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Covid-19 : plusieurs personnes coincées à l'étranger depuis plus d’un an - La Mauricienne Ranini Cundasawmy, en Thaïlande avec son époux : «Comment nous nous sommes retrouvés bloqués là-bas»

«Le fait d'être bloqués en Thaïlande a été rempli de bonnes choses et de bonnes surprises», dit Ranini Cundasawmy.

Coronavirus rime avec peur, pleurs, détresse, danger. Sur son passage, il sème la mort et brise des familles. Mais le virus tient aussi beaucoup de personnes en otage car à cause de la fermeture des frontières, mesure en vigueur dans plusieurs pays pour contrôler la propagation de la Covid-19, elles se retrouvent bloquées à l'étranger et ne peuvent rentrer dans leur pays pour retrouver leur maison, leur famille et leur quotidien. Il y a quelques semaines, par exemple, des Australiens dans l'incapacité de retourner sur leur terre disaient se sentir «apatrides».

Dès le début de la pandémie, l’Australie s’est isolée du reste du monde et a décidé, en février 2020, de fermer ses frontières et de restreindre l’accès de son territoire aux Australiens de l’étranger. Un an plus tard, les restrictions sont toujours en place et de nombreux Australiens continuent à remuer ciel et terre pour retourner dans l’île-continent. Face à cette situation, un petit groupe a décidé d’agir en déposant une pétition auprès du Comité des droits de l’homme des Nations unies à Genève.

 

La Mauricienne Ranini Cundasawmy, boxeuse mauricienne qui pratique la savate, la croche et le muay-thaï et qui a remporté le championnat du monde de muay-thaï en 2017 et 2018, organisé par la WMF Federation basée en Thaïlande, est elle aussi bloquée dans ce pays classé au premier rang d’une enquête mondiale sur la gestion de la Covid-19 l’année dernière – avec son époux Patrick. Elle nous raconte comment elle s’en sort dans le pays qui planifie en ce moment le retour progressif des touristes chez eux.

 

Comment je me suis retrouvée en Thaïlande : «Mon mari Patrick – qui est aussi mon coach – et moi avons fait le voyage en Thaïlande en mars 2020 dans le cadre d’une compétition et pour participer à trois semaines d’entraînement au camp de Master Toddy. Pour des raisons sanitaires liées à la Covid-19, la compétition a été annulée et nous sommes alors partis directement au camp d’entraînement. Pendant notre séjour là-bas, il y a eu des cas de Covid-19 à Maurice, ce qui a causé la fermeture des frontières et Kenya Airways, sur laquelle je devais retourner au pays, a dû annuler ses vols. Je suis donc restée bloquée en Thaïlande et quelque temps après, ce pays a aussi fermé ses frontières. Il avait mis en place quelques restrictions afin de stopper la propagation de la pandémie.»

 

La vie là-bas : «En Thaïlande, j'habite à deux endroits différents : Bearing et Phetchaburi où se trouvent les deux training camps de Master Toddy. Je passe la plupart de mon temps à Phetchaburi et je vais à Bearing lorsque je dois renouveler mon visa ou pour combattre.»

 

La gestion du coronavirus : «Les mesures de sécurité mises en place en Thaïlande au début de la pandémie étaient la fermeture des écoles, gyms, salons de massage et plusieurs autres business, les check points pour les prises de température, la distribution de sanitizer automatique ou manuel à l’entrée des supermarchés, boutiques, lieux publics et autres. Les supermarchés, marchés, boutiques, hôpitaux, moyens de transport privé et public, pharmacies et autres services essentiels fonctionnaient normalement. Les restaurants étaient opérationnels mais en mode takeaway uniquement. Il y avait un couvre-feu de 22 heures à 5 heures du matin. Cela ne nous avait pas affectés vu qu’on n’avait pas l’habitude de sortir à cette heure-là.»

 

Au rythme des restrictions : «Durant cette période, il y avait beaucoup de promotions sur le prix de la nourriture et d’autres produits, ce qui nous a permis de faire des économies. Dans la rue, plusieurs groupes distribuaient assez souvent et gratuitement des food packs contenant du riz, des légumes, de l’eau, des produits de base, des masques et du sanitizer. Même si les salles de gym étaient fermées, j’ai continué mes entraînements avec Patrick. On était les seuls à habiter l’établissement et on nous avait donné accès à la salle de gym pour les entraînements, que ce soit à Phetchaburi ou à Bearing.»

 

Comment on s’est adaptés : «Au début, c'était difficile d’être bloqués dans un pays où on ne connaissait pas grand monde. On avait deux choix : céder à la panique ou faire comme on a l’habitude à Maurice, c’est à dire profiter de chaque moment de la vie, voir le côté positif, peu importe la situation. Ce mode de vie nous a beaucoup aidés à nous adapter à la situation, à faire des nouvelles connaissances et à apprendre comment vivent les Thaïlandais. Au début, c’était un peu compliqué de communiquer, vu que certains ne parlent que le thaï mais avec des signes et le translator sur nos téléphones, on y est arrivés (rires)...»

 

De découverte en découverte : «On a eu l'occasion de découvrir le genre de marchés où les Thaïlandais vont s’approvisionner en nourriture et autres produits essentiels. Patrick et moi sommes végétariens. Ces marchés aux légumes à petits prix sont des endroits rêvés pour faire nos courses. Après 18 heures, c’est à prix réduits. En temps normal, le sachet de légumes de 500 g est à 10 bahts (1 baht + 1,3 roupies), après 18 heures, on peut avoir deux sachets de 500 g à 15 bahts. On y va tous les vendredis ou samedis pour nous approvisionner. Et pour l’eau potable, il y a des distributeurs près de la gym. On peut avoir sept litres d’eau pour 5 bahts. Je découpe les légumes, je les sépare en petites portions, je les freeze et je les utilise ensuite en cuisine. À Phetchaburi, j’ai une cuisine et les ustensiles de cuisson à ma disposition. À Bearing, j’ai des ustensiles électriques pour cuisiner. Selon nos économies, de temps en temps, on se fait aussi des petits plaisirs comme manger dans le stand qui se trouve dans le marché ou dans les shopping malls. Le prix de la nourriture est très abordable. Avec 30 à 40 bahts, on peut avoir du riz avec des caris de notre choix ou des nouilles, soupes et autres. Et des fois, on se fait un ciné. Souvent, il y a des promotions où le prix du ticket chute jusqu’à 100 bahts. On en profite alors.»

 

Autour d’un mode de vie : «À Bearing, le marché se trouve à 5-10 minutes environ en moto bike. C’est un moyen de transport commun ici. C’est une moto qui fait le taxi et qui peut transporter deux à trois personnes. Le port du casque n’est pas obligatoire. Nous avons aussi l’option tuk tuk. La plupart du temps, on prend notre sac à dos et on y va à pied, cela nous fait faire une économie de 80 bahts pour l’aller-retour. Cela me permet ainsi d’acheter des petits gâteaux et de la nourriture... À Phetchaburi, le marché se trouve à 45-55 minutes à vélo. On y va la plupart du temps à vélo parce que là-bas, c’est full nature. On aime aller au marché à vélo. Sur la route, on peut voir beaucoup d’animaux, des champs de riz, des oiseaux, des canards, des vaches et quelques fois des geckos qui traversent la rue. J’adore Phetchaburi. Ma chambre se trouve au bord d’un lac. Me lever tôt le matin est un réel plaisir pour écouter le chant des oiseaux, voir le lever du soleil et, dans l’après-midi, regarder le soleil se coucher.»

 

Un virus, des ajustements : «En septembre 2020, les choses sont revenues à la normale. Une seule mesure de précaution est restée obligatoire : le port du masque. Il y a aussi les check points pour la température et la distribution de sanitizers avant d’entrer dans les boutiques, marchés, lieux publics, transports, etc. Il n’y a aucun couvre-feu. Les écoles opèrent à nouveau, les salles de gym sont ouvertes à nouveau et il y a aussi eu la reprise des entraînements de groupe et des combats. À la fin du mois de décembre, il y a eu quelques cas de Covid-19. Les autorités avaient mis des restrictions sur le regroupement public, la fermeture des salles de gym et des écoles, et un couvre-feu avait été instauré pour environ trois semaines de 22 heures à 5 heures du matin. Ensuite, il y a eu un retour à la normale. À la fin du mois dernier, des cas ont encore été détectés dans les régions de Bangkok et Samut Prakan. Il y a eu à nouveau des restrictions. Il n’y a aucune interdiction en ce qui concerne les déplacements. On est libres d’aller où bon nous semble. À chaque fois que nous sortons, on prend un maximum de précautions : masque, sanitizer, social distancing. Et une fois de retour chez nous, les vêtements et sacs vont directement à la machine à laver. On vaporise également notre portefeuille avec de l’alcool ainsi que les billets et pièces de monnaie, puis direction la douche. Avec un maximum de précautions, on s’adapte et on apprend à vivre avec le virus. Et en même temps, on continue à profiter de la vie ici.»

 

Une initiative : «Avec le lockdown, il y a eu aussi la création d’A Nou Fouette Di Sang. C’est un entraînement que je fais en ligne sur ma page Facebook. C’est gratuit et adapté à tout le monde : les sportifs mais aussi ceux qui ne font pas de sport mais qui veulent commencer. L’an dernier, pendant le confinement à Maurice, plusieurs jeunes du club où je m’entraîne (Bambous Martial Arts) étaient stressés et démotivés à force de rester à la maison. J’ai commencé à faire des entraînements sur WhatsApp et nous avons eu l’idée d’en faire en live sur Facebook tous les lundis, à la même heure où nous avions l’habitude de nous entraîner à Maurice. Patrick a ainsi établi un plan physique et mental, et réadapté nos entraînements pour le live afin que tout le monde puisse en profiter. Les sessions – qui ont commencé en mars 2020 – ont lieu tous les lundis à partir de 18h45. De 18h45 à 19 heures, on papote un peu. Mo apel sa nou 15 minit ti palab. Et à 19 heures, l’entraînement commence.»

 

Des apprentissages : «Les Thaïlandais sont très doux. Ils sont super gentils et je me sens comme à Maurice. Au début, je comptais les jours qui passaient pour retourner à Maurice. Mais après quelques mois, j’ai arrêté de compter. Je prends la vie comme elle vient. Le fait d'être bloqués ici a été rempli de bonnes choses et de bonnes surprises. En ce qui concerne Patrick, l’an dernier, il a passé un examen en spécialisation en Pad Work avec accréditation par le ministère de l’Éducation thaïlandais. Il a été sponsorisé par Master Toddy.  En ce moment, il continue sa formation comme coach de Muay Thaï professionnel accrédité par le ministère de l’Éducation thaï. Il est formé personnellement par le Grand Master Toddy qui sponsorise aussi ses examens à venir. De mon côté, je continue à me perfectionner au niveau des combats. Je me concentre à fond dans les entraînements parce qu’il y a pas mal de compétitions à venir si la situation liée à la Covid-19 s’améliore en Thaïlande et en Russie. Donc, je reste concentrée sur mes objectifs. Voilà comment nous nous sommes retrouvés bloqués en Thaïlande et comment on a transformé cette petite mésaventure en rêve. Je suis loin de ma famille, certes, mais on reste en communication via des video calls ou à travers des messages sur les réseaux sociaux. Je tiens à remercier Ishan Shivand (Shiv Yog) et Terry Smith (Fundsmith) qui nous aident afin qu’on puisse financer notre logement et en partie la nourriture. Je remercie aussi les amis, la famille, les connaissances et ceux qui sont connectés sur ma page Facebook et qui me donnent beaucoup de soutien moral.»