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Maisons en amiante : Le ras-le-bol des habitants de Cité Riambel

Noël Gilbeau, ici avec sa femme, a développé une infection sévère due à une exposition prolongée à l’amiante.

Depuis des années, ils cherchent désespérément une solution à leur problème. Car ils en ont assez de voir leurs conditions de vie se détériorer de jour en jour dans des maisons en amiante qui affectent considérablement leur santé. Incursion au cœur de Cité Riambel…

Le danger est invisible. Mais il est bien présent et a un nom que tout le monde n’associe pas forcément à quelque chose de dangereux. Il s’appelle l’amiante. Ce matériau a été largement utilisé dans le passé dans la construction des sites industriels et de bâtiments en raison de son coût peu élevé. Sauf que l’amiante est une substance cancérogène pour l’être humain et ses méfaits sur la santé de l’homme ne sont pas négligeables. 

 

Et à Cité Riambel, sur la côte Sud-ouest, plusieurs familles vivent dans des maisons construites avec de l’amiante depuis des décennies. Ce danger, bien qu’invisible à l’œil nu, progresse de plus en plus, tout en détruisant petit à petit la vie des habitants. Parmi ces derniers, quelques-uns seulement ont pu raser leurs maisons pour les reconstruire complètement en béton. Ce qui limiterait le danger.Comme le fait ressortir Pascal Telvar du Grup social nuvo lespwar du Sud. Il milite aux côtés des habitants de cette localité afin que le gouvernement leur vienne en aide. Ce, dit-il, pour plus de justice sociale. 

 

«Ces maisons ont été construites il y a longtemps par le gouvernement. Si à l’époque les dangers de l’amiante étaient méconnus, aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Et la plupart des familles n’ont pu détruire leur maison en amiante pour en bâtir une nouvelle car elles n’en ont pas les moyens. Le gouvernement pourrait faire un effort», s’insurge le jeune homme qui, malgré les difficultés, ne compte pas abandonner sa lutte. 

 

Parmi les habitants confrontés à cette situation, Soodeli Nallee, 53 ans. Elle ne sait pas ce que c’est que de vivre dans une maison en béton. À sa naissance, raconte-t-elle, elle a vécu dans la maison en amiante de sa grand-mère avec ses parents. Ces derniers ne sont pas  là aujourd’hui mais d’autres membres se sont ajoutés à la famille de Soodeli. Vivent désormais dans la maison de Cité Riambel : son fils Kessevan et sa compagne Emilie Sambrandine et leur fils de trois mois. La quinquagénaire, elle, a pu, avec l’aide du Trust Fund, construire une petite maison en tôle à l’arrière de la maison de son enfance. C’est là qu’elle habite maintenant.

 

«Je crains pour la santé de mon bébé»

 

Mais les séquelles laissées par ces années passées à vivre dans une maison en amiante ne sont pas des moindres. «Je suis devenue asthmatique au fil des années. Je dois suivre un traitement. Ce n’est pas évident», explique-t-elle. Son fils Kessevan Nallee a, lui aussi, développé cette maladie depuis plus de trois ans. Et maintenant, c’est sa compagne Emilie qui commence à ressentir les effets de cette substance cancérogène sur sa santé. Pour ne rien arranger, toutes les fenêtres et les portes de la maison en amiante sont complètement délabrées, laissant pénétrer à l’intérieur un mauvais courant d’air, surtout le soir.

 

«Je suis malade depuis que je vis dans cette maison. Je respire très mal et j’ai toujours de la toux. Maintenant, je crains pour la santé de mon bébé de trois mois. J’ai peur qu’il ne développe une maladie dangereuse causée par l’amiante», explique Emilie. 

 

À quelques pas de là, chez les Dig Dig, le spectacle qui s’offre à nous fend le cœur. Le toit de la maison a été recouvert d’une bâche pour empêcher que la maison soit inondée en période pluvieuse. Car une partie de la toiture, toujours en amiante, a cédé alors que d’autres morceaux se détachent graduellement. «À n’importe quel moment, un drame peut se jouer. Le toit se détache. On ne peut plus utiliser les chambres qui sont concernées par cela.» explique Louis Jacques Dig-Dig, le propriétaire des lieux. Du coup, sa petite famille doit vivre dans les deux pièces plus ou moins intactes de la maison : le salon et une chambre. 

 

«Cette maison appartenait à mon père. Il me l’a léguée. Mais il est difficile de vivre dedans. Je suis cardiaque et mon état s’est détérioré à cause de mon exposition à l’amiante. Une opération chirurgicale n’est pas à écarter», confie l’homme de 67 ans alors qu’une odeur suffocante règne dans la maison. Son voisin Noël Guilbeau, 69 ans, craint, lui, pour ses pieds. La raison ? Il a développé une infection sévère due à une exposition prolongée à l’amiante. «Cela fait deux ans que j’ai développé cette infection. C’est directement lié à l’amiante, m’a dit le médecin. J’applique des crèmes, je fais des suivis réguliers. J’ai peur de perdre mes pieds», lâche-t-il impuissant, en nous montrant ses pieds dont la peau ressemble à une coque de tortue. Mais pour l’heure, dit-il, il n’a pas les moyens de se construire une nouvelle maison et ainsi limiter les dégâts sur sa santé. 

 

Une autre voisine, Marie-France Samuel, 93 ans, avoue, pour sa part, avoir reçu une aide qui lui a permis de refaire le toit de sa maison. «On a refait le toit avec des feuilles de tôles. Mais les cloisons sont toujours en amiante. Je suis toujours prise de vertige et je souffre de problèmes respiratoires. C’est un cas désespéré», dit-elle d’une petite voix. 

 

Une situation désespérée qui n’a que trop duré pour Nadine Olivier. Cette maman ne profite de la présence de ses deux enfants que deux jours par semaine. Car ils souffrent tous deux d’asthme en raison de leur exposition à l’amiante. «Les jours de semaine, ils sont chez mes parents. J’ai dû les éloigner car ils sont tout le temps malades», lance-t-elle, les larmes aux yeux. 

 

Autre famille, même désespoir. La maison de Wilby Fanny et de sa compagne Solange Lauchoo sort peut-être de l’ordinaire dans le quartier de par son style créole et sa belle couleur jaune mais pour ce qui est de l’intérieur, c’est une autre histoire. Le toit est colmaté par quelques morceaux de plastique qui protègent tant bien que mal de la pluie. Alors qu’une forte odeur se dégage des lieux. «Nous ne savons plus quoi faire. Cette situation est la source de mon problème cardiaque. J’ai subi une première opération. Mon état s’est ensuite détérioré et j’ai dû passer par une deuxième opération chirurgicale», se révolte-t-il. 

 

En attendant une solution à leur problème, les habitants de Cité Riambel n’ont d’autre choix que de vivre dans ces maisons toxiques qui les consument à petit feu. 

 


 

Pascal Telvar : «Il est temps que le gouvernement prenne ses responsabilités»

 

Il n’a pas peur de dire haut et fort ce qui, selon lui, conviendrait le mieux aux habitants de Cité Riambel. Lui, c’est Pascal Telvar du Grup social nuvo lespwar du Sud. Cet habitant de Cité Riambel mène un combat à plusieurs niveaux. Premièrement, il demande à ce que le gouvernement vienne en aide aux familles qui vivent dans des conditions difficiles dans des maisons en amiante depuis de nombreuses années.

 

«Ces gens ne peuvent pas bâtir une nouvelle maison faute de moyens. Si le gouvernement ne peut pas les aider financièrement, il faut qu’il leur accorde le droit de devenir propriétaires de leur terrain à bail. Car d’après la loi, les gens qui habitent des maisons des cités ont le droit de devenir propriétaires en payant une petite somme d’argent. Cette loi est en vigueur depuis plusieurs années. Or, à Riambel, on n’est pas encore devenus propriétaires. Il est temps que le gouvernement prenne ses responsabilités», se révolte-t-il. 

 

La raison, selon lui, réside dans le fait que les terrains en question sont situés sur des pas géométriques. Autre combat, autre revendication. Celui de rebaptiser Cité Riambel en Résidence Riambel. «Cette appellation de Cité nous cause vraiment du tort. Les jeunes en sont victimes lorsqu’ils vont chercher de l’emploi. On voit qu’ils viennent d’une cité et pour cette unique raison, ils ne sont pas embauchés», déplore notre interlocuteur qui espère un changement profond.