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Atelier Mo’zar : les mélodies de l’espoir

Les musiciens de l’Atelier Mo’Zar sont tout excités à l’idée de se produire à Cuba.

La musique, rempart contre l’exclusion sociale et outil d’intégration. Telle est la philosophie de l’Atelier Mo’Zar Espace Artistique, créé par le musicien José Thérèse. Vingt ans après sa création, les jeunes de cette école de musique s’apprêtent à participer à un grand festival de jazz à Cuba. Mais pour s’y rendre, ils ont besoin de financement, d’où leur appel aux Mauriciens.

Des notes de musique qui flottent dans l’air. Elles résonnent dans les rues. Elles retentissent dans les cœurs. Ici, à la cité de Roche-Bois, elles font partie du quotidien. À l’étage d’une maison située au cœur de ce faubourg longtemps écorché par les fléaux, Jazzy Christophe, 15 ans, Axel Hon Fat, 18 ans, Perouven Vencadachellum, 17 ans, et leurs amis, qui fréquentent l’Atelier Mo’Zar depuis l’enfance, se laissent porter par cet instrument qu’ils tiennent entre les mains sous les directives du trompettiste Philippe Thomas. Des notes de jazz et de rhythm and blues aux accords tellement locaux résonnent mais elles représentent bien plus que cela. Elles sont le symbole d’une jeunesse qui a décidé, grâce à la musique, de trouver sa voie. C’est là que L’Atelier Mo’Zar a pris naissance et continue depuis vingt ans à former à un art les jeunes souvent issus de milieux vulnérables. 

 

À l’époque, un homme avait tout compris. La musique est porteuse d’espoir et peut changer les choses. Pour aider les jeunes en perte de repères et aider sa communauté à avancer, José Thérèse avait imaginé cet espace artistique dont l’objectif était de transmettre, d’enseigner, de partager et de former. Avec la musique, il voulait leur apprendre à croire en eux et à travailler dur pour un meilleur demain. Plus de vingt ans après la création de cette école de musique et trois ans après la disparition de son fondateur, la philosophie de José Thérèse, elle, vit toujours et cela, en chaque enfant ou jeune qui, grâce à l’enseignement de l’Atelier Mo’Zar, s’éloigne de la rue et se retrouve avec de nouvelles perspectives d’avenir. 

 

Aujourd’hui, environ 80 élèves fréquentent cet espace artistique dédié à l’apprentissage de la musique. Des success stories, l’école en connaît aussi plusieurs et chaque jour, d’autres continuent de s’écrire. S’il y a quelques mois, une équipe de l’Atelier Mo’Zar s’est produite au carnaval de Tana, à Madagascar, aujourd’hui, des élèves se préparent à un grand événement qui devrait avoir lieu à la Havane, à Cuba, où ils doivent se produire le temps d’un grand festival international de jazz.

 

Un événement grandiose qui est prévu du 17 au 21 janvier prochain et pour lequel les jeunes musiciens de l’Atelier Mo’Zar ont besoin de soutien. Pour financer ce déplacement et puisqu’ils n’en ont pas les moyens, ils lancent un appel aux Mauriciens afin d’obtenir de l’aide et du soutien. Bien plus qu’un voyage, cette participation au Jazz Plaza International Festival est une fierté et un honneur qu’ils espèrent bien honorer. «Nous avons besoin d’environ Rs 3,5 millions pour financer ce projet. La troupe sera composée de 24 musiciens et de deux accompagnateurs. Une petite contribution de la part de chaque Mauricien peut vraiment aider ces enfants à réaliser leur rêve car, au final, c’est ça. Pour un enfant qui vient du ghetto et qui va participer à un tel festival, c’est la réalisation d’un rêve. Nous avons besoin de votre solidarité», souligne Clyde Augustin, président de l’Atelier Mo’Zar depuis deux ans. 

 

Manque de moyens financiers

 

Depuis qu’ils ont appris qu’ils allaient se produire à Cuba, l’excitation est à son comble. Alors que les moyens financiers font défaut, ils rivalisent d’idée pour récolter le plus de fonds possible (vous pouvez les contacter sur moxarespaceartistic@gmail.com ou faire un don au nom de Mo’zar Espace Artistique sur le numéro 03171061139 à la Bank One). S’ils organisent régulièrement des vide-greniers et envisagent de donner des représentations, ils comptent surtout sur la générosité des Mauriciens. Pour cela, l’Atelier Mo’Zar, dirigé par Valérie Lemaire, a lancé l’opération Les Petites Pièces de Cuba. L’idée, explique cette dernière, est que les Mauriciens leur offrent toutes les petites pièces qui traînent chez eux. 

 

D’ailleurs, le 21 novembre, souligne cette dernière, l’opération Les Petites Pièces de Cuba aura lieu au Caudan le temps d’une journée d’animation et d’hommage à José Thérèse. «Nous allons inaugurer une plaque commémorative en son honneur. Il y aura aussi de l’animation par les anciens et les élèves actuels de l’Atelier Mo’Zar.» La collecte sera aussi nationale car grâce au soutien de Bank One, des points de ramassage de pièces seront installés dans plusieurs endroits du pays. Un pari qui, espèrent-ils, saura toucher le cœur des Mauriciens. 

 

Car à Cuba, souligne Philippe Thomas, trompettiste de renom qui a repris la direction artistique de l’école, ce n’est pas uniquement l’Atelier Mo’Zar que ces jeunes iront représenter mais tout un pays. «Nous allons faire flotter notre quadricolore avec notre séga-jazz. C’est une grande fierté et ce serait super que ces jeunes puissent réaliser ce rêve.» 

 

La musique porte au-delà des frontières, Philippe Thomas y a toujours cru. Son histoire avec l’Atelier Mo’Zar a commencé il y a plusieurs années lorsque son ami, José Thérèse, lui demande de venir donner un coup de main pour apprendre aux jeunes de Roche-Bois et des environs à jouer de la musique. Depuis, il ne les a pas lâchés. Au fil des années, il a vu défiler devant lui bon nombre de talents, ceux qui ont pu décrocher une bourse grâce à leur talent, qui sont devenus de grands musiciens, qui sont partis à l’étranger se faire une carrière ou qui continuent ici, à Maurice, à faire la fierté de l’Atelier Mo’zar. 

 

Car ici règne une ambiance particulière. Lorsqu’il a découvert l’Atelier Mo’Zar à travers son fils qui y joue de la guitare, Clyde Augustin, journaliste de sport, y a trouvé bien plus qu’une école de musique. Il y a découvert, dit-il, une école de la vie où la musique devient magique et crée des liens entre ceux qui la partagent. Entre les murs de cette maison de Roche-Bois, l’esprit et la philosophie du musicien José Thérèse continuent de vivre, lui qui voulait offrir aux gens de la cité une porte de sortie, leur apprendre un métier pour qu’ils puissent devenir des professionnels et gagner leur vie dignement. «Pratiquer la musique vous apprend plusieurs choses. D’abord une discipline, ensuite la ponctualité mais aussi le respect des autres. Quand vous jouez en groupe, vous mettez le groupe en avant et pas uniquement vous. Cette école, c’est donner la chance à un enfant de se réaliser et de lui dire que même s’il n’est pas doué académiquement, il peut toujours réussir», lance Clyde Augustin. 

 

Réussir ? Hermans Pierre Louis, 24 ans, a longtemps été rempli de doutes avant de trouver sa vocation et son chemin. Lui qui est devenu malvoyant à l’âge de 14 ans est tombé sur un homme qui est devenu son mentor et qui lui a tout appris.«José Thérèse m’a donné la chance de ma vie. Il m’a appris qu’avec la musique, les gens pouvaient me respecter pour ce que j’étais et non pas avoir pitié de moi à cause de mon handicap.» Aujourd’hui guitariste solo et enseignant à l’Atelier Mo’Zar où il a lui-même fait ses premiers pas, il se dit heureux de pouvoir partager son savoir-faire et transmettre à ces adolescents l’esprit Mo’Zar. 

 

En ce moment d’ailleurs, les répétitions s’enchaînent pour pouvoir présenter un super spectacle à Cuba. «Ici, c’est l’amour fraternel. Nous sommes comme une famille et les liens qui nous unissent sont très forts. Ces jeunes ont commencé un cheminement vers un meilleur avenir. Au lieu de devenir dealer et jockey dans la rue, ils se produiront à la Havane, vous vous rendez compte ? Quelle fierté ! C’est la première fois qu’un groupe mauricien participera à ce festival avec des monstres du jazz comme Richard Bona et Marcus Miller.» C’est pourquoi, dit-il, ces jeunes, dont le talent ne ment pas, ont besoin du soutien de toute la population. 

 

Et puisqu’ils savent que l’art permet de franchir des frontières et d’offrir la richesse de l’âme et celle de la connaissance, ils espèrent que leur musique saura toucher le cœur des Mauriciens.