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Steward Gandoo tabassé à mort pour un vol de letchis | Sa compagne Stéphanie : «Mon fils ne connaîtra jamais son père»

Les suspects lors de leur comparution en cour.

Il allait être père pour la première fois dans quelques jours. Hélas, l’homme de 37 ans ne connaîtra jamais ce bonheur. Cet habitant de Cité Sadally a été mortellement agressé par plusieurs personnes pour avoir volé des letchis.

Le visage empreint d’une immense tristesse. Les yeux cernés et gonflés tant elle a pleuré et n’a pas dormi ces derniers jours. Stéphanie, 24 ans, semble abasourdie de chagrin en ce jeudi 19 janvier. Jour où nous la rencontrons. Alors que les dernières lueurs du jour disparaissent dans le ciel de Floréal, la jeune femme nous confie, d’une voix  à peine audible, que son monde s’est effondré deux jours plus tôt. 

 

Alors que son compagnon et elle se faisaient une joie d’accueillir leur bébé dans quelques semaines (rendez-vous avait été pris le 14 février), un drame s’est invité dans leur vie. Le mardi 17 janvier, son compagnon Steward Gandoo, 37 ans, est décédé d’une septicémie aux petites heures du matin, à l’hôpital de Candos. Il avait été admis dans cet établissement avec plusieurs blessures et fractures après avoir été sauvagement agressé par un groupe de personnes quelques jours plus tôt, soit le vendredi 13 janvier. Le motif : il avait été surpris volant des letchis dans une cour à Solférino, Vacoas. Cinq suspects ont été arrêtés et inculpés provisoirement pour assassinat (voir hors-texte)

 

Pour Stéphanie, la vie s’est arrêtée depuis la fin tragique de son compagnon dans des circonstances qu’elle a du mal à comprendre et à admettre. «Zot inn tir so lavi akoz inpe letsi. So de lame ek so de lipie ti kase. Ki kantite bate linn gagne pu linn kapav mor ? Mo dakor linn kokin letsi dan enn lakour me li enn imin li osi. Li pa merit mor kumsa», s’insurge Stéphanie, la voix brisée par l’émotion. 

 

À son chagrin et sa révolte se mêle un grand regret. «Le pire, c’est que mon fils ne connaîtra jamais son père. Nous n’avions même pas encore choisi de prénom pour notre enfant. Steward attendait la naissance», confie-t-elle, les larmes aux yeux.

 

Elle a fait la connaissance de Steward, raconte-t-elle, il y a deux ans. À l’époque, le jeune homme venait de rentrer d’Italie où il avait passé cinq ans aux côtés de sa mère Josiane et d’une de ses sœurs. Il est le dernier d’une famille de quatre enfants et a une autre sœur qui vit en Allemagne et un frère qui habite à Albion. Après la séparation de ses parents, quand il a 7 ans, sa mère part vivre en Italie et son père refait sa vie. Lui est confié à sa grand-mère paternelle qui vit à Cité Sadally. Il arrête sa scolarité très tôt et vivote. Des années plus tard, il rejoint sa mère en Italie puis revient vivre chez sa grand-mère paternelle cinq ans plus tard. Les proches de sa mère habitent, eux, à Cité Barkly. 

 

Il n’était pas méchant

 

Au début de leur relation, Stéphanie et Steward vivaient chez les parents de la jeune femme. Mais ils ne vivent plus ensemble depuis juillet dernier. Leur dernière rencontre remonte au 1er janvier. «Li pa ti pe vinn get mwa ni telefonn mwa souvan me li ti fini dir mwa li pu deklar so zanfan. Li ti mari kontan pu vinn papa pu premie fwa.»

 

Elle admet que son compagnon n’était pas irréprochable mais affirme qu’il n’était pas méchant. «Steward a déjà été arrêté pour des affaires de vol et a même dû payer une amende pour un cas récemment. Mais il n’était pas un mauvais garçon. Il a eu une enfance difficile et s’est toujours laissé influencer par ses amis. Il collectionnait des petits boulots et, entre autres, il vendait des fruits pour gagner des sous. An tou ka, fason linn perdi so lavi revoltan», martèle Stéphanie.

 

C’est aussi ce que pense Jean-Paul Baichoo, le frère de Steward. C’est d’ailleurs lui qui a été alerté en premier de l’agression de celui-ci.  Il a reçu un appel de quelqu’un, le samedi 14 janvier vers 6 heures, pour lui dire que son frère se trouve à Trois Mamelles dans un état grave. Sur place, il a effectivement retrouvé Steward avec plusieurs blessures sur le corps. Le jeune homme a ensuite été transporté à l’hôpital où, après avoir reçu les premiers soins, il s’est confié à son frère Jean-Paul. 

 

«Il n’est un secret pour personne que mon frère avait un casier judiciaire. Il lui arrivait de voler mais ce n’était pas une raison pour le tabasser à mort. Il m’a dit qu’il s’était arrêté à Solférino pour cueillir une grappe de letchis d’une branche qui pendait dans la rue. Il venait de soulever le filet protecteur lorsqu’il a été agressé.»

 

Cet homme de 38 ans avance que son frère a vécu un véritable calvaire entre les mains de ses agresseurs : «On l’a d’abord agressé dans la rue avec des morceaux de bois. Après, ses assaillants l’ont traîné à l’intérieur de la cour du propriétaire de l’arbre de letchis et ont continué à le battre. Dans la cour, il y avait deux 4x4 et huit personnes. Celles-ci ont mis sa bicyclette dans le caisson du 4x4 et l’ont obligé à y entrer aussi. Zot inn met enn bal lor so latet pu li pa trouve kot pe amenn li.»

 

Jean-Paul Baichoo est plus que révolté par toute cette affaire : «Mon frère a subi la pire des humiliations. Ses agresseurs l’ont forcé à se mettre nu. Ils lui avaient déjà brisé les jambes et les bras avant de prendre la route pour Trois Mamelles. Une personne a tenté d’intervenir mais ils ont refusé de confier mon frère à la police. Sur place, ils l’ont encore tabassé avant de le livrer à son triste sort vers 18 heures.» 

 

«Il a dû ramper»

 

Steward Gandoo est resté sur place presque toute la nuit avant de trouver du secours. «Il a dû ramper jusqu’à la route principale où il a finalement rencontré une personne qui se rendait à son travail. C’est ce bon samaritain qui m’a ensuite téléphoné. Il lui avait également donné de quoi se vêtir avant qu’il ne soit transporté à l’hôpital où il a malheureusement rendu l’âme trois jours plus tard.»

 

Depuis, Jean-Paul Baichoo ne décolère pas : «Ces gens auraient dû faire appel à la police. Ils n’auraient pas dû prendre la loi entre leurs mains. La loi n’est pas assez sévère à Maurice. C’est pour cette raison que des gens font ce qu’ils veulent.»

 

Les funérailles de Steward Gandoo ont eu lieu à la chapelle de St-Jean-Bosco, Floréal, hier. Sa mère Josiane et ses sœurs ont fait le déplacement pour l’occasion. Le 6 janvier, après quelques semaines de vacances à Maurice, sa mère venait de regagner l’Italie où elle vit depuis plus de 30 ans. C’est en larmes qu’elle est revenue pour rendre un dernier hommage poignant à son fils, entourée de ses autres proches, dont la compagne de son fils qui accouchera bientôt.

 


 

Cinq suspects arrêtés pour assassinat

 

La police n’a pas tardé à procéder à l’arrestation de cinq suspects après le décès de Steward Gandoo. Il s’agit de Joe Peermamode, un vigile de 48 ans, Rishi Dookhee, 36 ans, et Dilraj Sharma Sreeneebus, 25 ans, des habitants de Camp-Fouquereaux, Nitishsingh Ramgoolam, 35 ans, et Hoodesh Ramgoolam, 31 ans, deux habitants de Trèfles. Ils sont tous accusés provisoirement d’assassinat. La police a objecté à leur libération sous caution. Ils ont été reconduits en cellule policière jusqu’au jeudi 

 

26 janvier. Selon une source policière, Joe Peermamode a déjà avoué les faits. C’est d’ailleurs sur la base de ses aveux que la police a pu procéder à l’arrestation des autres suspects. Joe Peermamode explique que les trois arbres à letchis dans la cour en question ont été vendus à un particulier. C’est ce dernier qui l’a engagé comme vigile. Il a surpris Steward Gandoo en plein vol et a fait appel à son patron pour qu’on donne à celui-ci une correction qui s’est révélé fatale pour lui.