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Scandales sexuels à Rodrigues : réactions de femmes engagées

L’actualité dans le 10e district est marquée depuis plusieurs semaines par une affaire de pédopornographie impliquant plusieurs mineures et celle d’un pasteur de l’Assemblée de Dieu, accusé de viol par deux adolescentes. Ces deux enquêtes policières ne laissent pas insensibles des femmes engagées à Rodrigues. 

Choquées. Des femmes engagées dans le social ou encore sur le plan politique le sont. Deux scandales sexuels éclaboussent Rodrigues en ce moment et la police a déjà procédé à sept arrestations. Parmi, six suspects sont en détention pour une affaire de pédopornographie. Ils font l’objet d’une charge provisoire de «causing child to be sexually abused», «rape», «sodomy» et «dealing with obscene matters». Le septième suspect est, lui, un pasteur de l’Assemblée de Dieu, accusé de viol par deux adolescentes. Le 24 août, l’une d’elles, âgée de 17 ans, a fait une déposition à la police. Le pasteur a alors été arrêté et placé en détention. Le 26 août, une autre jeune fille, elle âgée de 18 ans, l’a dénoncé pour agression sexuelle.

 

Pour Anne Murielle Ravina, Miss Rodrigues 2020, ces scandales affectent l’image de son île natale. «C'est une situation qui bouleverse tous les Rodriguais, surtout les femmes», souligne celle qui est également la Miss Univers Maurice 2021 et la fondatrice de HERS Rodrigues, une ONG qui milite pour le respect des droits de la femme. «Il faut trouver des moyens pour aider les victimes. Il faut surtout cesser cette culture de victimisation.» Selon elle, la solution ultime est la sensibilisation : «La meilleure façon d’apporter un vrai changement est la sensibilisation, l’éducation et la formation des citoyens. Je salue l’effort des ONG qui se sont réunies afin d’apporter cette solution.»

 

Stivelle Castel, secrétaire de HERS Rodrigues, est du même avis. «Nous sommes tous sous le choc. Il y a un grand travail d’éducation à faire. Il faut expliquer ce qu’est le viol. Aussi, il ne faut jamais blâmer les victimes. Le prédateur sexuel est le seul responsable de ses actes. En colère et indignés par ces scandales sexuels, nous sommes unanimes à le dire : il faut une prise de conscience pour situer les responsabilités. L’image de l’île a pris un coup. Cela ne doit pas se répéter.»

 

Son assistante, Anne Louise Edouard, avance, elle, que ces deux affaires de mœurs ont poussé les Rodriguais à sortir de leur bulle. Des parents, dit-elle, vivent désormais dans la peur et la méfiance. D’autres ont rebondi en invitant d’éventuelles victimes à dénoncer leur/s bourreau/x. «Nous pensions que l’île Rodrigues était trop petite pour cacher de telles atrocités. Ces abus sexuels nous ont poussés à réfléchir à la société dans laquelle nous vivons. La sérénité dans laquelle vivaient les Rodriguais s’est envolée. Les associations travaillent ensemble pour éviter des cas similaires. Notre priorité est l’éducation de nos enfants, la relation entre les jeunes et les parents, et à qui on doit faire confiance», explique Anne Louise Edouard.

 

L’éducation des enfants est aussi le cheval de bataille de Rogina Jean-Louis, responsable de l’Action catholique des enfants qui œuvre pour le respect des droits et la dignité des enfants dans l’île. L’organisme, qui comprend 40 groupes à Rodrigues, a déjà émis un communiqué à ses membres après avoir pris note de ces deux scandales sexuels. «Nous avons toujours été des défenseurs des droits des enfants. Nous allons poursuivre notre formation de base sur la prise de conscience. Nous avions déjà organisé un séminaire en 2019 pour permettre aux enfants de connaître leurs droits. Nous allons bientôt en organiser un autre au Youth Centre de Baladirou pour 80 enfants âgés entre 9 et 12 ans. L’éducation de nos membres et la vigilance quant à l’utilisation du portable et d’Internet sont importantes», martèle celle qui, comme d’autres, ne compte pas baisser les bras face à ces scandales qui éclaboussent Rodrigues.

 


 

Franchette Gaspard Pierre-Louis : «Le problème de la pédopornographie est étroitement lié à l’Internet»

 

En tant que Commissaire des enfants, de la famille, des femmes et de l’ICT à l’Assemblée régionale de Rodrigues, que pensez-vous des scandales sexuels qui secouent votre île actuellement ?

 

Cela a été un choc pour moi. En tant que commissaire, en tant que Rodriguaise et en tant que femme, et en tant que maman de deux ados. Le plus choquant, c’est d’apprendre que des enfants en bas âge sont impliqués et que les coupables embobinent les victimes via des menaces, du chantage ou en se faisant passer pour des voyants. Ces scandales ont eu l’effet d’une bombe.

 

Qu’est-ce qui pourrait expliquer les cas de pédopornographie, de viol et de grossesse précoce dans l’île ?

 

La grossesse précoce est un sujet préoccupant depuis plusieurs années, contrairement au problème de pédopornographie qui est assez récent et étroitement lié à l’Internet. Je l’ai dit maintes fois : devenir maman ne doit pas être la priorité d’une jeune fille en âge d’être scolarisée. De janvier à juin 2021, il y a eu 69 cas de grossesse précoce, dont 46 concernent des filles âgées entre 18 et 19 ans. L’année dernière, il y a eu 79 cas pour cette même tranche d’âge, sur un total de 137 cas. L’Assemblée régionale accentue ses efforts pour lutter contre ce fléau. Chaque cas est un cas de trop. Des filles de 12 et 13 ans sont aussi concernées. Nous devons employer tous nos efforts pour épargner à nos enfants des fléaux comme la pédopornographie.

 

Quelles actions comptent prendre les autorités rodriguaises ?

 

Nous travaillons en étroite collaboration avec la Commission de la jeunesse pour affiner nos outils et développer des actions nouvelles afin de mieux éduquer les parents et les jeunes sur l’importance d’une parentalité responsable et sur l’Éducation sexuelle complète (ESC). Chaque année, nous investissons beaucoup d’énergie dans des projets à vocation préventives. Nous collaborons avec des ONG et évaluons régulièrement nos actions. Les projets concrets comme l’ESC pour les enseignants et les parents d’enfants du pré-primaire ont déjà démarré et seront bientôt étendus au primaire et au secondaire. Le projet «Carrefour des Parents», financé par l’Assemblée régionale de Rodrigues, est implémenté par le Rodrigues Council of Social Services dans les villages en vue d’empower les parents dans leur rôle. Nous comptons aussi sur l’intervention des Peer Educators dans les centres de jeunesse, de formation et les collèges. Il y a aussi l’apport des ONG comme l’Action familiale, les formations pour des filles sur le Child Grooming, entre autres. Ma commission a également lancé le projet Permis Internet pour les Enfants rodriguais en juin 2021 en vue de sensibiliser et responsabiliser les jeunes et les adultes sur une utilisation sûre et sécurisée d’Internet.