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Retour sur les lieux un an plus tard : La sécurité en mer laisse toujours à désirer

Les infractions à la sécurité se passent sous les yeux des officiers de la garde-côte nationale.

Un an après la tragédie de Grande-Rivière-Sud-Est, les opérateurs touristiques engagés dans les activités nautiques sont-ils davantage préparés à affronter le danger à n’importe quel moment ? Respectent-ils les normes de sécurité en mer afin d’éviter des drames humains ? Les gardes-côtes font-ils assez attention ? Pour répondre à ces questions, nous avons fait le trajet de Trou-d’Eau-Douce/Île-aux-Cerfs/Îlot Mangenie à la cascade de Grande-Rivière-Sud-Est en bateau.

Il est 10 heures en ce jeudi 8 juin. Ce jour-là est commémoré un triste événement. Il y a un an jour pour jour, le LUV chavirait dans les eaux boueuses non loin de la cascade de Grande-Rivière-Sud-Est(GRSE). Lorsque nous arrivons à Trou-d’Eau-Douce, dans l’Est, le soleil n’est pas au rendez-vous et la mer, plutôt déchaînée, nous donne déjà le haut-le-cœur. Un petit coup d’œil sur la page météorologique de Maurice et tout de suite nous voyons l’interdiction des sorties en haute mer émise ce jour-là. 

 

Cela nous pousse à nous interroger sur la présence des pêcheurs de touristes dont le seul but semble être de remplir leurs barques pour une traversée entre Île-aux-Cerfs/Îlot Mangenie et la cascade de GRSE. Mais outre les «canvasseurs», il y a des opérateurs touristiques dûment enregistrés auprès des autorités concernées qui sont dans la course. Et  visiblement, nul ne compte prendre en considération les décisions prises face aux conditions météorologiques du jour. 

 

Les touristes ainsi que quelques Mauriciens ne semblent pas non plus avoir consulté la météo avant cette sortie en mer. L’un d’eux nous répond : «Nous ne sommes pas inquiets. Tout va bien se passer», en joignant les deux mains et en levant les yeux vers le ciel comme pour dire que tout est entre les mains du Très-Haut. Quoi qu’il en soit, nous embarquons aux alentours de 10h30 en compagnie de deux couples d’étrangers. à bord, pas de signe de gilets de sauvetage. «Il y a des gilets à bord», nous lance alors le skipper que nous appellerons Jeremy*. Mais on ne les verra pas. Le skipper ne nous proposera même pas de les enfiler pour notre sécurité. Pas de briefing non plus sur ce qu’on peut ou ne peut pas faire lorsqu’on est sur une embarcation. 

 

Panne de bateau

 

à peine 5 minutes en mer, nous voilà face à une panne de bateau. Le skipper, qui est le seul à garder son sang-froid, essaie de maîtriser la situation. «Lesans pa pe mont dan moter», avance-t-il après avoir quitté son poste pour analyser la situation. Entre-temps, avec personne à la commande, le bateau n’arrête pas de tanguer. «Un câble est abîmé. C’est pour
cela qu’on a du mal à avancer»
, lâche Jeremy, avant d’expliquer que le problème sera vite réglé une fois sur l’île. Avec la peur au ventre, nous arrivons sains et saufs à notre première destination après trois arrêts en pleine mer. 

 

Sur place, nous rencontrons Laval Munisawmy, qui opère un petit business de Waterbuggy. Cela fait huit ans qu’il fait ce métier, dit-il. «Les Waterbuggypeuvent accueillir trois personnes. Avant de commencer les activités, on explique aux clients les précautions à prendre avant de leur donner des gilets de sauvetage. Ensuite, je surveille les activités sur un security boatet le périmètre dans lequel ils ont le droit de pratiquer», souligne Laval. Son voisin Pascal Yencana, engagé dans des activités nautiques comme la bouée, la «banane» et le sky nautique, entre autres, explique, lui, que chaque opérateur doit d’abord avoir son first-aid kit et des équipements en bon état. 

 

«Il est aussi de notre devoir de bien informer le client avant toute activité. Mais on constate qu’il y a certains qui mettent leur vie en danger et qui ne respectent pas les consignes une fois les activités lancées», regrette-t-il. Alors que c’est motus et bouche cousue chez ceux engagés dans les activités de parasailing

 

à midi, nous embarquons pour la deuxième fois avant de prendre la direction de l’Îlot Mangenie. Y a-t-il des gilets à bord ? à cette question, le skipper chargé de notre traversée répond : «Zile ? Ki pou fer ar sa ? Pe al lamem la sa.» Alors qu’il est rejoint dans ses propos par d’autres skippers debout sur une plate-forme face à la mer. Warren Jhurry, 19 ans, qui était à bord de cette embarcation, crie son étonnement. «Je suis un habitué. Mais pour ceux qui ne savent pas nager, on aurait dû leur proposer de porter le gilet. Il n’y avait même pas de gilets sur le bateau, c’est grave», dit-il. 

 

Daleen, une Sud-africaine et professeur de natation, avance que dans son pays, les autorités sont sévères et prennent des sanctions si les normes de sécurité ne sont pas respectées à bord. «C’est grave car un malheur peut frapper à tout moment. Les passagers à bord étaient inquiets car il n’y avait pas de gilets. Ils doivent prévoir tout cela.» Jennyfer, une touriste allemande, abonde dans le même sens. Cette habituée de Maurice avance qu’elle en est à sa deuxième visite à l’Île-aux-Cerfs. «Et pour la deuxième fois, on ne m’a jamais invité à porter un gilet.» Quoi qu’il en soit, ce jour-là, aucun des passagers que nous avons croisés sur les différentes embarcations ne portaient de gilets de sauvetage. 

 

Outre l’absence des gilets, certains s’amusent à jouer à Fast and Furious en mer et d’autres embarquent plus de passagers que le bateau ne peut réellement en contenir. Tout cela se passe hélas sous les yeux des gardes-côtes qui patrouillent dans ces eaux où plane le triste drame du 8 juin 2016. Et en ce jeudi 8 juin, le LUV est là, amarré en face du lieu du drame, alors que la cascade, elle, déverse une eau boueuse due aux récentes averses.