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Vote du mini-amendement : Et si ça ne changeait rien…

Les choses changeront-elles vraiment suite à l’adoption de ce projet de loi ? Pas forcément. Rezistans ek Alternativ et le Blok 104 en sont conscients…

Pour certains, il s’agit d’un moment historique. Pour d’autres, penser en ces termes est tout simplement dramatique. Le hic ? Le mini-amendement, qui a été voté le vendredi 11 juillet à l’Assemblée nationale, ne sert pas vraiment à grand-chose dans la pratique. Le Constitution (declaration of community, temporary provisions) Bill est – sur papier – porteur de changement. Mais si les politiciens ne jouent pas le jeu, il n’aura aucun – réel – effet thérapeutique sur le communalisme institutionnalisé. Et Pravind Jugnauth est le seul leader à avoir confié son intention de ne pas déclarer son appartenance ethnique pour les prochaines élections.

Navin Ramgoolam et Paul Bérenger – ainsi que leurs candidats aux prochaines législatives – ne se déclareront pas mauritians. Xavier Luc Duval et sa bande, ainsi que Cehl Meeah, ont ouvertement montré leur désapprobation quant au mini-amendement. D’ailleurs, Rama Sithanen, l’homme derrière cette loi, a invité les politiciens à décliner leur appartenance ethnique pour faciliter le travail de la commission électorale dans l’allocation des sièges de Best Losers. La rythmique de cette nouvelle loi est un peu fourvoyée. De quoi faire sourciller.

Malgré cet état de choses un peu pathétique, Rezistans ek Alternativ, à travers les voix de ses porte-parole, Ashok Subron et Ian Jacob, parle de «première concrétisation». En 2005, ce mouvement, en collaboration avec le Blok 104, avait lancé une procédure légale afin de contester l’obligation, pour tout candidat, d’indiquer son appartenance ethnique lors du Nomination Day. Après un recours auprès des Nations unies, cet organisme international avait estimé qu’il s’agissait d’une violation des droits fondamentaux de tout candidat en vertu de l’article 25 de l’International Covenant on Civil and Political Rights (ICCPR).

Un jugement qui poussait Maurice à prendre des mesures correctives. Alors, c’est une victoire dans le combat contre le communalisme pour le parti de gauche : «C’est une avancée démocratique pour l’émergence d’une citoyenneté mauricienne. C’est uniquement une petite poignée de conservateurs qui refusent de voir cette avancée. Sans le combat de Rezistans ek Alternativ et ses alliés, cet amendement n’aurait jamais été voté.» Néanmoins, le fait que la plupart des politiciens comptent décliner leur appartenance ethnique n’est pas du goût d’Ashok Subron : «C’est un double jeu. Nous le déplorons. Et nous invitons les Mauriciens à se rallier à notre cause.» L’heure n’est plus au désintéressement de la chose politique, mais à la mobilisation pour une île unie. Épique !

Tout ça a quelque chose d’utopique. Mais ce n’est pas grave, estime Karim Jaufeerally du Blok 104. Toutes les belles choses commencent par un rêve : «C’est une victoire dans un long combat. Nous avons d’autres batailles à mener. Ce n’est que le début. Il faut désormais un projet de réforme électorale qui tienne la route.» Et pour que ça se fasse, pour que les choses bougent, il faut que la population s’implique: «Nous allons faire campagne pour que la réforme soit une réalité. Et qu’elle soit discutée à tous les niveaux de la société.» Que des candidats déclarent leur communauté après l’adoption du mini-amendement, lors des prochaines élections, relève de «l’opportunisme politique» pour lui : «Ce n’est pas par conviction. C’est uniquement pour mettre toutes les chances de leur côté et pour bénéficier du Best Loser System.»

Un «non-event»

Pour lui, ceux qui vont s’accrocher à leur positionnement ethnique et stratégique «manquent un rendez-vous avec l’Histoire» ? : «L’Histoire va les juger. La population mauricienne aussi. Il est temps qu’elle dise ce qu’elle veut, ce qu’elle attend.» Et même s’il peut comprendre les peurs de certains – notamment celle de la communauté d’origine chinoise, cette semaine – de ne pas être représentés au Parlement, il estime qu’il est temps de réfléchir autrement. De sortir de la logique communale : «Nous sommes tellement habitués à réfléchir en termes de communauté que ça peut effrayer. C’est facile de penser qu’une protection est enlevée si on n’est pas représenté. Mais cette protection est illusoire. Dans un cadre démocratique, c’est toute la population qui est protégée. Un repli ethno-religieux n’est pas nécessaire.» À condition, bien sûr, que la façon de diriger et de faire de la politique change : «Il ne faut pas avoir peur du futur.» Pas de panique, donc !

Rajni Lallah, du mouvement Lalit, elle, s’inquiète : «Que dire sur ce mini-amendement ? Il ne veut rien dire. Le Best Loser System est toujours là. Ça démontre à quel point le problème a été contourné.» D’ailleurs, Alain Ah Vee estimait déjà, il y a quelque temps, que le combat de Rezistans ek Alternativ avait «limité» le travail pour se débarrasser du communalisme : «Il n’y a pas eu de grande mobilisation sur le terrain. À force d’attendre les décisions de justice, le travail anticommunal a été ralenti.» Pour Lalit, l’adoption du mini-amendement est simplement un non-event.

Paul Bérenger n’est pas – on n’en doute pas une seconde – de cet avis. Lors de son point de presse, hier, samedi 12 juillet, le leader d’une opposition un peu léthargique, s’est réjoui du vote du projet de loi et a remercié tous ceux qui ont voté pour son application : «Je tiens à féliciter le PTr, le MSM et le MMSD pour leur vote.» Hip, hip, hip, hourra ! Néanmoins, le chef de file des Mauves n’a pas manqué de fustiger le PMSD. Justement, Xavier Luc Duval a également pris la parole lors d’une conférence de presse, hier. Pour lui, il s’agit d’un amendement bancal. C’est en ces termes qu’il a expliqué le choix des députés de son parti de s’abstenir lors du vote : «Cette loi est un gimmick. Nous maintenons qu’un référendum est nécessaire.»

De son côté, le MSM est aussi revenu sur le vote du mini-amendement. Pravind Jugnauth a dit son agacement face à la décision de Navin Ramgoolam et de Paul Bérenger de déclarer leur appartenance communautaire : «La population tirera ses propres conclusions.» Lui a déjà pris sa décision. Et a choisi d’écrire son histoire, en lien avec celle de Maurice, en ne déclarant pas sa communauté lors du prochain Nomination Day.

 


Ça roucoule !

Et c’est reparti pour un tour. Attendez… Est-ce que c’était réellement «définitivement fini» (pour reprendre les propos de Paul Bérenger) pour commencer ? Vous avez la réponse, on n’en doute pas. Au Parlement, le vendredi 11 juillet, pour le vote du mini-amendement, Navin Ramgoolam n’avait d’yeux que pour son «kamarad Paul» (comme un remake de la séance du vendredi 4 juillet). «Personne ne devrait être surpris que les deux plus grands partis prennent des positions convergentes quand il s’agit d’intérêt national», devait-il déclarer, entre autres appels du pied.

De quoi faire brûler d’un feu plus fort encore les rumeurs qui parlent de rapprochement entre le PTr et le MMM. Paul Bérenger s’est exprimé sur ce point lors de sa conférence de presse, hier, samedi 12 juillet : «Je suis d’accord avec le PTr sur certains points. Mais une alliance n’est pas au programme. De toute façon, avant de parler d’alliance, il faudra passer pas les instances du MMM.» Paroles, paroles ? Avec les politiciens, il faut s’attendre à tout !
 


La loi est là

63 députés ont voté pour. Trois (ceux du PMSD) se sont abstenus. Deux étaient absents (Nando Bodha et Prithvirajsing Roopun du MSM). Et un (Cehl Meeah du FSM) s’est prononcé contre. Néanmoins, le Constitution (declaration of community, Temporary provisions) Bill est passé. Ce mini-amendement permet aux candidats de ne pas déclarer leur appartenance communale car il consistera à remplacer le mot «shall» par «may» dans l’article 3(1) de la première annexe de la Constitution. Néanmoins, selon la formule de Rama Sithanen, ces personnes ne pourront pas bénéficier des sièges alloués par le Best Loser System.

Navin Ramgoolam est venu de l’avant avec un amendement (qui a été voté), secondé par le leader de l’opposition, Paul Bérenger, afin de rassurer les Mauriciens d’origine chinoise. Si aucun membre de cette communauté n’est élu, un candidat qui en est issu, sera le premier Best Loser choisi. L’amendement de Xavier Luc Duval a lui été rejeté. Le leader du PMSD souhaitait qu’un référendum se fasse pour tout changement constitutionnel. Le chef du gouvernement a, lui, précisé que cette loi n’est applicable que pour les prochaines élections car, ensuite, il viendra de l’avant avec une réforme électorale. Il croit fermement en sa victoire ! Les travaux parlementaires reprendront le 22 juillet. Reste désormais à savoir si la dissolution du Parlement est à l’agenda pour accueillir des législatives anticipées. Paul Bérenger estime, lui, qu’il y aura un prochain gouvernement dans quelques semaines. C’est ce qu’il a déclaré lors de son point de presse, hier, samedi 12 juillet. Affaire à suivre.