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Support. Don’t Punish : un combat, une campagne, des revendications

Cette année encore, le Collectif Urgence Toxida et AILES unissent leurs forces pour marquer la campagne internationale Support. Don’t Punish. À cette occasion, ils ont lancé une pétition pour réclamer un vrai changement au niveau des politiques des drogues. 

La date est symbolique et importante. Le combat à mener l’est encore plus. Comme chaque année, le Collectif Urgence Toxida (CUT) et AILES (Aide. Infos. Liberté. Espoir. Solidarité) ont tenu à démontrer leur engagement envers ceux qui utilisent des drogues, à l’occasion de la campagne globale Support. Don’t Punish, lancée en 2013 et observée dans une centaine de pays à travers le monde hier, samedi 26 juin. Cette date marque aussi la journée internationale contre l’abus et le trafic illicite de drogues. Pour ces deux associations qui militent pour la réduction des risques et la protection des droits humains, ces personnes doivent être soutenues et accompagnées par rapport à leurs addictions, et non punies et marginalisées. À travers cette campagne, elles espèrent ainsi éveiller les consciences afin d’obtenir des changements politiques pour éliminer les lois jugées répressives et qui criminalisent les personnes qui utilisent des drogues.

 

Ainsi, pour marquer cette journée, CUT et AILES ont souhaité faire passer un message fort avec la mise en place d’une prison fictive à Mangalkhan, devant les locaux de l’association AILES. Cette année encore, la campagne accorde une importance particulière aux femmes qui utilisent les drogues. Des ateliers et des jeux ont été organisés afin d’expliquer l’importance des changements demandés et le public a pu entendre des histoires personnelles démontrant les difficultés que rencontrent notamment les femmes utilisatrices de drogues. «C’est symbolique de placer une prison fictive devant nos locaux, un endroit où la population est emprisonnée, malgré elle, par les politiques répressives en matière de drogues. Il faut revoir le système et implémenter des changements profonds pour que la réduction des risques soit comprise. Cela fait plusieurs années que nous expliquons la problématique. Cette année, nous passons à l’action avec une pétition», explique Brigitte Michel, manager chez AILES.

 

Cette pétition repose sur plusieurs revendications. Parmi, la décriminalisation de l’utilisation des drogues et de la sollicitation pour les travailleuses du sexe, un meilleur accès au traitement de substitution à la méthadone et la mise en place des home doses, l’obtention d’allocation de ressources et de financements à long terme aux services et réseaux de réduction des risques qui sont dirigés par des femmes utilisatrices de drogues. Ce document inclut aussi d’autres points comme la création de services de réduction des risques complets et sensibles au genre, la mise en œuvre de mécanismes de prévention de la violence et de soutien aux femmes qui utilisent des drogues et qui sont victimes de violences physiques, émotionnelles, psychologiques et économiques.

 

Pour Shatyam Issur, manager de CUT, la pétition est nécessaire afin de faire passer le message. «Pour soutenir notre mission de réduction des risques, nous revendiquons que l’utilisation des drogues soit reconnue comme une addiction et donc un problème de santé publique. Que le traitement de substitution à la méthadone soit dispensé dans un lieu médical, hôpital ou dispensaire et non au poste de police. Finalement, il est important de demander la révision du certificat de caractère pour les condamnations liées à l’utilisation des drogues. La pétition sera aussi en ligne à partir de ce samedi, nous invitons la population générale, les partenaires et chaque personne concernée par cette problématique à signer pour soutenir et non punir. Elle sera par la suite envoyée aux différents ministères.»

 

Aujourd’hui, plus que jamais, la répression n’est pas la solution. C’est le message que veulent faire passer CUT et AILES à travers leur plaidoyer. Le temps est au changement, principalement après le confinement qui a mis en lumière les limites de la prise en charge des personnes souffrant d’addictions, particulièrement au niveau des sites de distribution de la méthadone. Face à cette lutte qui doit être menée de front, CUT et AILES lancent un appel aux Mauriciens pour qu’ils les rejoignent dans ce combat. Et ça commence, disent-ils, avec la pétition qui est disponible en ligne sur Avaaz.org.

 

Rachel, 45 ans : «J’ai perdu deux enfants et mon mari à cause de leurs addictions»

 

«L’addiction, c’est comme une maladie et un malade a besoin de soutien dans sa famille et son environnement. J’ai perdu deux enfants et mon mari à cause de leurs addictions. Un de mes fils est décédé il y a 11 mois, alors qu’il était incarcéré pour possession d’une seringue utilisée. Il vivait avec le VIH et lorsqu’il est arrivé en prison, son traitement n’a pas été suivi correctement. La maladie a gagné du terrain à cause du manque de soins en prison. Il n’y a pas de continuité de soins adéquate en prison. C’est l’hôpital qui m’a prévenue de son état et que la situation était grave, mais quand j’y suis arrivée, c’était trop tard. J’ai aussi une fille qui lutte encore pour s’en sortir.

 

L’année dernière, pendant le confinement, la Child Development Unit (CDU) lui a retiré sa fille après que ses voisins ont porté plainte à cause de son addiction. Ce jour-là, un van de police a débarqué chez ma fille avec six policiers pour emmener le bébé. Du jour au lendemain, on lui a retiré son rayon de soleil. Quoi de plus dur pour une maman que de se voir prendre son enfant ! Cela fait un an que nous sommes sans aucune nouvelle de ma petite-fille, je ne sais pas où elle est, ni si elle est en bonne santé. Nous aimerions avoir de l’aide pour obtenir au moins un droit de visite et qu’on ne perde pas définitivement le contact avec elle, surtout que nous avons les ressources pour prendre soin d’elle.

 

Voilà pourquoi la journée Soutenir. Pas punir est importante parce qu’au lieu d’aider ma fille et mon fils, on les a punis. Mon fils est mort à cause du manque de soins dans la prison et ma fille est privée de son enfant parce que des gens l’ont jugée. J’aimerais donner du courage à toutes les mamans qui sont dans ma situation pour qu’elles puissent soutenir leurs enfants, il ne faut pas les rejeter. Je pense aussi qu’il est temps d’arrêter de pointer les gens du doigt, ce sont nos enfants qui souffrent. Surtout, la loi devrait être plus sévère pour les trafiquants qui font leur business sur le dos de nos enfants.»