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15 ans du Collectif Arc-en-Ciel : Mon meilleur souvenir autour d’une Marche des Fiertés

Un anniversaire spécial, ça se fête ! Et le Collectif Arc-en-Ciel (CAEC) ne compte pas déroger à la règle. Pour ses 15 ans, il donne rendez-vous aux Mauriciens le 10 octobre, au Plaza, à Rose-Hill, à 13 heures, pour une Marche pour l’Égalité ayant pour thème Eski to tann mwa. Des personnes qui suivent le combat du collectif depuis longtemps nous racontent leurs souvenirs les plus marquants autour d’une de ces marches militantes qui prônent «le droit d’aimer pour tous»…

Dimitry Ah-Yu : «C’était en 2006, j’avais 19 ans»

 

«Bien vivre son homosexualité et réussir son coming out, ce n’est pas une chose facile quand on vit dans un pays où cela est encore très mal accepté. La triste marche de 2018 à Port-Louis, qui n’a pu se faire, a été pour moi un dur rappel à la réalité ; que l’homophobie est toujours d’actualité, cachée sous une fine couche d’hypocrisie. Mais le combat continue ! Cette année marque le 15e anniversaire du Collectif Arc-en-Ciel. Je me souviens de cette première marche en 2006, à Rose-Hill. J’avais tout juste 19 ans et je n’arrêtais pas de tourner autour du Plaza, à la fois curieux de rencontrer des gens qui me ressemblent et effrayé par le regard des autres. Je me rappelle avoir prétendu m’être perdu quand j’ai croisé le chemin d’une amie d’école. “Non… Je ne savais pas qu’il y avait une Gay Pride, je vais juste au KFC.” Comme quoi, la peur peut rendre bête. Mais rapidement, la joie qui régnait autour de cette manifestation m’a encouragé à me joindre à la marche. Je n’oublierai jamais le sentiment de liberté à ce moment-là, quand pour la première fois j’ai pris conscience que je n’étais pas seul, que j’étais accepté et que je n’étais pas si différent des autres. Ici, je n’avais plus besoin de jouer un rôle, je pouvais être moi. Un sentiment qui m’a d’ailleurs motivé par la suite à rejoindre le CAEC pour faire entendre notre voix.»

 

Sandrine Julien : «La marche est un moment pour chaque citoyen mauricien, LGBT ou pas»

 

«Mon meilleur souvenir, ou plutôt le moment qui m’a le plus marquée, était la marche de 2017. C’est la première et unique fois que la marche a traversé la Place d’Armes. La portée symbolique était extrêmement forte. Un peu comme la concrétisation d’un projet de plus de 10 ans. J’étais présidente cette année-là. Grosse responsabilité. Il y a eu une contre-marche rapidement maîtrisée par les autorités, contrairement à 2018 où les choses ont pris une tournure différente, malheureusement. Ce que je retiens avant tout, c’est ce sentiment d’espoir qu’un jour, les droits de tout un chacun seront respectés à Maurice. La marche est un moment pour chaque citoyen mauricien, LGBT ou pas, de revendiquer sa vision d’une nation inclusive où les droits humains seront enfin au centre des préoccupations de nos dirigeants. Et j’insiste sur le fait que les droits des personnes LGBT nous concernent tous, peu importe notre orientation sexuelle. On parle de droits humains en règle générale. Les personnes de la communauté LGBT ne veulent pas de privilèges ou d’un traitement de faveur mais uniquement de l’égalité, du respect de leur vie privée et de leur droit d’aimer.»

 

Ridwan Ah Seek : «Je retiens à chaque fois cette force et la persévérance de beaucoup de gens»

 

«Pour moi, chaque année, la marche est un événement, un cri pour qu’on ait tous les mêmes droits. Des souvenirs, j’en ai plein mais ce que je retiens à chaque fois, c’est cette force et la persévérance de beaucoup de gens, gays ou pas, qui montrent leur soutien, leur amour et leur fierté. Ça encourage à aller de l’avant et à continuer le combat pour une île Maurice où tout le monde a les mêmes droits et le même respect.»

 

Carou Labonne : «Quand j’ai marché pour la première fois dans les rues de Port-Louis...»

 

«Je me souviens particulièrement de trois prides. Pour ma première pride en 2008, j’ai pu voir d’autres personnes comme moi, des personnes de la communauté LGBTQI dont j’ignorais l’existence. Pour la première fois, je ne ressentais pas ce sentiment de solitude. Puis, la deuxième fois, c’est quand j’ai marché pour la première fois dans les rues de Port-Louis en 2017. C’était la première fois que je voyais des contre-manifestants et que j’ai senti de la haine venant d’eux, alors que tout ce qu’on demande, c’est que les autorités nous entendent et reconnaissent notre existence. Puis, il y a eu la pride de l’année dernière, en 2019 ; après avoir accepté de ne pas marcher pour ne pas mettre en danger les participants en 2018, c’était comme une victoire. Il s’agissait seulement de personnes qui demandaient le droit d’aimer et d’exister...»

 

Jean-Daniel Wong : «En 2014, pour ma dernière marche en tant que président du CAEC»

 

«Pour ma dernière marche en tant que président du Collectif Arc-en-Ciel en 2014, le cœur y était pour la cause mais, en même temps, j’étais troublé car une personne de la communauté qui avait été déportée d’un pays européen et qui avait atterri le matin même, vivait une angoisse cauchemardesque ; elle était perdue, n’ayant nulle part où aller. Il fallait trouver une solution car il y avait aussi les menaces de mort sur sa personne. Marcher pour revendiquer des droits égaux, c’est bien et ce fut clair à ce moment-là que l’après-marche devait se dérouler dans l’action. La semaine qui suivit la marche, cette personne a pu s’exiler ailleurs pour une vie meilleure, sans menaces et sans avoir à se cacher. Aujourd’hui, elle est une militante LGBT dans ce pays qui l’a accueillie.»

 


 

Le temps d’un retour symbolique à Rose-Hill le 10 octobre

 

C’est là-bas que tout a commencé. C’est là-bas, à Rose-Hill, au cœur des Plaines-Wilhems, que les premiers participants à la Marche des Fiertés ont fait entendre leur voix. Et cette année, dans le cadre des 15 ans du Collectif Arc-en-Ciel, l’organisme donne rendez-vous aux marcheurs, le 10 octobre, à 13 heures, au Plaza, pour un retour symbolique dans la ville où des slogans comme «les mêmes droits pour tous» et «le droit d’aimer pour tous» ont résonné pour la première fois.

 

Ce rendez-vous, qui se déroule chaque année au mois de juin, a été décalé cette année en raison de la crise sanitaire. La date du 10 octobre est un clin d’œil à la Journée internationale du coming out (National Coming Out Day) qui est observée le 11 octobre, soit au lendemain de la marche.

 

«15 ans ! Cela fait déjà 15 ans que le Collectif Arc-en-Ciel cherche à promouvoir une société mauricienne dans laquelle chaque citoyen possède les mêmes droits, indépendamment de son orientation sexuelle ou son identité de genre. Depuis 15 ans, notre objectif reste le même : protéger les personnes LGBTQ+ contre toutes les formes de stigmatisation, discrimination ou violence»,confie Anjeelee Beegun, directrice du Collectif Arc-en-Ciel.

 

Le slogan de la marche de cette année est Eski to tann mwa ; un message qui sera partagé par les Mauriciens qui ne rateront pas ce rendez-vous du 10 octobre, tout simplement pour marcher au nom de l’amour, du respect, de la tolérance et de l’égalité...