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Infirmier : Le métier du cœur

Marie-Ange Gungurum, est heureuse de se mettre au service des patients.

Ils ont derrière eux des années d’expérience. Aujourd’hui, disent-ils, le rôle de l’infirmier, dont la Journée mondiale a été célébrée le 12 mai, va beaucoup plus loin que celui de donner uniquement des soins. Au cœur des vies au quotidien, Jay Seegoolam, Marie-Ange Gunguram, Odile Ladouceur et Randy Gopalla nous parlent avec passion de leur vocation.

Leur engagement est total, leur dévotion absolue. Lorsqu’ils parlent de leur métier, ils ont des étoiles dans les yeux. Être infirmier, plus qu’une carrière, c’est une vocation. Jay Seegoolam en est convaincu. «Je me suis découvert et j’ai développé une dimension spirituelle. On se connecte au patient. La compassion est une dimension importante du métier car nous devons sans cesse gérer des émotions.»

 

Trente ans plus tard, son amour pour le métier n’a pas pris une ride. Au contraire, il n’a fait que grandir. Pourtant, se souvient-il, devenir infirmier n’était pas pour lui une évidence. Le 1er avril 1986, fraîchement sorti de la School of Nursing, il a fait son entrée à l’hôpital Victoria juste pour essayer, voir si ça lui plairait. Dès les premiers instants, il a plongé dans un autre monde. Une découverte fascinante. À l’époque, pourtant, le métier d’infirmier n’était pas si bien vu. «Le médecin donnait les prescriptions, traitait les maladies et les infirmiers exécutaient.»

 

Au fil des années, cette vision du métier, affirme Jay Seegoolam, marié et père de deux enfants, a changé. «Le médecin traite les patients, guérit et les infirmiers épousent cet objectif. Ils travaillent ensemble. Outre le volet médical, ils prennent soin de la personne, l’aide, l’accompagne grâce à une approche holistique.» C’est principalement pour ça qu’il a décidé, il y a une dizaine d’années, de quitter le secteur public pour rejoindre Apollo Bramwell (maintenant connu comme le Wellkin Hospital). «Ce n’était pas un choix facile mais j’avais besoin de challenge et de découvrir cette autre facette de mon métier.» Entré comme Charge Nurse, Jay Seegoolam a vite gravi les échelons. 

 

Aujourd’hui Deputy Chief Nursing Officer de l’établissement, il s’occupe de la gestion du département et de l’équipe, de l’organisation des soins et des patients. Une évolution qui va de pair avec celle du métier. «Même si cela me manque, j’aime transmettre mon expérience aux jeunes et pour ce faire, j’ai besoin de prendre de la distance afin d’avoir une vision plus large de ce qui doit être fait.» Ce n’est pas seulement la médecine qui a évolué, dit-il, mais aussi la façon de faire. «Savoir allier la science et l’art, c’est la base de notre métier. Prendre le temps d’expliquer les choses, de créer une relation avec le patient, ce sont des choses qui font la différence.»

 

Comment faire lorsqu’on se retrouve au cœur du malheur, de la tristesse et de la peur ? «On doit se rappeler qu’on est là pour servir les autres et que c’est un travail qu’on fait d’abord avec le cœur, pas seulement avec les mains»,confie Marie-Ange Gungurum, 56 ans, Acting Charge Nurse à l’hôpital de Candos. Voilà à quoi elle s’accroche dans les moments difficiles. Malgré les coups durs et les conditions de travail pas toujours évidentes, elle ne changerait de métier pour rien au monde. C’est son frère aîné, qui était infirmier, qui l’a inspirée. 

 

Tout commence il y a 25 ans lorsqu’elle fait ses premiers pas à la Clinique Ferrière avec sœur Maguerite et feu Dr Mustun, ses modèles. Depuis, son amour pour son métier n’a cessé de grandir.  Depuis quelques années, elle évolue au sein du département de néonatalogie et de pédiatrie. Après avoir travaillé dans plusieurs unités, dont la salle 4, s’occuper des enfants s’est imposé à elle comme une évidence : «J’aime les enfants. Ils sont vulnérables et je sens qu’ils ont beaucoup plus besoin de nous.» 

 

Souvent comme une deuxième maman, elle est au chevet des grands prématurés qui passent des semaines, voire des mois à l’unité des soins intensifs, des bébés qui naissent avec de grandes infections ou malformations. Les soigner, les nourrir, les bercer, les voir prendre des forces et grandir petit à petit, ce sont là ses joies. «Nous prenons soin des bébés de 28 à 30 semaines. Chaque petite action doit être faite avec beaucoup de précautions et un immense amour. En parallèle, nous devons aussi être là pour les parents. Les soutenir et les encourager.»

 

«Une grande joie»

 

Marie-Ange Gungurum, qui a récemment reçu son diplôme après des études à la School of Nursing, se rappellera toujours ce petit garçon né à 800 g, dont ses collègues et elles s’étaient occupées. «Un jour, il est revenu nous voir. Il avait 11 ans et était devenu un beau garçon. Son papa était fier et nous disait qu’il participait à de nombreuses activités sportives. C’était une grande joie.» Malheureusement, il y a aussi des coups durs, des patients qu’on ne peut sauver. Même après des années de métier, il lui est difficile de s’habituer à la mort, surtout lorsqu’il s’agit d’un petit être. «Ce n’est pas facile à accepter même pour nous car on s’attache.»

 

Des relations spéciales avec leurs patients, Odile Ladouceur, 51 ans, et Randy Gopalla, 38 ans, de la clinique Fortis Darné en ont bâti plusieurs. Les années passant, ils ont développé une vraie proximité avec les réguliers, jusqu’à connaître leurs habitudes, leurs petites manies et leurs préférences. «C’est déjà arrivé qu’on nous appelle à 4 heures du matin pour nous demander conseil ou qu’on doive se rendre chez un patient parce qu’il a besoin de nous», confie Odile qui compte une quinzaine d’années d’expérience et qui seconde Randy Gopalla, Head Nurse.Ensemble, ils s’occupent non seulement de l’administration et de la formation mais doivent aussi, comme tous les autres infirmiers de l’établissement, faire au quotidien un certain nombre d’heures en salle. 

 

L’amour du métier est venu avec le temps. Les premiers jours avaient été tellement difficiles qu’à l’époque, Odile se demandait si elle tiendrait le coup. «Je n’avais aucune idée de ce que c’était que d’être nurse. Je me suis dit : “Mon Dieu, dans quel monde j’ai atterri.” En rentrant chez moi ce soir-là, je n’ai pas arrêté de pleurer.» Et puis, petit à petit, la passion a pris le dessus et s’est transformée en dévotion. «Il faut être à l’écoute, faire le patient sentir qu’il est important pour nous. La gentillesse et la politesse sont tout aussi essentielles.»

 

En 20 ans de service, Randy Gopalla a vu le métier changer de visage. Si ce n’était pas bien valorisé il y a encore quelques années, aujourd’hui, la profession demande de plus en plus un niveau académique exigeant. Après la School of Nursing à Candos, il a lui-même poursuivi ses études en Afrique du Sud et en Nouvelle-Zélande. Aujourd’hui, il complète sa maîtrise. Il a toutefois remarqué que le métier attire de moins en moins de jeunes. «La première image de l’infirmier, c’est qu’il doit donner les médicaments, enlever le vomi, changer le patient et lui donner le bain.» Se dévouer totalement au travail, note Odile, est aussi un problème pour les nouvelles recrues. «Si on leur dit de travailler 72 heures d’affilée, ils ne voudront pas. Je me souviens que pendant le cyclone Dina, on était restés à la clinique pendant trois jours. Et il fallait garder le sourire. Nous n’avions pas le choix mais nous le faisions aussi par devoir et conviction.»

 

Et de la conviction, souligne Randy Gopalla, il en faut pour faire ce métier. Au fil des années, il a appris à jongler avec les émotions qui arrivent parfois en cascade. «Vous êtes au deuxième étage et vous devez sympathiser au décès de quelqu’un. Au premier, c’est la maternité et vous sortez votre plus beau sourire. Vite, on vous appelle aux urgences et vous devez vous concentrer sur une victime d’accident.» Après toutes ces années, Randy et Odile ont vécu toutes sortes d’émotions, vu défiler devant eux toutes sortes de cas, des plus heureux aux plus critiques en passant par les plus dramatiques. Si Odile se souviendra toujours du premier patient qu’elle a perdu, Randy, lui, n’oublie jamais qu’il a dû réanimer son père en plein arrêt cardiaque. Dans ces cas, disent-ils, le travail et l’obligation de tout faire pour sauver une vie prennent toujours le dessus.