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Ajmal Panchoo : Le fabuleux destin d’un docteur mauricien en France

«Ajmal Panchoo est un homme au grand cœur. Le dentiste, natif de l’île Maurice et résidant à Lille, est à l’origine d’une unité spécialisée à la faculté dentaire de Lille, unique en France, permettant aux personnes polyhandicapées de se voir prodiguer des soins bucco-dentaires comme tout un chacun. Ce qui lui a valu, très récemment, d’être nommé Nordiste de l’année 2014.» C’est ce qui accompagne la vidéo parlant du parcours de ce médecin et de son projet pour ses patients pas comme les autres.

«Chacun de nous a le magnifique pouvoir de changer le monde qui l’entoure. Ce pouvoir s’appelle l’amour (…) Nous avons tous un joli destin à connaître et toute la vie pour le rencontrer.» Ça a toujours été la vision d’Ajmal Panchoo et c’est d’ailleurs avec ces quelques mots, entre autres, qu’il se livre dans ce film qui sera projeté le 9 juin à la salle du Grand-Sud, à Lille, en France. Avec ce documentaire, le Mauricien, originaire de Brisée-Verdière, fait à nouveau parler de lui.

 

En 2015, il faisait déjà le buzz sur le Net et dans les médias français, notamment dans La Voix du Nord qui décrivait le médecin comme «un homme au parcours étonnant»et à «l’intensité communicative»,fort de ses «accomplissements auprès de ceux et celles touchés par le polyhandicap» (NdlR : un handicap dans lequel une déficience mentale sévère et une déficience motrice sont associées à la même cause, entraînant une restriction extrême de l’autonomie).

 

L’article de presse évoque aussi le travail qu’il effectuait à la faculté dentaire de Lille où il a ouvert «une voie unique en France»et forme des étudiants à la réalité de la vie. Dans un autre article, celui de Libération.fr, le Mauricien, sacré Nordiste de l’année 2014, est dépeint comme un dentiste qui fait fi des handicaps et un «praticien qui innove en allant au-devant des plus dépendants».C’est ainsi que le médecin nous racontait son histoire et nous parlait de ses motivations dans notre édition du 26 janvier 2015.

 

Une année plus tard, ses réalisations et son dévouement pour «rendre lumière et sourire»à ceux qui le méritent, tout comme sa «quête de soin dentaire équitable»pour tous, continuent à susciter des réactions. À tel point que le réalisateur Abde Keta a décidé de lui consacrer un film, Le fabuleux périple du docteur Ajmal Panchoo : 1h38 de séquences qui racontent sa bataille et ses difficultés pour mener à bien son travail.

 

«Abde Keta, je l’ai rencontré lors d’une soirée d’anniversaire d’une copine. Il a un peu écouté mon parcours et il m’a dit : “Ça, il faudrait faire un film !” Une semaine plus tard, il débarquait à l’hôpital avec sa caméra et toutes les autorisations»,nous confie le docteur Panchoo, dont les dernières années ont été marquées par sa lutte, en phase avec ses recherches et le domaine dans lequel il a choisi de se consacrer pour les personnes souffrant de déficience mentale et pour qui les soins bucco-dentaires étaient compliqués. Hélas, dit-il, son combat s’est soldé par un échec. Il voulait de tout cœur que son projet voit le jour : «Je me battais pour la création d’un poste de praticien hospitalier, qui m’aurait permis d’avoir un statut, donc de diriger mon service. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’au niveau financier, ce n’est pas mirobolant et c’était surtout pour pérenniser le service. Ce statut m’aurait permis de diriger plus de thèses et j’aurais pu mener plus de recherches. Bref, c’est à ne rien comprendre.»

 

Face à la non-réaction des autorités françaises, Ajmal Panchoo a soumis sa démission : «Je suis parti de cet hôpital et depuis, je me sens quand même moins «noir» ! Désolé, mais rien que de parler de ce sujet me rappelle ce gâchis et l’opportunité qu’ils ont laissé passer. Soit soigner des personnes handicapées dérange, soit j’étais un peu trop bronzé. Bref, malheureusement mes patients ne peuvent ni voter ni s’exprimer.»

 

Grosse médiatisation

 

Malgré l’amertume qui se ressent dans ses propos, le médecin garde de très bons souvenirs de l’expérience des tournages en situations réelles : «Au début, c’était pour faire un documentaire sur le service de la fac que j’avais créé et qui est considéré comme unique en France. Mais avec la séquence des événements qui ont suivi, les objectifs ont changé. Il y a eu une grosse médiatisation. Pour Abde Keta, filmer une injustice était unique. Je vous avoue que je suis très honoré qu’il y ait un documentaire parlant de mon parcours. Ce n’était pas évident au début d’être filmé partout avec des caméras, mais je les ai vite oubliées. Ils avaient même installé un studio chez moi dans mon salon !»

 

Sur la vidéo, qui le montre également à Maurice où tous ses proches sont fiers de lui, Ajmal Panchoo, ex-étudiant du collège Royal de Port-Louis qui a mis le cap sur la France en 2001, s’est laissé suivre dans son quotidien. On le découvre attachant, souriant, aux petits soins avec ses patients pas comme les autres, officiant avec passion pour soulager ses malades, mais aussi reconnaissant envers ses parents, notamment envers son père chauffeur de bus.

 

«C’était assez marrant et une très belle aventure humaine. D’ailleurs, tous mes patients en situation de handicap ont accepté d’être filmés. Ça n’a jamais posé de problème. Les images du film sont la preuve qu’on peut soigner ce type de patient avec une approche particulière. De plus, j’ai été très touché qu’on me filme à Maurice et qu’on mette les Mauriciens en avant»,raconte le docteur qui, depuis son arrivée en France, n’a cessé de se donner et de s’impliquer.

 

L’année dernière, celui qui se décrit lui-même comme un «bordélique»nous racontait sa vie à «cent à l’heure», sa mise en place d’«un mode de fonctionnement unique» où il prenait«en charge des patients qui étaient surtout soignés auparavant sous anesthésie générale» et le tournage du film qui était en cours. Aujourd’hui, le résultat final est pour lui comme une façon de rendre hommage à toutes ses années de travail : «Depuis que j’ai arrêté mon travail à l’hôpital, je me consacre à une activité libérale, je dirige aussi des thèses que j’avais commencées notamment celle sur le système de santé bucco-dentaire à Maurice. Je me déplace aussi toujours dans les institutions pour handicapés, je fais quelques soins à domicile, les patients que je soignais se retrouvent sans solution en ce moment et c’est très embêtant pour moi. Je fais du mieux que je peux, mais j’ai beaucoup de beaux projets en cours !»

 

En attendant, il espère que le film qui lui est dédié sera apprécié. «Je pense à une visite à Maurice au courant de cette année, si on arrive à faire diffuser le film à Maurice. J’espère qu’on aura du soutien», dit-il, en parlant du documentaire qui relate son «fabuleux périple de docteur»

 


 

Abde Keta : «Le dévouement en France est en voie de disparition»

 

«À travers cette injustice, je me rends compte que la France sombre de plus en plus.»C’est en ces termes qu’Abde Keta, le réalisateur du Fabuleux périple du docteur Ajmal Panchoo, parle du désir qui l’a poussé à faire le film qui retrace le parcours de notre jeune compatriote en France. Pour lui, le message derrière ce documentaire est que «le dévouement en France est en voie de disparition».