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Suttyhudeo Tengur : «Jouer avec les consommateurs, c’est jouer avec le feu»

Le panier de la ménagère est de plus en plus cher. Au moment où les prix de plusieurs denrées prennent l’ascenseur, le président de l’Association for the Protection of the Environment and Consumers estime qu’ «il y a une absence totale de contrôle de prix à tous les niveaux»…

Selon la Consumer Advocacy Platform, le panier de la ménagère est passé de Rs 4 678,35 à Rs 4 691 pour une famille de classe moyenne et de Rs 3 049,25 à Rs 3 063,70 pour une famille au bas de l’échelle. Quelles analyses faites-vous de ces chiffres ?

 

Le coût de la corbeille ménagère n’a jamais baissé malgré la baisse du prix de la farine ou des serviettes hygiéniques annoncée dans le dernier Budget présenté par Pravind Jugnauth. Il y a une absence totale de contrôle de prix à tous les niveaux et il n’y a aucune étude menée pour déterminer si ces décisions auront un impact sur le coût de la vie.

 

Nous avons toujours prôné une compétition plus saine entre les différents supermarchés et hypermarchés au profit des consommateurs. Le défunt Observatoire des Prix avait commencé un travail dans ce sens mais malheureusement, en raison du manque de vision des autorités, il a dû fermer boutique pour le grand plaisir de certains gros commerces. Nous avons toujours soutenu qu’en l’absence d’une révision et refonte des structures de prix entre les coûts (CAF) et le prix au détail, le petit consommateur fera toujours les frais de ce manque de vision et de l’incompétence des autorités concernées. Je vous donne un exemple : il n’y a pas longtemps, il y avait une pénurie de thé noir sur le marché. Aujourd’hui, la situation est retournée presque à la normale mais le prix du thé a pris l’ascenseur et le demi-kilo de thé noir est à Rs 130 ! Alors que le prix était moins de Rs 100 le demi-kilo !

 

Quel est votre avis sur les récentes hausses de prix de ces derniers temps. La cigarette, l’essence, la viande et les prix de plusieurs denrées de base ont pris l’ascenseur…

 

Étant non-fumeur, je ne vais pas défendre le prix de la cigarette mais il y a eu des augmentations qui ne sont certainement pas justifiées. Je n’ai pas compris la décision du gouvernement d’augmenter le prix de l’essence et du diesel par au moins deux roupies le litre alors que le prix du pétrole sur le marché mondial gravite autour de $ 50 le baril ; ce qui est considéré très bas par rapport aux années précédentes. Dans cette liste de coût élevé de pétrole, le pays se retrouve parmi les pays où le pétrole est très cher à $ 1,25 le litre (Rs 44,70). Cela dit, la décision du gouvernement est irrationnelle car si l’on voit la liste des taxes frappant les produits pétroliers, on aura le choc de sa vie et cela est suivi par une surtaxe de 15 % de la TVA.

 

Pour le reste, en ce qu’il s’agit du riz basmati ou encore des grains secs qui sont les denrées de base de la classe moyenne, je me demande si le ministère concerné assume pleinement son rôle ou se laisse guider par certains gros importateurs. Les prix vont encore grimper car ce sont les grossistes qui appliquent des frais administratifs exorbitants. Et cela ne fait que gonfler les prix des denrées de base. C’est pourquoi je me bats pour que le gouvernement entreprenne une étude sérieuse sur la structure des prix pratiquée à Maurice. Et aussi, pourquoi ne pas appliquer la TVA sur le prix à l’arrivée des marchandises à Port-Louis ?

 

Les prix du beurre, des céréales, des nouilles ou encore des serviettes hygiéniques devraient aussi connaître une hausse. Qu’est-ce que cela va entraîner selon vous ?

 

Cette cascade de hausses de prix va certainement entraîner une grosse frustration parmi les consommateurs qui verront leur portefeuille se rétrécir davantage. C’est pourquoi je vous disais que les autorités devraient assumer leurs responsabilités car il ne faut pas oublier que les consommateurs constituent la base électorale de tout parti politique. Jouer avec les consommateurs, c’est jouer avec le feu. Les gouvernements précédents dans leur arrogance l’ont certainement appris à leurs dépens. à quelque 30 mois des prochaines législatives, le gouvernement doit faire attention, sinon… 

 

Qu’est-ce que ces hausses représentent pour les consommateurs ?

 

Ces hausses sont égales à un resserrement de la ceinture du moyen et du petit peuple. Plus le coût de la vie augmente, plus il devient difficile pour ceux au bas de l’échelle de joindre les deux bouts. Quitte à faire des sacrifices et se priver de certains privilèges sociaux. Et cela n’arrange en rien le bien-être de la famille au risque de devenir révoltant car le petit peuple ne pourra plus se payer certains luxes dont une tablette de chocolat pour les enfants, qui va coûter les yeux de la tête. Le retour de la manivelle politique sera très dur pour les autorités.

 

Qu’est-ce qui explique, selon vous,  ces hausses de prix ?

 

Il ne faut pas tout mettre dans le même panier. La hausse de prix des carburants est totalement injustifiée car le prix du baril de pétrole se situe encore autour de $ 50 pour les récents mois. Alors pourquoi une hausse ? Cela dit, dans les différentes taxes sur le carburant – essence et diesel compris, – on note l’absence du Build Mauritius Fund. Et qui est remplacé par une autre taxe qui sera versée au Consolidated Fund. Cela entraînera un surplus de revenus pour l’État, rien que pour apporter un rééquilibrage budgétaire alors que les revenus actuels de l’état sont déficitaires. Bravo à Manraj et autres. 

 

Croyez-vous qu’il y aurait d’autres augmentations ?

 

En l’absence d’un contrôle de prix, avec la libéralisation du commerce international, le gouvernement ne joue pas son rôle de manière effective. La Consumer Protection Unit devrait être plus musclée pour sévir effectivement contre les commerçants sans scrupules qui ne respectent pas le «mark up» sur les produits qu’ils vendent. Et il ne faut pas cibler uniquement les petites boutiques du coin. Il faut sévir surtout contre les supermarchés et autres hypermarchés, afin de voir si les prix promotionnels et ceux qui sont rayés pour accrocher les consommateurs sont conformes à ceux qui existaient auparavant car il y a des risques que ces prix soient tronqués.

 

Est-ce qu’il y a un moyen d’éviter cela ?

 

Il y a un gros travail à faire et le gouvernement devra mettre en place les moyens pour assurer une protection digne de ce nom aux consommateurs. Et non pas seulement comme le dit l’anglais, «pay a lip service» et emberlificoter le peuple. Il faut que le ministre de la Protection des consommateurs sorte de son ivresse du pouvoir pour être plus à l’écoute de ce qui se passe dans le tréfonds du pays. Sinon, l’avenir pour le régime en place s’annonce difficile en attendant l’échéance de 2019.

 

Les boulangers réclament une augmentation du prix du pain. Pensez-vous que c’est justifié ?

 

Certainement pas ! Avec la pression populaire, le ministre de tutelle a eu enfin la sagesse de dire non aux lobbies des boulangers. Il ne faut pas oublier que les boulangers ont bénéficié d’une baisse de prix de la farine lors du dernier exercice budgétaire et encore, ils utilisent la farine qui bénéficie des subsides de l’état – donc doublement bénéficiaires. Ces subsides, il faut le rappeler, sortent des poches des automobilistes et autres usagers de la route qui contribuent sous forme de taxation à l’essence et au diesel fixé par l’état. Donc, il ne faut pas prendre la population pour une bande d’imbéciles. C’est la taxe prélevée sur l’essence et le diesel qui sert à accorder des subsides pour maintenir le prix de la farine et du riz rasion. C’est l’argent du peuple qui est une ristourne vers le peuple. 

 

Bio express

 

Suttyhudeo Tengur, président de l’Association for the Protection of the Environment and Consumers, est aussi actif dans le domaine de l’éducation. Également actif dans le domaine coopératif, il est actuellement président de la Government Hindi Teachers’ Union et de la Vani Printing Cooperative Society Ltd. Il occupe le poste de secrétaire à la Primary School Teachers’ Cooperative Credit Union et à la Camp Thorel Multipurpose Cooperative Sty Ltd.