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Propos d’Anil Gayan : le «koze de tro» embarrasse

Dépositions à la police, pétition, demandes de démission, le ministre du Tourisme est vite revenu sur terre après son voyage à Cannes et doit craindre, désormais, le redouté karo kann.

Enn ti kriz. Et pour changer, il ne s’agit pas d’une histoire de mari. Mais plutôt d’un mari politisien qui aurait eu des propos polémiques concernant la communauté musulmane (voir hors-texte). Si le principal concerné crie au complot politique, au montage odieux, à la propagande calomnieuse, reste que la vidéo qui circule a provoqué une vague de colère sur les réseaux sociaux et au sein de l’opposition qui demande à Anil Gayan de step down pour les mots qu’il aurait prononcés il y a trois ans (oui, elle daterait de 2016 cette vidéo).

 

Une pétition en ce sens a été créée sur change.org. Deux plaintes ont été enregistrées contre le ministre pour incitation à la haine raciale. Parmi, celle d’un habitant de Terre-Rouge, qui ne souhaite pas dévoiler son identité. Pour lui, il était impossible de se taire face aux propos qu’il a entendus.

 

Et cela, même si la vidéo date : «Moi, je ne la vois que maintenant. Je n’en ai rien à faire des politiciens, moi. Me kouma sa boug-la inn dir sa, monn trouve bizin aret li. Pa posib sa.» Sa motivation est celle de sa foi, bien sûr : «J’ai réagi ainsi parce que je suis musulman.» Mais aussi, dit-il, pour l’amour de son pays : «Il peut parler ainsi d’une autre communauté. Cette fois-ci, il n’y a pas eu de dérapage. Mais s’il sévit encore, on ne sait pas ce qui peut se passer. Dans ce pays, il y a toutes les communautés et chacune a droit au respect.» Sa voix, dit cet homme, est un appel à la modération des politiciens. À la dignité dans leurs actions et leurs mots : «Li bizin less sa kalite koze-là a enn klosar kot bazar. Un ministre doit mesurer ses propos.» Il se rappelle, dit-il, que lorsque Showkutally Soodhun avait «dir bann zafer pa bon lor katolik», il avait dû démissionner en tant que ministre : «Mo enn mizilma, mo pa ti kontan seki li ti dir. Mais ça doit être la même chose pour Gayan : il doit démissionner.»

 

Au sein du gouvernement, cette affaire embarrasse. Mais chut, il ne faut pas le dire : «C’est le koze de tro. Le mieux, franchement, c’est de ne pas en parler et d’attendre que ça passe», confie un proche de Pravind Jugnauth. Au ML, on joue à l’autruche. Après les dérapages allégués de Ravi Rutnah (dans une bande sonore, il aurait parlé des «vie kouyon» du gouvernement), c’est impossible d’en gérer plus. Alors, Anil Gayan doit aller seul au front ; même le soutien indéfectible d’Ivan Collendavelloo (surtout dans l’affaire Vijaya Sumputh) commence à vaciller. «Mais la flamme va reprendre. Pas de doute. Entre ces deux-là, il y a une complicité qu’on ne comprend pas forcément. Ça relève du mystère», confie un membre du Muvman Liberater, plus proche de Ravi Rutnah que de ses aînés. Pour lui, il fut un temps où ce type de déclaration était acceptée et même tolérée dans certains milieux. Mais avec les réseaux sociaux, les choses ont changé : «Face à un certain auditoire, il y a un certain discours. Mais ce temps est révolu. Il faudrait que nos politiciens d’expérience s’en rappellent.»

 

Pour notre interlocuteur, ça fait un moment déjà qu’Anil Gayan a perdu sa crédibilité. Reste qu’après l’épisode Rutnah, les chances du ML de s’offrir encore une alliance victorieuse s’amenuisent : «Faut attendre de voir», dit-il, en pensant certainement à ses options de carrière future sur la scène politique. Le MSM serait un prochain chapitre de choix. Surtout que le parti surfe, cette semaine, sur le feel-good factor de la consécration mauricienne concernant la question de souveraineté sur les Chagos. Un budget labous dou, prévu pour le 10 juin, devrait apporter un peu plus de lakrem sokola à cette popularité que le parti essaie de construire en vue des prochaines législatives. Les inaugurations, les balad dan vilaz et autres recrutements massifs devraient aider…

 

Néanmoins, le ML est plus enn pikan dans le pied qu’autre chose ces derniers temps. Mais au MSM, on relativise : «Pour ce que vaut ce parti, ce n’est pas aussi damaging que ça. Donc, c’est inutile de prendre une quelconque action. Laissons, pour l’instant, perdurer l’image de la stabilité au sein du gouvernement», confie un membre du MSM, qui avoue avoir, lui aussi, entendu une rumeur persistante et dérangeante. Celle qui laisse entendre que la vidéo aurait été publiée par un membre du MSM, en vue de fragiliser la position du ML et laisser le champ libre à une alliance différente : «Je n’y crois pas. Il y a des explications plus plausibles quand même. Et c’est vers celles-là qu’il faudrait se tourner.» Il rappelle l’étrange coïncidence : l’expulsion de Shakeel Mohamed au Parlement après une prise de bouche avec Anil Gayan. Le chef de file du PTr, lui, a été catégorique, cette semaine, il n’était pas au courant de l’existence de cette vidéo précédemment. C’est ce qu’il a confié à l’express : «Je faisais référence à ce qu’Anil Gayan a dit sur le Pakistan au Parlement. Selon moi, c’est un récidiviste qui a attaqué des pays amis à plusieurs reprises. Il l’a fait pour le Maroc et le Pakistan, et cette vidéo vient soutenir mes propos.»

 

Qui a fait surgir cette vidéo de ses archives personnelles ? La question reste entière. Mais elle n’est pas anodine dans une année pré-électorale. De quoi provoquer enn ti kriz pour Anil Gayan.

 


 

Ce qu’il aurait dit…

 

En 2016, il aurait déclaré que «dan lakominite mizilmann, ena honour killing. (…) Nou pa bizin sa kalite barbari la.» C’est, du moins, ce qui ressort de la vidéo qui a fait le buzz cette semaine sur les réseaux sociaux.

 

En 2019, le ministre du Tourisme a réagi face à ces images et a donné sa version des faits. Selon lui, il s’agit d’un «montage vidéo». De plus, ses propos ont été pris «hors-contexte».