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Crèche de Quatre-Bornes : L’orphelinat de l’espoir

La crèche Cœur Immaculée de Marie existe depuis 73 ans. Les religieuses qui s’en occupent ont vu défiler sous leurs yeux des centaines d’enfants abandonnés ou retirés de leur famille pour leur sécurité. Incursion dans ce lieu rempli d’amour, qui fait chavirer les cœurs.

Ils ne sont pas nés sous une bonne étoile. Beaucoup ne connaissent pas leurs parents, ni d’où ils viennent. Ils n’ont pas de chambre à eux, ni de maison. La seule maison qu’ils connaissent et qui est la leur, c’est celle de la crèche Cœur Immaculée de Marie qui se trouve à Quatre-Bornes. Si beaucoup sont arrivés dans cet orphelinat peu après leur naissance, d’autres sont venus un peu plus grands. Séparés de leur famille biologique pour différentes raisons, c’est là, entourés d’autres enfants comme eux, qu’ils vivent leur enfance pas comme les autres. Pour les aimer, prendre soin d’eux et les protéger, elles sont quatre religieuses, des mamans de cœur, qui veillent au grain au bien-être de leurs petits. 

 

En cette période festive, l’ambiance à l’intérieur de la crèche est plus que jamais joviale. Dans le grand hall du foyer, un air de fête flotte dans l’atmosphère. Au milieu des cris et des rires, les enfants s’affairent autour du sapin de Noël qu’ils ont eux-mêmes décoré sous l’œil bienveillant de celles qui s’occupent d’eux au quotidien. Ils jouent et courent dans tous les sens. En ce moment, confie sœur Marie-Lourdes, la responsable des lieux, ils sont particulièrement joyeux et excités. «C’est la fête. Ils reçoivent des visites, des cadeaux. Ils sont heureux.»

 

Mettre un sourire sur ces visages et prendre soin d’eux le temps de leur passage à la crèche, c’est la mission de sœur Marie-Lourdes mais aussi celle des sœurs Suzy, Georgette et Marie-Helena, qui se consacrent entièrement à donner de l’amour et de l’attention à ces enfants qui n’ont d’autre choix que d’habiter cet orphelinat. Aujourd’hui, ils sont 27 au total à y vivre jusqu’à l’âge de 5 ans, avant d’aller vivre dans un autre foyer. S’il est de plus en plus rare que les parents viennent déposer les bébés à la naissance, c’est désormais la Child Development Unit (CDU) qui vient placer les enfants à l’orphelinat. 

 

Derrière chaque enfant, il y a toujours un récit triste et déchirant. On parle souvent d’une histoire d’abandon pour des raisons les unes plus complexes que les autres. Quelques fois pour des raisons de violence aussi. Alors, dès qu’ils arrivent à la crèche, les religieuses les couvrent d’amour et d’attention en essayant de leur offrir autant que possible une vie de famille saine et épanouie. «Tous les enfants sont des enfants de Dieu. Ici, nous vivons comme dans une famille. D’ailleurs, c’est notre famille. On leur donne de l’amour, de l’attention, une éducation et tout ce dont ils ont besoin», confie sœur Marie-Lourdes. 

 

Un lien d’affection

 

Cela fait un an que sœur Georgette de Madagascar vit à la crèche. Entre les bébés et les plus grands qui débordent d’énergie, il y a de quoi faire. «Ces enfants sont un cadeau. Je m’occupe d’eux, je les soutiens autant que possible. On joue ensemble. Le plus important, c’est de leur donner beaucoup d’amour car ils n’ont pas de parents à leurs côtés»,dit-elle. Sa vocation de religieuse a pris un nouveau sens depuis qu’elle est arrivée dans ce lieu rempli d’amour et de compassion. «Pour moi, c’est une manière de servir Dieu à travers ces petits êtres qui ne demandent qu’à aimer et être aimés. En tant que fille de Marie, c’est une mission extraordinaire qui me remplit de joie.»

 

Comme de vraies mamans, les religieuses s’évertuent, avec l’aide de plusieurs Care Givers, à prendre soin de ces bambins, les câliner, les doucher, les nourrir, leur apprendre à lire, les faire dormir, les conduire à l’école où ils fréquentent d’autres enfants. Elles sont les seules mamans que ces petits connaissent. Entre eux, existe un lien d’affection et de tendresse indéniable. Sœur Marie-Helena est la plus ancienne des lieux. «La crèche est ma maison depuis 1963», dit-elle avec un grain d’émotion dans la voix. À cette époque, c’était sa première mission en tant que religieuse. 

 

Depuis, elle y a fait plusieurs passages avant d’y revenir il y a quelques années. Dans sa mémoire, de nombreux souvenirs, plusieurs histoires et tellement d’enfants qui ont défilé sous ses yeux. «À l’époque, ça ne se passait pas comme aujourd’hui. Avoir un enfant hors mariage n’était pas permis. La fille ne sortait pas jusqu’à ce qu’elle accouche et les parents venaient déposer le bébé après la naissance. Je me souviens aussi d’une demoiselle qui travaillait avec nous et qui faisait le tour des hôpitaux pour voir les enfants pauvres et rejetés.»

 

En ce temps-là, se souvient sœur Marie-Helena, l’adoption n’avait rien à voir avec ce qui se passe aujourd’hui. Ainsi, beaucoup d’enfants mauriciens ont pu, à l’époque, être adoptés. Une chance, selon la religieuse. «Nous avons des enfants partout. En France, en Angleterre, en Australie, au Canada. Bref, aux quatre coins du monde.» Et lorsque, plus grands, ils reviennent avec leur famille sur les pas de leur enfance, souligne-t-elle, l’émotion est à son comble. «Nous sommes tellement heureuses de les revoir. Ça nous touche énormément. Il y a de belles réussites, des adultes qui ont fondé leur propre famille et qui reviennent là où ils ont grandi. Et les souvenirs remontent à la surface.»

 

Mais il y a aussi une autre raison à ce retour. Comme un besoin irrémédiable de connaître leur histoire, beaucoup cherchent à retrouver leurs parents biologiques dont les noms et l’adresse se trouvent sur les documents détenus par la crèche. «Ils ont besoin de savoir, de comprendre ce qui s’est passé et pourquoi ils ont grandi à la crèche et non pas avec leur famille. C’est un besoin vital pour eux.» Ce n’est qu’une fois au courant de la vérité qu’ils se sentent soulagés, comme libérés, et qu’ils peuvent avancer.