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Une adolescente perd son combat contre la leucémie : Le cri de douleur et de révolte des proches de Shristi, 15 ans

Elle avait été diagnostiquée en janvier 2016. Et pendant plus de deux ans, la jeune Shristi Dowlut s’est donné corps et âme dans sa bataille contre une leucémie lymphoblastique aiguë. Elle l’a malheureusement perdue le lundi 8 octobre. Et ses proches s’interrogent sur la responsabilité de l’oncologue dans ce décès. Terrassée par la douleur, sa famille se confie…

Elle était très jeune mais faisait preuve d’une force incroyable. À 15 ans, Shristi Dowlut se battait comme une lionne contre un cancer et avait une rage de vivre hors pair. Elle faisait de son mieux, témoignent ses proches, pour mener une vie normale malgré ses allers-retours à l’hôpital. Elle allait au collège, pratiquait des activités qui lui demandaient beaucoup d’énergie… Bref, elle avait appris à profiter au maximum des moindres moments où sa maladie ne prenait pas le dessus sur elle. Mais bien qu’elle ait combattu de toutes ses forces, l’adolescente a fini par succomber à la leucémie lymphoblastique aiguë qui la rongeait depuis plus de deux années. Elle est décédée le lundi 8 octobre. 

 

Pourtant, Shristi et sa famille avaient des raisons de penser qu’elle allait s’en sortir. Pour cause, son état de santé s’était stabilisé à plusieurs reprises. Se basant sur les résultats de ses examens médicaux, ils avaient même cru, par moments, que la jeune fille était définitivement sortie d’affaire. Il est vrai que ces derniers temps, la maladie était revenue de plus belle mais, comme cela avait été le cas auparavant, elle suivait un traitement intense. Comment expliquer alors que, cette fois-ci, elle n’ait pu aller mieux et qu’au contraire, elle ait fini par y laisser la vie ? Ses proches soupçonnent une négligence médicale de la part de l’oncologue qui soignait Shristi à l’hôpital de Candos. Ils comptent solliciter un avis juridique avant de consigner une plainte au Medical Council pour qu’une enquête soit initiée. Ils ne veulent pas, disent-ils, que d’autres malades subissent le même sort.

 

Le début du long et douloureux combat de Shristi remonte à janvier 2016 quand les premiers symptômes apparaissent. Étudiante à la MGSS de Flacq, l’adolescente ne s’inquiète pas en voyant l’apparition de plaques bleues sur son corps. Toutefois, les douleurs de plus en plus insoutenables qui la tenaillent l’inquiètent ainsi que ses parents. Ces derniers l’emmènent alors consulter un médecin à l’hôpital de Flacq. Peu de temps après, les résultats de ses tests sanguins tombent, indiquant que son taux de sang n’est pas dans les normes. Des examens plus poussés sont conduits et là, c’est le choc : l’adolescente apprend qu’elle souffre d’une leucémie lymphoblastique. Malgré le coup de massue, Shristi ne se laisse pas longtemps abattre et se lance immédiatement dans un combat acharné contre la maladie. Les séances de chimio couplées à sa soif de vivre sont concluantes. «Son corps a répondu positivement aux soins prodigués et son cancer a complètement disparu», se rappelle avec émotion sa tante Meda Harbilass, qui ne l’a pas lâchée tout au long de cette rude bataille.

 

Cependant, le soulagement de Shristi et de son entourage est de courte durée car en  janvier 2017, elle fait une rechute. «Sa leucémie est réapparue et elle a dû recommencer les traitements», raconte Meda. Les parents de l’adolescente décident cette fois d’avoir recours à un traitement en Inde. Elle s’envole pour ce pays en janvier et y subit des séances de chimio jusqu’en septembre. «Cela lui a demandé beaucoup de courage, surtout sur le plan émotionnel, car il s’agit d’un traitement très intense. En plus, elle perdait ses cheveux. Malgré tout, Shristi est toujours restée positive. Elle voulait à tout prix guérir.»

 

D’ailleurs, après huit mois sur un lit d’hôpital, la jeune fille a la joie d’apprendre que son état de santé s’est à nouveau stabilisé. «Les médecins l’ont informée qu’il lui faudrait éventuellement faire un suivi avec un médecin local à son retour à Maurice.» Comme elle se sent d’attaque, elle reprend le chemin de l’école, tout en bénéficiant d’un follow-up avec un oncologue à l’hôpital Victoria. Son courage et son acharnement forcent l’admiration.

 

Shristi caressait le rêve de devenir médecin ou avocate depuis son plus jeune âge et n’avait pas perdu de vue son objectif. «À son retour, elle s’est démenée afin de réussir à ses examens. Elle est même parvenue à obtenir la moyenne alors qu’elle avait raté pratiquement toutes ses classes. Elle a toujours été très déterminée», souligne Meda, avec beaucoup de nostalgie dans la voix. Durant une année supplémentaire, l’adolescente mène une vie quasi normale et s’adonne à ses passe-temps favoris – cyclisme, marche et escalade, entre autres –, avec le sentiment d’être complètement guérie.

 

«Traitement intense»

 

En août de cette année, un gros nuage noir réapparaît dans le ciel de Shristi. Des examens médicaux révèlent que la maladie, décidément tenace, est de retour. Cette mauvaise nouvelle la bouleverse terriblement, d’autant qu’elle apprend qu’elle doit avoir recours à des séances de chimiothérapie plus régulièrement. «C’était plus qu’elle ne pouvait le supporter. Ce traitement était si intense pour elle, tant sur le plan physique qu’émotionnel, qu’il lui a fallu du temps pour accepter d’y avoir à nouveau recours.»

 

Au fil des semaines, Shristi multiplie les allers-retours à l’hopital Victoria pour ses traitements car son état de santé s’est aggravé. «Elle a notamment dû changer de médicament pour que le médecin puisse voir comment elle réagissait. Malheureusement, lorsque son état se stabilisait, cela ne durait pas longtemps», confie sa tante. Au cours des deux derniers mois, elle avait deux séances de chimiothérapie par semaine et devait rester hospitalisée. «Sa mère et moi étions à son chevet à tour de rôle. Sa maman ne pouvait pas être là tous les jours car elle devait aussi s’occuper du petit frère et de la petite sœur de Shristi.»

 

La situation s’est compliquée, selon notre interlocutrice, lorsqu’il y a eu un souci entre les proches de l’adolescente et son médecin. «Un jour, alors que ce n’était pas prévu, le médecin nous a annoncé qu’il y aurait une séance de chimio dans les heures qui suivent. Shristi tenait à avoir sa maman à ses côtés dans ces moments-là, tellement c’était difficile à vivre. Nous avons donc demandé au médecin de remettre cela au lendemain, et il a fini par accepter. Toutefois, il a omis de nous informer que l’état de santé de Shristi était critique.»

 

Selon les proches de la jeune fille, le médecin n’était pas content qu’ils souhaitent reporter la séance de chimio. «Il a par la suite constamment repoussé celle-ci, sans aucune raison valable. Entre-temps, Shristi souffrait énormément. Ce n’est que cinq jours plus tard qu’elle a pu y avoir recours, après que nous ayons sollicité l’aide d’une radio privée.» Cette fois encore, l’état de santé de l’adolescente se stabilise mais cela ne dure pas. «Après une séance de chimio à haute dose dans les jours qui ont suivi, son état s’était détérioré. Nous nous demandons si le médecin ne lui a pas administré une dose inappropriée pour une fille de son âge. Cela a complètement affaibli son système immunitaire.»

 

Après cela, il était prévu que Shristi reste en observation pendant dix jours. «Le médecin voulait voir comment elle réagissait au traitement mais au bout des dix jours, elle est malheureusement décédée», relate sa tante avec tristesse et amertume. Même si Shristi a perdu sa guerre contre la maladie, sa famille, elle, compte continuer à se battre pour elle, pour que justice, dit-elle, lui soient rendue. «Il doit y avoir une justice. Si le système médical à Maurice n’est pas adapté pour ce type de maladie, d’autres options doivent être proposées aux patients. Nous ne voulons pas que d’autres familles subissent le même sort», lance, révoltée, Devika Harbilass, une autre tante de l’adolescente, rentrée du Canada pour apporter son soutien à la famille dans ce moment d’épreuve.

 

Le mardi 9 octobre, proches et amis de la jeune Shristi lui ont rendu un dernier et émouvant hommage. Elle qui avait toujours rêvé de voyager, s’est envolée vers les anges, laissant derrière elle une famille terrassée par la douleur.

 


 

Le ministère de la Santé : «Elle n’a pu bénéficier d’un traitement régulier…»

 

Le rapport détaillé du traitement qu’a reçu Shristi Dowlut à l’hôpital Victoria depuis qu’elle a été diagnostiquée, en janvier 2016, exonère visiblement son médecin traitant de tout blâme. C’est ce que nous apprend un préposé du ministère de la Santé. «Il est malheureux qu’une adolescente qui avait toute la vie devant elle ait perdu la vie. Mais le médecin n’est nullement responsable de son décès. Nous avons appris qu’à plusieurs reprises, depuis le début de son traitement, ses parents ont objecté à ce qu’elle ait recours à une chimiothérapie – qui est primordial pour ce type de maladie – malgré l’insistance du médecin. Vu qu’elle souffrait de leucémie et d’autres problèmes pathologiques, cela a contribué à la détérioration de son état de santé.»

 

Dans le rapport médical, Shristi Dowlut n’aurait pas été en mesure non plus de suivre son traitement comme elle le devait car «à de nombreuses reprises, ses parents l’ont fait sortir de l’hôpital en signant le Discharge Against Medical Advice (DAMA) Form, et parfois, également, sans le signer, pour la faire suivre des traitements à l’étranger ou la ramener à la maison. Elle n’a donc pu bénéficier d’un traitement régulier. Ce qui a joué un rôle déterminant sur sa santé».

 

Devant les allégations des proches de Shristi Dowlut selon lesquelles le médecin aurait reporté une séance de chimio à plusieurs reprises alors que son état de santé était critique, le préposé du ministère explique : «L’adolescente faisait partie des serious cases ; mais il n’est pas du devoir d’un parent de choisir la date à laquelle doit avoir lieu une chimiothérapie. Ils voulaient reporter son traitement au lendemain mais vu que la liste des patients souffrant de leucémie est longue, il a fallu que le médecin trouve une autre date.»

 

Notre interlocuteur lance un appel à la population afin qu’à l’avenir, les patients et leurs proches acceptent de suivre les directives du médecin et du personnel soignant de l’hôpital pour éviter que de tels drames se produisent à nouveau.