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Fortes averses : Ces «traumatisés» de la pluie

 «Dès qu’il pleut, on vit un drame», confie Sarojini Elmir.

À plusieurs reprises, ils ont dû faire face à la montée des eaux chez eux et voir leurs meubles et autres effets personnels abîmés. Rencontre avec quelques victimes des inondations de cette semaine…

Elle a le regard vide. Impuissante, elle ne sait plus quoi penser. Autour d’elle, dans son salon, c’est le silence, le néant. Ses meubles sont entreposés dans la cour, endommagés, gonflés par l’eau qui, la veille, le mardi 9 avril, a inondé sa maison en l’espace de quelques minutes, comme cela a été le cas pour de nombreuses autres familles qui habitent à Fond-du-Sac. «J’ai encore perdu plusieurs de mes effets personnels», lance Savitree Devi Prayag, 58 ans, avec de l’émotion dans la voix.

 

En regardant ses deux matelas complètement trempés et ses fauteuils, sans oublier sa télé, son micro-ondes et quelques autres appareils d’électroménager, elle n’arrête pas de repenser à ce par quoi elle est passée. «Je suis fatiguée. On est tous fatigués. On ne sait plus quoi faire. Après la montée des eaux en 2013 et 2016, nous voilà confrontés à un nouveau drame. On devra, une fois de plus, tout recommencer à zéro», confie cette mère de famille qui décrit ce qui s’est passé comme un véritable cauchemar.

 

«Tout s’est passé très vite. Il a beaucoup plu et en peu de temps, l’eau a commencé à monter. C’est difficile de dire ce qui se passe alors dans nos têtes à ce moment-là. On ne peut même pas empêcher l’eau de rentrer. On pense d’abord à se mettre à l’abri», raconte Savitree Devi, sous le regard de sa fille qui est venue lui donner un coup de main pour mettre de l’ordre et essayer de sauver ce qui peut l’être. Elle n’a qu’à fermer les yeux pour revoir cette eau boueuse prendre possession de sa maison. «C’est un véritable traumatisme. Dans ces moments-là, on est animés par un sentiment d’impuissance. On n’a pu fermer l’œil de la nuit», ajoute la quinquagénaire qui se souvient encore des deux autres fois où sa maison a été inondée. «On a l’impression de revivre la même chose. Et ce n’est pas du tout joyeux.»

 

Tant que la période de pluie ne tire pas à sa fin, elle n’aura pas l’esprit tranquille, dit-elle : «On a peur à chaque fois qu’il pleut.» À l’heure de la reconstruction, Savitree Devi, comme d’autres habitants de la région, ne comprend pas l’inaction des autorités. «Ils sont au courant du problème. Ce n’est pas la première fois qu’une telle chose se produise mais rien n’a été fait pour empêcher que les eaux envahissent les maisons et autres commerces. On nous a promis des drains et on ne voit rien se concrétiser», s’insurge la fille de Savitree Devi qui sait qu’il faudra du temps avant que les choses reviennent à la normale : «La maison est encore humide, il y a une forte odeur qui règne un peu partout, sans parler des moustiques et autres bêtes qui ont fait leur apparition.»

 

Une maison plus loin, chez Vandana, c’est la même scène de désolation. Comme chez Savitree Devi Prayag, des meubles sont entreposés dans la cour en attendant de savoir s’ils peuvent être récupérés. «On a eu une grande frayeur», lâche cette mère de famille : «Les deux premières fois que c’est arrivé, je n’étais pas à la maison mais mardi dernier, j’ai assisté en direct à l’inondation de ma maison. En quelques minutes, il y avait de l’eau partout et on a même dû se sauver par une fenêtre. C’était vraiment impressionnant !»

 

Comme ses voisins, elle en a ras-le -bol. «Il est grand temps qu’une solution soit trouvée. On ne peut hélas pas déménager pour s’installer dans une autre maison, dans une autre région. Il faut que les autorités trouvent un moyen de canaliser cette eau qui vient des régions plus hautes, Fond-du-Sac se trouvant dans une enclave. La première fois, c’était horrible mais vivre cela une troisième fois, ce n’est plus possible.» Les habitants attendent donc des décisions, des actions.

 

Exaspérés

 

Si les élans de solidarité, cette semaine, les ont aidés à reprendre la situation en main, selon les autorités, les travaux d’aménagement de drains, à Cottage ou encore à Fond-du-Sac, devront durer environ deux ans. En attendant, chaque averse continue d’inquiéter. «Rs 300 millions ont déjà été votées pour la construction des drains dans le village», a précisé Ashit Gungah, ministre du Commerce et député de la circonscription no 6, qui a toutefois été accueilli froidement par certains habitants de la région, exaspérés parce qu’ils ont vécu.

 

«Ce serait terrible de revivre cela. On n’en peut plus», se lamente Vandana. Dans d’autres régions, des familles habitants craignent aussi la moindre petite averse. Rouillard Lane, à Baie-du-Tombeau, a aussi fait les frais des pluies torrentielles. Sarojini Elmir, 54 ans, en sait quelque chose. «Dès qu’il pleut, on vit un drame. Nos effets personnels se retrouvent sous les eaux, abîmés, et on doit alors faire avec.» Un peu plus loin, dans le même chemin, Prisca Jaune, mère de trois enfants, se dit aussi traumatisée par les inondations fréquentes auxquelles sa famille et elle doivent faire face à chaque grosse pluie. «On a l’impression d’avoir à faire face à un éternel recommencement. Plus que les aides ponctuelles, on a besoin qu’une vraie solution soit trouvée pour que nos maisons ne soient pas prises d’assaut à chaque fois qu’il pleut. Tout cela joue sur notre moral, notre santé, nos enfants et notre bien-être.»

 

Joseph Jean Colette, qui habite dans la même cour, se dit aussi «épuisé» face à cette situation qui se répète souvent. «Regardez l’état de ma maison», lâche-t-il, le regard vide, comme tous ces «traumatisés» de la pluie.

 


 

Les inondations au cœur des conférences de presse

 

La gestion des problèmes liés à la distribution d’eau et aux inondations est un thème qui a été abordé le samedi 13 avril lors de la conférence de presse du leader du MMM. Paul Bérenger parle ainsi «d’échec et d’incompétence» du  gouvernement qui aurait dû, souligne-t-il, déjà dû compléter la construction de drains dans plusieurs régions de l’île. Pour Bobby Hurreeram, porte-parole du gouvernement, qui était aussi en conférence de presse hier, «l’opposition est en train de politiser les inondations».