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Le nouveau cabinet ministériel à la loupe - Kris Valaydon, observateur politique : «Le chantier est vaste pour le nouveau gouvernement...»

Ça y est, c'est fait ! Les visages des membres du nouveau  cabinet ministériel de l’Alliance du Changement, chapeauté par Navin Ramgoolam, ont été dévoilé ce vendredi 22 novembre. Celui-ci se compose de 24 ministres : 14 pour le Parti travailliste (PTr), plus l’Attorney General, huit pour le Mouvement militant mauricien (MMM), un pour les Nouveaux Démocrates (ND) et un pour Rezistans ek Alternativ (ReA). Dix Junior Ministers ont aussi été nommés pour prêter main-forte à certains ministres. Kris Valaydon, juriste et observateur politique, nous donne son avis sur la composition du nouveau cabinet ministériel et sur les enjeux qui attendent cette nouvelle équipe. 

Que pensez-vous de la composition du nouveau cabinet ministériel de Navin Ramgoolam ?

 

C’est une bouffée d’air frais dans le paysage politique mauricien, après les dix ans d’existence d’un écosystème politique suffocant, généré par  une domination extrême de l’exécutif sur la vie publique d’un gouvernement qui refusait d’adhérer au principe d’accountability, qui prônait l’opacité dans la gestion des affaires publiques. On a aujourd’hui une nouvelle équipe à qui le peuple fait confiance, un cabinet qui représente l’espoir d’un changement dans le rapport entre le gouvernement et le citoyen. 

 

Ce que l’on doit savoir, c’est qu’il y a plusieurs facteurs dont il faut tenir compte dans la composition d’un gouvernement. Le choix des personnes qui occupent les postes ministériels dépend de plusieurs facteurs. Premièrement, il y a une répartition en termes du nombre de députés qui feront partie du Conseil des ministres, selon leur appartenance partisane. Ainsi, comme on le voit, les partenaires ont décidé de 14 ministres pour le PTr, huit pour le MMM,  un pour les ND et un pour ReA respectivement. Le choix des Junior Ministers vient, par la suite, régler les difficultés rencontrées dans la finalisation de la liste des ministres et rétablir un peu l’équilibre si la finalisation de la liste des ministres a causé quelques frustrations chez les députés. Ensuite, chaque parti établit une liste selon la hiérarchie de ceux qui occuperont les divers ministères. Et enfin, les négociations ont lieu sur les portefeuilles que détiendront les personnes choisies par les partis politiques. L’accord sur la hiérarchie au niveau du Conseil des ministres est aussi sujet aux discussions entre les deux principaux partenaires de l’Alliance du Changement et cela peut se faire au début même des négociations entre partenaires de l’alliance. Il n’y a pas de nouveauté dans les critères qui sont utilisés pour désigner les ministres. Donc, c’est au niveau des personnes nommées qu’il y a eu du changement ; c’est pourquoi on accueille cet équilibre entre les anciens et du nouveau sang. Il ne faut pas s’attendre à ce qu’il n’y ait pas vraiment une adhésion populaire, un consentement populaire, au choix qui a été fait. Évidemment, il y aura des mécontents, des attentes non satisfaites, mais il faut se dire qu’il n’y a que 24 postes de ministres en sus du Premier ministre qui est prévu par  la section 59 (2) de la Constitution et qu’il est nécessaire de faire un choix. Dans la liste, il y a 15 nouveaux postes de ministres. Il y a un mix plus ou moins équilibré entre les nouveaux, qui sont majoritaires, ceux qui tiennent pour la première fois un portefeuille ministériel, d’une part, et un certain nombre d’anciens qui ont de l’expérience au gouvernement. On aurait souhaité voir plus de femmes ministres. La liste des Junior Ministers comprend des nouveaux, ceux qui vont faire partie de l’exécutif pour la première fois, et cette liste démontre aussi que le choix qui a été fait est basé sur la compétence.

 

Quelles devraient être, selon vous, les priorités du nouveau gouvernement ?

 

Le gouvernement a comme priorité de relancer la machine gouvernementale qui était au point mort depuis quelque temps, et même avant les élections générales. Il y a beaucoup d’urgences à régler dans l'administration publique, des dossiers laissés en suspens dans divers ministères, des services qui ont roulé au ralenti ou sans direction politique, au sens policy du terme. Des institutions et des entités relevant des divers ministères méritent une attention urgente de la part des nouveaux ministres, de sorte qu’elles puissent commencer à fonctionner efficacement. Mais avant tout, il y a peut-être des urgences au niveau de l’économie sur les engagements pris pour payer le 14e mois, la baisse des prix des carburants, les augmentations de pension et d’autres promesses électorales qui ont créé des attentes dans la population. On a déjà entendu le nouveau gouverneur de la Banque de Maurice parler de mesures au niveau de la Banque centrale, et qu’il va s’attaquer à la dépréciation de la roupie et prendre les mesures nécessaires pour que cesse la chute de notre monnaie. Le chantier est vaste, mais le gouvernement, largement plébiscité, doit se sentir encouragé pour faire sortir l’île Maurice de la spirale inflationniste dans laquelle notre pays est entraîné. Il y a aussi l’attente dans la population de mesures et d’actions à prendre par le nouveau gouvernement à la suite des scandales à la SBM et à Air Mauritius, les transactions louches, les enrichissements sans cause et les fortunes accumulées par des politiciens de l’ancien régime, entre autres, et sur lesquels beaucoup d’informations circulent ces jours-ci sur les réseaux sociaux et sur WhatsApp. Le citoyen attend que l’ancien gouvernement rende des comptes…