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Crise économique post-covid : ma nouvelle réalité de chômeur

«J’ai heureusement eu du soutien de mes amis, de mes sœurs. Ils m’ont encouragée et m’ont dit de ne rien lâcher», dit Caroline Fitz-Gibbon.

Ils sont plusieurs Mauriciens actuellement, des jeunes, des pères et des mères de familles, à avoir perdu leur emploi suite à la crise économique due au coronavirus et qui peinent à joindre les deux bouts. Deux d’entre eux nous racontent leur drame...

Du jour au lendemain, ils se retrouvent dans le brouillard. Perdus, avec des doutes et des questions plein la tête, plusieurs de nos compatriotes partagent actuellement la même réalité, le même drame, depuis qu’ils sont au chômage ; une conséquence directe de la crise économique post-Covid qui met en difficulté bien des entreprises mauriciennes qui n’ont d’autres choix que de se séparer de certains de leurs employés. Ces derniers se retrouvent sur le pavé, sans salaire, livrés à eux-mêmes sans savoir comment faire pour s’en sortir. L’avenir leur paraît bien sombre.

 

Caroline Fitz-Gibbon fait partie de ces Mauriciens dont l’existence a été ainsi chamboulée et qui se retrouvent en plein tourment. «Je faisais des animations, dans les centres commerciaux notamment. C’était mon gagne-pain. Comme je suis en train d’étudier, je ne pouvais pas me permettre d’avoir un emploi à plein temps. Mais ce boulot qui consistait, entre autres, à faire des push up pour certaines marques qui faisaient appel à moi pour booster leurs produits à travers des ventes flash, me permettait de payer mes factures et de vivre. Je pouvais travailler jusqu’à 10 fois dans un mois et cela me permettait de subvenir à mes besoins», nous confie-t-elle.

 

Pesant chacun de ses mots d’une voix parfois tremblotante, marquant des pauses, elle revient péniblement sur sa traversée du désert. «D’habitude, fin mars, qui coïncide avec la fête de Pâques, est une bonne période pour moi. Malheureusement avec le coronavirus et le confinement, je me suis retrouvée dans une situation très compliquée. Il n’y avait plus moyen que je travaille. L’essence même de mon travail, c’est de créer des foules. Je gère l’énergie d’une foule afin qu’on puisse optimiser les promotions et ainsi les ventes. Comme je ne peux pas créer de foules, je ne peux pas travailler. Il n’y a aucune condition qui me permette de continuer à opérer», poursuit la jeune femme qui s’est retrouvée propulsée dans un véritable tourbillon. «Avec très peu d’économies, je me suis retrouvée au chômage du jour au lendemain, avec des engagements que je suis obligée de respecter.»

 

Son histoire, elle le sait, est semblable à celle de plusieurs autres personnes actuellement, avec des familles à charge, des dépenses, des dettes et des factures à payer : «Je ne suis certainement pas la seule dans cette situation. Les artistes vivent d’ailleurs la même chose que moi, tout comme ceux qui travaillent dans les hôtels. J’ai des amis, mari et femme, qui ont perdu leur emploi et ont des enfants et un loyer à payer. J’ai une amie dont l’époux a perdu son emploi alors que son salaire à elle a été réduit de 50% et là, elle doit faire des gâteaux pour pouvoir s’en sortir.»

 

«La dépression...»

 

Le mois d’avril a été particulièrement pénible pour Caroline : «J’ai fêté mon anniversaire le 24 avril et je ne savais pas comment j’allais entamer la semaine suivante. Je n’avais rien. Pas d’argent, pas grand-chose à manger. J’avais aussi des factures à payer et des frais universitaires à honorer. Je termine ma deuxième année d’études et il faut que je paye pour ma troisième année. Rs 10 000 peuvent paraître dérisoires pour certaines personnes mais pour d’autres, qui ne les ont pas, c’est conséquent. À ce moment là, je n’avais aucune visibilité sur l’avenir.»

 

Avec les jours qui passaient, Caroline ne savait pas à quel saint se vouer : «La dépression se faisait sentir. J’ai la chance de ne pas avoir de penchant pour l’alcool. J’avais une mère alcoolique qui est décédée d’une cirrhose du foie, donc l’alcool et moi, ça fait deux. Je n’avais pas d’échappatoire. De ce fait, je me suis retrouvée à dormir 20 heures par jour. Parce que la seule chose qui me faisais oublier la faim ou mes problème financiers, c’était de dormir pour oublier. Après, je me suis aussi tapée des nuits d’insomnie parce que mon cerveau n’arrivait pas à fonctionner. J’étais dans l’incapacité d’apprendre, d’étudier, parce que mon cerveau n’arrivait pas à comprendre ce qui se passait.»

 

Face à l’adversité et aux épreuves qui l’ébranlaient, Caroline a tout de même fini par avoir un sursaut : «J’ai heureusement eu du soutien de mes amis, de mes sœurs. Ils m’ont encouragée et m’ont dit de ne rien lâcher. J’ai fait une petite remise en question et j’ai relativisé. Je me suis dit que j’avais un toit sur la tête, j’ai une maison même si je n’ai pas grand-chose dedans alors qu’il y a des personnes qui n’ont rien. J’ai pensé à ces personnes qui dorment actuellement à la belle étoile dans une mare de boue. Puis, je me suis mise à évaluer ce que je sais faire et quelles sont mes limites.» Pour rebondir, la jeune femme a décidé d’explorer de nouveaux horizons : «Je sais cuisiner et je me suis dit que je ne vais pas mendier et que je dois me relever. Il y a une chose que je sais très bien faire, c’est la mayonnaise. Beaucoup de personnes connaissent la mayonnaise de Glenn’s. Comme je suis la fille de Glenn, j’ai décidé de me lancer dans ce domaine. Je ne pouvais pas changer ce cycle vicieux mais que je pouvais le rompre. Je me suis mise debout et j’ai décidé de me battre. J’ai posté sur Facebook que je vendais des pots de mayonnaise tout en expliquant ma situation.»

 

Depuis, elle reste debout. «Je n’éprouve aucune honte à dire que je n’ai pas d’entrée d’argent. Dans ce combat pour me remettre en selle, je ne vais peut-être pas être un super vainqueur mais je vais affronter cette épreuve», conclut Caroline qui a choisi de faire le récit de son histoire sur sa page Facebook car elle sait qu’elle aurait pu sombrer si elle n’avait pas repris sa vie en main : «Je partage des petits messages, je partage mon vécu.»

 

Comme Caroline, ils sont nombreux à devoir se battre actuellement pour survivre financièrement. Parmi, Alex (prénom fictif), un employé d’hôtel qui a tenu à garder l’anonymat et qui se retrouve lui aussi sans emploi : «Je suis marié, j’ai deux enfants et ma situation est actuellement cauchemardesque. Mes factures s’accumulent depuis trois mois. J’ai dû suspendre les travaux dans ma maison et sans le soutien de mes proches, je ne sais pas comment je ferais.» Il a appris «l’horrible nouvelle» le 18 mars : «Un jour avant l’entrée en vigueur du confinement, j’ai reçu, ainsi que d’autre employés, une lettre de leave without pay. Sans discussion et sans explication. On a été obligés de la signer.»

 

Mais Alex n’a pas voulu en rester là : «J’ai contesté cette lettre et suite à ma plainte, j’ai eu la surprise de recevoir une autre correspondance m’annonçant la fin de mon contrat. Depuis, je me bats pour que l’hôtel me règle mes salaires depuis le mois de mars. Ce n’est vraiment pas évident de perdre son emploi dans une conjoncture actuelle...» En attendant, Alex a adhéré au Workfare Programme en espérant, dit-il, pouvoir vite remettre les pieds à l’étrier et faire vivre sa famille correctement.

 


 

Chômage technique : une allocation de Rs 5 100 durant six mois

 

Lors du discours du Budget 2020-2021, le 4 mai, le ministre des Finances Renganaden Payachy a annoncé que le gouvernement viendra en aide à tous ceux touchés par le chômage technique en ce moment. Une allocation spéciale de Rs 5 100 par mois leur sera proposée pendant les six prochains mois. Rs 15 milliards ont été allouées à cet effet.