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Imteaz Rujab mortellement agressé en allant défendre sa cousine : Farzanah Bhukoo, au centre du drame, raconte l’horreur

Les parents d’Imteaz Rujab sont anéantis.

Il espérait qu’une simple discussion avec l’époux de sa cousine Farzanah aurait suffi à le calmer. Mais Imteaz Rujab, 36 ans, a eu tort. En tentant de prendre la défense de la jeune femme, il a été poignardé à l’abdomen et a rendu l’âme aux soins intensifs de l’hôpital de Flacq, le lendemain. Bouleversée, la cousine en question revient sur les circonstances du drame…

D’horribles images la hantent. Le chagrin, les regrets et la culpabilité la rongent. Car c’est en tentant de lui venir en aide que son cousin a perdu la vie. Farzanah Bhukoo, 33 ans, n’arrête pas de repenser à ce moment où la situation déjà très difficile dans laquelle elle vivait a basculé dans l’horreur. Elle revoie en boucle son époux Sayed Mohammad Asraf Bhokoo, 39 ans, assenant à Imteaz Rujab un coup de couteau à l’abdomen et son cousin adoré se tordant de douleur tout en se vidant de son sang. Le jeune homme de 36 ans n’a pas survécu à ses blessures. Il est décédé le lendemain, à l’Intensive Care Unit de l’hôpital de Flacq.

 

Depuis, les rires se sont tus chez lui, à La Paix, Piton. Ses proches n’ont eu d’autre choix que de lui dire adieu tout en laissant éclater leur douleur et leur colère de le voir partir si jeune et dans des circonstances si tragiques. Lui qui était, selon eux, un bon vivant, un garçon souriant, jovial et plein de vie et sans histoire. Leurs souvenirs de lui seront certes toujours remplis de ses rires, de sa bonne humeur, de sa gentillesse, mais ils garderont gravée dans leur mémoire cette dernière et triste image qu’ils ont eu de lui : celle de son corps sans vie, gisant dans son cercueil avant d’être conduit à sa dernière demeure après la cérémonie funéraire.

 

Farzanah, elle, portera sans doute pendant longtemps encore sur ses épaules le poids de ce drame qui est arrivé alors que son cousin était venu la secourir des griffes de son mari, à leur domicile à Providence. La jeune femme avait déjà, dans le passé, subi les foudres de celui avec qui elle est mariée depuis 14 ans et qui est le père de son fils de 13 ans et de sa fille de 5 ans. «Cela lui arrivait de me donner des coups. Il était jaloux et colérique. La première fois qu’il m’a battue, je n’ai rien confié à qui que ce soit. La deuxième fois, en avril, j’ai alerté les membres de ma famille qui avaient discuté avec lui afin de régler les choses. Mais cette fois, la dispute a viré au drame.»

 

En ce jeudi 6 décembre fatidique, une première dispute a éclaté entre son époux et elle dans le courant de la journée. Farzanah raconte qu’elle a appelé son époux pour l’informer qu’elle comptait se rendre à une séance de prière, le lendemain, avec ses proches. «Il a refusé et ne voulait pas que j’y aille. Depuis que j’avais confié à mon entourage qu’il m’avait frappée, il n’aimait pas que je leur rende visite.» Comme la discussion s’envenimait, elle a «fini par lui raccrocher au nez».

 

«Il hurlait de douleur»

 

Lorsque Asraf Bhukoo, conducteur d’autobus, est rentré du travail dans la soirée, une dispute a éclaté à nouveau lorsque son épouse lui a demandé s’il avait caché ses boucles d’oreilles. «Je pensais qu’il les avait dissimulées parce qu’il ne voulait que je me rende à la séance de prière. Et cela l’a mis hors de lui et il m’a tabassée. Ses parents sont intervenus et m’ont également frappée. Je leur ai dit que j’allais en faire part à ma famille.» Elle s’est saisi de son cellulaire pour appeler son frère Fardeen Rujab, 24 ans, qui est arrivé sur place peu de temps après, en compagnie de trois cousins, dont Imteaz Rujab, pour l’emmener avec eux. Entre-temps, Asraf Bhukoo et ses parents avaient contacté la police de Quartier-Militaire pour leur dire qu’elle quittait le toit conjugal.

 

Fardeen Rujab et Imteaz Rujab sont alors entrés dans la maison dans l’espoir de raisonner le mari violent de leur sœur et cousine. «Ils voulaient seulement calmer les choses. Ils pensaient qu’en discutant avec Asraf, ils parviendraient à le calmer. Mais les choses ont dégénéré.» Asraf Bhukoo se serait emparé d’un couteau de cuisine pendant que ses parents et les deux jeunes hommes se disputaient. «Mon beau-père s’est emparé d’une chaise et l’a balancée sur eux. Et au même moment, Asraf les a agressés. Mon frère a été blessé au bras et mon cousin a été atteint à l’abdomen. Il hurlait de douleur.»

 

Lorsque les policiers de Quartier-Militaire sont arrivés sur les lieux, ils ont immédiatement conduit les deux hommes à l’hôpital de Flacq pour des soins.  En route, Imteaz Rujab a perdu connaissance. Il a subi une intervention chirurgicale le soir même avant de sombrer dans le coma duquel il ne se relèvera pas. Il est décédé le lendemain après-midi et a été inhumé dans la soirée à 22 heures.

 

Populaire dans sa localité, Imteaz Rujab, qui vivait séparé de son épouse, avait la réputation d’avoir le cœur sur la main. Il rendait service à tous ceux qui le sollicitaient à chaque fois qu’il le pouvait. Il gagnait sa vie en travaillant comme jardinier dans le secteur public et comme peintre à temps partiel. Les ennuis, il les évitait autant que possible, suivant scrupuleusement les conseils de son père Samsoodeen, qui ne souhaitait pas le voir perdre son travail. «Je l’avais prévenu ce jour-là. Je lui avais demandé de ne pas interférer dans cette dispute pour ne pas avoir de problèmes avec la police mais il souhaitait à tout prix venir en aide à sa cousine. Il voulait seulement discuter avec Asraf et ramener Farzanah à la maison», confie Samsoodeen, les larmes aux yeux.

 

La mère d’Imteaz Rujab, trop bouleversée par la mort de son fils bien-aimé, n’a pas été en mesure de témoigner. Le départ du jeune homme afflige aussi terriblement sa sœur aînée. Et dire que toute la famille se préparait à vivre des moments joyeux ensemble en janvier prochain. Ils avaient tous prévu de se rendre à Rodrigues à l’occasion de l’anniversaire de la maman.

 

Arrêté dans la soirée du 6 décembre, Asraf Bhukoo a comparu en cour de district de Moka, le lendemain sous une accusation provisoire de «serious assault». Mais suite au décès d’Imteaz Rujab, il devrait comparaître en cour incessamment sous une charge d’assassinat. À son domicile, nous avons rencontré sa maman qui n’a toutefois pas souhaité faire de commentaire. «Mo latet tro fatige, nous a-t-elle déclaré, mo pa pou kapav dir narien.»