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Réouverture de la route de Macondé : Au bonheur des habitants

Marie-Noëlle Souci et sa belle-sœur Marie-Claire attendaient ce moment avec impatience.

Ils sont soulagés. Même si certains sont un peu inquiets. En tout cas, ils ne perdront plus leur temps dans d’interminables trajets en passant par Chamarel… Ils poussent un «ouf» de soulagement.

Elle descend du bus. Et elle a le sourire aux lèvres. C’est vrai, la journée de travail est terminée. Et, pour la première fois depuis trois mois, elle n’a pas eu besoin de faire un long détour sur un chemin dont la succession de virages serrés lui faisait un peu peur. «J’avais toujours mon chapelet en main», confie Marie-Noëlle Souci. Elle est femme de ménage dans un village voisin et emprunte la même route deux fois par jour. Ces dernières semaines avaient des allures de cauchemar pour la mère de famille qui habite Baie-du-Cap. Depuis qu’un rocher d’environ quatre tonnes était tombé sur la route de Macondé, les autorités avaient décidé de la fermer. Du coup, elle et les nombreux habitants qui empruntaient ce bout d’asphalte, niché entre une falaise et la mer, devaient prendre un long chemin tortueux pour arriver à destination.

 

Mais depuis le mardi 15 juillet, un nouveau vent de liberté souffle sur ces régions. Ce chemin du sud de l’île est de nouveau opérationnel. Les autorités ont visiblement sécurisé cette route et ont décidé de la rouvrir alors que les travaux se poursuivent (voir hors-texte). Plus de navettes à prendre et plus d’autobus à attendre pendant des heures. Il ne faut plus se réveiller plus tôt et subir un rush du matin encore plus intensif. Ou alors rentrer encore plus tard, le soir. Ça fait du bien ! Marie-Noëlle en est consciente : «On me demande si je vais aller à la fête de Sainte-Anne. Et là, je dis ‘‘non’’ ! Je ne veux plus passer par Chamarel. C’était trop.»

 

Être debout dans des autobus surchargés, s’accrocher pour ne pas tomber dans chaque tournant, se calmer pour ne pas rendre son petit déjeuner… Les souvenirs ne sont pas très sympathiques : «Je ne mangeais même plus le matin.» Sa belle-sœur, Marie-Claire Souci, comprend tout à fait ce qu’elle dit : «On est contents, oui. Mais le stress et l’air de Chamarel sont toujours un peu avec nous.» Des réveils à 5h30 au lieu de 6h30, des journées encore plus longues et fatigantes ; elle avait sa dose ! Celle qui, en début d’après-midi, passe un coup de balai, s’inquiète néanmoins un peu.

 

Danger ou pas ?

 

Et si une roche leur tombait sur la tête ? La question ne peut qu’être posée : «Je n’ai pas vu de filet. Je trouve ça un peu dérangeant. Comment être sûr que tout va bien ?» Une interrogation qui ne hante pas les nuits de Patrick Louise, pêcheur : «C’est aux autorités de savoir s’il y a danger ou pas. Si elles estiment que c’est bon, c’est que ça doit l’être.» Sur la plage, il travaille sur une pirogue avec un ami. Là où la mer, un peu houleuse en cette fin de matinée, hésite à mordre ou à caresser le rivage. Le vent fait danser les feuilles sur les arbres qui s’amusent dans un bruissement joyeux.

 

Dans l’air, un parfum iodé appelle à l’apaisement. Le village de Baie-du-Cap se laisse vivre. Patrick aussi. D’ailleurs, il ne prend le bus que trois ou quatre fois par mois et ne va pas très loin. Néanmoins, il sait que ces dernières semaines n’ont pas été évidentes pour ceux qui devaient aller travailler ou à l’école ailleurs. Kevin Pandoo, qui travaille au Saint-Régis, ne le contredira pas : «C’était très fatigant. Et le soir, pour rentrer, je trouvais que la route était très dangereuse. On avait l’impression de faire deux journées de travail en une.» Il sait que plusieurs villages respirent depuis mardi : «Nous étions coupés du monde pendant trois mois. C’était dur. Surtout pour les écoliers et les collégiens qui devaient passer leurs examens.»

 

Il est vrai que la fermeture de la route a provoqué une vague de mécontentements. Les détours et les navettes à attendre n’étaient pas juste une question de perte de temps pour les habitants de plusieurs localités (de Baie-du-Cap, bien sûr, mais aussi de Surinam, Chamouny, Chemin-Grenier, Rivière-des-Galets et Bel-Ombre). Ils devaient réaménager toute leur vie afin de pouvoir continuer à mener une existence plus ou moins normale. Un chamboulement profond et ils sont contents d’en voir la fin.

 

Nitish Sunasee espère désormais que son village retrouvera ses couleurs d’avant. Avec les nombreux passages de touristes et de visiteurs : «Il faut que les gens reviennent maintenant. Mais je me dis qu’ils vont penser que la route est toujours fermée.» Ça fait trop longtemps, estime-t-il, que la route principale du village est silencieuse. Et ça ne l’arrange pas. Nitish est propriétaire d’un petit restaurant, le MoFilaos, qui se trouve à l’entrée du village, et les affaires ont connu une chute de 75 % à 80 %, estime-t-il.

 

Les roches qui tombent à Macondé, ce n’est pas bon pour le business ! Néanmoins, il se dit que les choses iront en s’améliorant. Il en est persuadé : «Il faudra un peu de temps. Mais je me dis que tout retournera bientôt à la normale.» Il a hâte de voir de nombreux visiteurs descendre des taxis et des bus. Avec le sourire aux lèvres.

 


 

Sur la route…

 

Elle a toujours été belle. Comme suspendue entre deux mondes. Cette route appelle à l’évasion et aux balades avec les proches. Et, malgré les travaux qui y ont lieu actuellement, il n’est pas si difficile de fermer son cœur aux bruits des machines pour ne retenir que ceux du vent et des vagues qui s’entremêlent. Si la route de Macondé a été rouverte, on y travaille toujours ; il est question d’élargir la route afin de protéger les véhicules et les passants d’éventuels éboulis. Ces travaux d’agrandissement devraient prendre fin dans trois ou quatre mois.

 

Il suffit de grimper les marches qui mènent à un point d’observation qui se trouve sur ce chemin, pour voir l’avancée des travaux ; les ouvriers comblent la mer avec des roches. Ils grappillent des centimètres d’océan. Une opération longue et fastidieuse. C’est avec l’aide de Structural Engineers et d’experts réunionnais que le ministère des Infrastructures publiques a entamé la deuxième phase des opérations. La première consistait à sécuriser la zone. Mission qui a pris plus de temps que prévu. Anil Bachoo s’est d’ailleurs excusé pour le retard lors d’une site visit en début de semaine.

 

Le ministre des Infrastructures publiques a aussi rassuré : «Je suis très satisfait des travaux entrepris pour cette nouvelle route qui est maintenant plus sécurisée. Des roches ne vont plus tomber sur cette route. Le consultant réunionnais a retiré les roches qu’il fallait.» Avec les travaux d’agrandissement, les habitants des régions concernées n’auront donc logiquement plus aucun souci à se faire.

 


 

Pas de filet ?

 

Les habitants s’étonnent. Pourquoi n’y a-t-il pas de filet pour protéger des éboulis ? Une décision réfléchie, selon le ministre des Infrastructures publiques, Anil Bachoo : «Il n’y aurait aucune garantie. C’est pour ça que nous agrandissons la route.»