avait réclamé dès le départ, c’est parce qu’elle lançait un appel au secours.» C’est dans cette optique qu’elle compte sur la mise sur pied d’une unité de la police qui traiterait uniquement des cas de violence conjugale.

 


 

Baisse du nombre de meurtres en 2019 comparé à 2018

 

Le meurtre de Kisnen Veerabudren est le deuxième survenu depuis le début de l’année. L’année dernière, une vague de meurtres s’est abattue sur l’île avec 25 personnes tuées. Ces chiffres sont inférieurs à ceux de 2018, où on dénombrait 33 meurtres.