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Lamour pena limit

Que l’on n’apprécie pas la Gay Pride, organisée depuis ces treize dernières années à Maurice, est admissible. Que l’on soit heurté par la vue de ces traditionnels défilés avec déguisements et excentricités, est du domaine de la compréhension. Que l’on ait (toujours) des opinions toutes faites sur les homosexuels en 2018 est une liberté de pensée qui témoigne de la mentalité des uns et des autres : quel est le regard que nous jetons sur autrui, quel respect lui accordons-nous, quelles sont nos valeurs, etc. Chaque année, à la marche des LGBT, il y a toujours un petit groupe qui, sous prétexte de religiosité, jouent les perturbateurs.

 

Leur raisonnement, on le connaît : l’impossibilité d’accepter des humains qui, à leurs yeux, sont justes coupables d’être ce qu’ils sont, donc différents, car leur orientation sexuelle ne serait pas, selon certaines lectures, voire croyances, en accord avec ce qu’ils considèrent comme étant la norme. Et chaque année, des homophobes manifestent leur opposition en traitant les joyeux pacifistes marcheurs, munis de leur drapeau arc-en-ciel, de tous les noms indignes et humiliants. Ce qui change, cette fois, c’est le nombre grandissant d’opposants à la marche qui a dû être annulée hier pour des raisons de sécurité, tant les slogans intolérants ont eu plus d’écho dans les rues de la capitale que les pancartes de l’amour du Collectif Arc-en-Ciel.

 

Ce, parce que beaucoup ont profité des réseaux sociaux pour s’organiser à coups de messages hostiles, de vidéos condamnables partagés par ceux pour qui il est impossible de concevoir l’amour entre personnes du même sexe. Ce qui change aussi cette année, c’est le nombre de menaces de mort à l’encontre de Pauline Verner, une consultante du Collectif Arc-en-Ciel. Ainsi donc, nous ne sommes plus dans les désaccords, dans les divergences d’opinions, mais dans un délit grave où l’on veut tuer l’autre, l’éliminer. Tout ça à cause d’une marche qui, justement, revendique la liberté de tout un chacun de vivre son orientation sexuelle comme bon lui semble.

 

L’affaire est sérieuse parce que le délit de menace de mort est punissable par la loi. Sauf qu’au lieu de chercher les auteurs, au lieu de dire clairement que dans un pays démocratique il est possible d’organiser cette Marche des Fiertés, la police refuse de donner son autorisation dans un premier temps, sous prétexte de «sécurité nationale». Dès lors, notre force policière fait la démonstration de sa fragilité car envoyant un message inacceptable : qu’elle capitule devant les pressions, qu’elle ne peut donner l’assurance de maintenir l’ordre. Mais plus grave, elle laisse surtout croire aux anti-LGBT qu’il est possible d’invoquer des raisons religieuses pour faire annuler une manifestation à partir du moment qu’on ne partage pas la même vision de vie.

 

En montrant son impuissance et en ne condamnant pas fermement de manière officielle, tous ceux qui ont proféré des menaces de mort, en tergiversant, jusqu’à vendredi soir, laissant deviner une intervention ministérielle pour un revirement de situation, le commissaire Nobin et ses hommes ont laissé pourrir une situation qui s’est révélée incontrolable samedi matin. Et qui a finalement mené à l’annulation de la marche dans les rues de la capitale. Et ce, à cause d’une autre manifestation, bien plus virulente, qui donne à notre pays un visage de haine.

 

Après une série de menaces de mort, une flopée de messages répugnants sur les réseaux sociaux et une manifestation anti-LGBT dont on ne sait s’il y a eu l’autorisation jusqu’ici, aucune interpellation n’est pourtant notée. Pour des délits moins graves que ça, à l’exemple d’une invitation pour manifester contre le prix du carburant, deux citoyens avaient été récemment, inquiétés par les Casernes centrales. Mais heureusement, il y a de ces autres images positives et porteuses d’espoir, un peu comme ces beaux arcs-en-ciel qui naissent après la pluie.

 

Parce qu’au final, toutes ces agitations n’ont jamais fait autant parler de la communauté LGBT, de leur choix de vie et surtout de leurs droits humains. Toutes ces prises de position en leur faveur, tous ces messages de live and let live sur les réseaux sociaux, toute cette jeunesse présente au caudan, et ces centaines de profils en soutien, donnent raison au message de la marche des fiertés 2018 : lamour pena limit !