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Une victime de violence conjugale assassinée par son époux : Le combat perdu d’Umawatee Somrah raconté par ses proches

Umawatee et son époux et meurtrier, Sudhir Somrah.

Durant 16 ans, elle a subi les coups d’un époux violent. Mais alors qu’elle pensait s’être libérée de son enfer et espérait donner un second départ à sa vie, Umawatee Somrah, aussi connue comme Anju, a été poignardée mortellement par son époux, contre lequel elle détenait un Protection Order et dont elle vivait séparée depuis peu. Partagée entre la tristesse et la rancœur, sa famille se confie…

Elle reprenait goût peu à peu à la vie. Tout juste libérée du calvaire qu’avait été sa vie de couple durant toutes ces années. Mariée à Sudhir Somrah pendant 16 ans, Umawatee Somrah, affectueusement surnommée Anju par son entourage, commençait à voir la lumière au bout du tunnel depuis que le tribunal lui avait accordé un Protection Order, il y a presque deux mois, contre son mari violent. Dans le même souffle, elle est partie du domicile conjugal avec ses quatre enfants pour aller louer une maison non loin de ses parents, à St-Rémy, Flacq. Mais son époux, plus enragé que jamais par sa tentative de se construire une vie loin de lui, a décidé d’y mettre fin.

 

Le dimanche 9 juillet, ce maçon de 38 ans l’a attendue chez elle avec un couteau à la main. Dès qu’elle a franchi le seuil de sa nouvelle maison, en rentrant d’une journée de travail au marché, il l’a enfermée dans une chambre et lui a asséné plusieurs coups de couteau au cœur et à l’abdomen, ne lui laissant aucune chance. 

 

Umawatee Somrah, 34 ans, n’a pas survécu. Une bonne partie de l’effroyable scène s’est déroulée sous le regard de deux de ses quatre enfants. Selon le rapport d’autopsie, elle a succombé à un «stab wound to the heart». L’arme du crime a été récupérée par les enquêteurs.

 

Sudhir a fait irruption par une fenêtre et a traîné son épouse de la cuisine jusqu’à la chambre à coucher où il l’a poignardée.

 

Ce drame est le tragique épilogue d’une non moins tragique vie de couple qui a duré 16 ans, selon les proches d’Umawatee Somrah. Une vie d’enfer que la jeune femme a subie jour après jour, coup après coup. Un véritable combat au quotidien face aux agressions verbales et physiques. 

 

Le cauchemar d’Umawatee a commencé lorsque ses proches ont accepté la demande en mariage qu’elle a reçue après que les membres de la famille de Sudhir l’ont aperçue aux fiançailles d’un proche. Après la noce, le couple s’installe à Terre-Rouge et Umawatee essaye tant bien que mal d’aimer ce mari qui la maltraite déjà. 

 

«Dès le départ, il a commencé à la battre. Elle avait consigné des plaintes contre lui et l’avait quitté à plusieurs reprises mais il réussissait à chaque fois à la convaincre qu’il changerait. Elle retirait alors sa plainte et repartait avec lui», raconte Manoj Kashinath, le frère de la victime.  Au fil des années, Umawatee met au monde trois fils et une fille et continue à subir la violence de son mari. «Sa belle-mère était au courant de la situation mais disait que c’était normal qu’une femme soit battue par son mari», avance notre interlocuteur. 

 

Rêves et espoirs

 

Pendant toutes ces années, Umawatee supporte et subit, surtout pour ses quatre enfants qu’elle ne veut pas voir grandir sans leur père. Au bout de quelque temps, afin que ses proches ne s’inquiètent pas, elle leur fait croire que Sudhir et elle ont trouvé un terrain d’entente. Elle apprend aussi à dissimuler les bleus qui lui couvrent le corps.

 

Aveuglés par l’apparente complicité du couple, les membres de la famille d’Umawatee se persuadent que tout va bien, qu’elle est heureuse. Jusqu’au jour où une énième dispute la pousse à fuir le toit conjugal. «L’an dernier, en février, elle a appelé mon père aux petites heures du matin. Elle lui a demandé de venir la récupérer parce que son époux menaçait de la tuer. Elle a laissé ses enfants avec lui et trouvé une maison de location à Flacq deux mois plus tard. Mais il a à nouveau prétendu qu’il changerait et a emménagé avec elle.» Une fois de plus, elle se voile la face, préférant penser que tout finira par s’arranger. «Elle nous a laissé croire que tout allait pour le mieux dans son couple», se désole Manoj.

 

Il y a environ deux mois, à nouveau victime d’actes de violence, Umawatee jette l’éponge. Elle prend son courage à deux mains et sort de son mutisme, espérant une vie plus heureuse pour ses enfants et elle. Elle porte plainte pour agression et son époux est emprisonné durant une semaine. Elle entame par la même occasion des démarches pour que son bourreau ne puisse plus s’approcher d’elle, déterminée à refaire sa vie. Elle s’installe avec ses quatre enfants dans une petite maison située à quelques mètres du domicile de ses parents, pensant qu’elle pourra désormais mener une vie tranquille. Mais les événements de ce dimanche 9 juillet fatidique ont mis fin à tous ses rêves et ses espoirs. 

 

Ce jour-là, Umawatee est au travail. Elle passe la journée au marché avec son père Dhaneshwar Kashinath pour l’aider à vendre ses légumes. «Elle était une battante et très débrouillarde. Elle avait trouvé un emploi dans un magasin et venait aussi m’aider au marché les dimanches pour subvenir aux besoins de ses enfants. Elle avait passé la journée avec moi au marché le jour où elle a été tuée», raconte Dhaneshwar, ému.

 

Enfants témoins

 

Sudhir, de son côté, se prépare à mettre ses menaces de mort à l’encontre de son épouse à exécution. Après avoir apporté des friandises à ses enfants alors qu’Umawatee est au travail, il gare sa moto à plusieurs mètres de la nouvelle maison de son épouse, puis il s’introduit dans la maison par une fenêtre et se cache dans un couloir menant à la chambre à coucher de celle-ci. En rentrant du travail, Umawatee se dirige vers la cuisine attenante au salon où se trouvent alors ses enfants âgés de 4, 5, 8 et 11 ans. C’est là que Sudhir lui tombe dessus et commence à l’agresser, puis la traîne jusqu’à sa chambre à coucher, qu’il ferme de l’intérieur pour terminer sa sale besogne. 

 

Les deux plus grands enfants du couple sont témoins d’une bonne partie de l’effroyable scène. Conscients que quelque chose de grave se passe, ils courent alerter les parents d’Umawatee. Le fils aîné est le premier arrivé sur place. «Il paniquait. Vu qu’il souffre d’asthme, il n’a pas été en mesure de leur expliquer ce qui se passait», souligne Manoj. Son jeune frère, qui lui emboîte le pas, leur dit alors que leur mère se fait agresser par leur père. «Ma mère et des proches ont couru chez elle et ont trouvé la porte de sa chambre à coucher fermée à clé. Des voisins ont dû intervenir pour l’enfoncer mais il était déjà trop tard. Umawatee, allongée sur le dos dans son lit, ne bougeait plus.» Sudhir, lui, gît à côté du lit. Après son acte atroce, il a tenté de se donner la mort en s’automutilant. 

 

Prémédité ?

 

Entre-temps, le Service d’Aide Médical Urgente (SAMU) et les services de police, alertés, arrivent sur place mais ne peuvent que constater le décès de la mère de famille. Ayant subi de graves blessures, Sudhir est conduit à l’hôpital de Flacq et y est admis aux soins intensifs. Après quelques jours, il a été transféré en salle car son état de santé s’est amélioré. Il comparaîtra en Cour lorsqu’il sera remis de ses blessures. 

 

Les proches d’Umawatee sont persuadés qu’il a prémédité le meurtre de celle-ci. «Nous avons vu l’arme du crime. Nous sommes convaincus que le couteau n’appartenait pas à Umawatee. Sudhir avait prémédité ce meurtre.» D’après eux, Sudhir n’a pas accepté que sa femme ait demandé un Protection Order contre lui et, par-dessus tout, ne supportait pas qu’elle l’ait quitté et mène une vie de femme indépendante – lui qui avait toujours refusé de la laisser travailler. 

 

C’est une famille meurtrie, rongée par le chagrin et la colère, mais surtout quatre enfants, à jamais marqués par l’effroyable tragédie qui les prive à jamais de leur mère, que laisse derrière elle Umawatee Somrah. Encore une victime de violence conjugale qui meurt sous les coups d’un mari bourreau.  

 


 

D’autres femmes martyres racontent leur calvaire

 

L’histoire d’Umawatee Somrah a suscité une vague d’indignation et de témoignages. En effet, plusieurs victimes de violences conjugales sont venues de l’avant cette semaine, notamment dans l’émission Enquête en Direct sur Radio One, animée par Finlay Salesse et Annabelle Savabaddy, touchant au cœur les auditeurs. 

 

Parmi, il y a les histoires tragiques d’Isabelle* et de Fatima*. La première nommée a quitté son compagnon violent il y a quelques mois. Mais celui-ci a pris son fils de 3 ans avec lui et ne veut pas le rendre à sa mère. Elle qui pensait vivre un conte de fées quand elle a rencontré cet homme il y a sept ans nage aujourd’hui en plein cauchemar. 

 

Possessif et d’une jalousie maladive, son concubin a fait de sa vie un enfer. «Je n’avais pas le droit de travailler, ni de me rendre à la boutique du coin. Si j’avais besoin de quelque chose, je devais le lui demander. Il m’était interdit de sortir sans lui ou d’avoir des amis et il avait des amis qui surveillaient mes moindres faits et gestes», raconte Isabelle. Un simple regard lancé par inadvertance à un étranger et elle pouvait se retrouver avec le nez cassé, un œil au beurre noir ou des bleus sur le corps.

 

Après une énième agression l’année dernière, Isabelle a décidé d’arrêter de subir les coups de son bourreau. La peur au ventre, elle lui a tenu tête, leur enfant en bas âge dans les bras. «Je lui ai dit qu’il était hors de question qu’il lève encore la main sur moi. Il m’a alors agrippé le bras et s’apprêtait à me tabasser. Heureusement, des voisins avaient entendu mes cris», relate-t-elle. Elle l’a quitté mais il a emmené leur fils avec lui, lui brisant le cœur «Il l’utilise comme monnaie d’échange pour arriver à ses fins. Je ne vois mon fils que quand il le dépose chez moi. Je sais que si je me rends chez lui pour le récupérer, il y a de fortes chances qu’il me roue de coups.» 

 

Son calvaire, Isabelle en a fait part aux autorités après beaucoup d’hésitations. Mais d’après elle, ces dernières semblent faire la sourde oreille. «Je me suis rendue au poste de police de ma localité à trois reprises pour savoir quoi faire pour bénéficier d’un Protection Orderet récupérer mon fils. Personne n’est jamais revenu vers moi.»Elle compte à présent se tourner vers la Police Family Protection Unit (PFPU) dans l’espoir que son cas soit enfin pris en considération. 

 

Fatima, quant à elle, a vécu un martyr entre les mains de son compagnon pendant huit longues années. Ce n’est qu’en février dernier qu’elle a rapporté le cas à la police. Lorsque son époux a appris qu’elle avait entamé des démarches auprès des autorités, il est entré dans une colère noire et l’a agressée de plus belle. Le fait que la Cour a approuvé sa demande pour l’obtention d’un Protection Order en juin ne semble avoir aucun effet sur son mari, a-t-elle confié sur les ondes de Radio One, mercredi, lorsqu’elle est intervenue dans l’émission Enquête en direct

 

Peu après son intervention, un groupe d’individus – qui seraient des proches de sa belle famille – ont débarqué à la radio et s’en sont pris au vigile. Ils auraient également proféré des menaces de mort à son encontre. Un suspect a été arrêté par la police dans le cadre de cette affaire.

 

(*Prénoms modifiés)