Sa voix est captivante. Quand elle parle, impossible de ne pas se laisser bercer et toucher par ses propos. Elle est comme ça Rachel Batour. Elle a quelque chose en elle de lumineux. Installée dans son fauteuil roulant, on devine que la petite dame toute menue cache une force de caractère. Et à l’écouter, on comprend que cela découle de son vécu. «Je suis une enfant de Mahébourg et j’ai grandi à Rose-Hill. Mon père, originaire de l’Inde, s’était installé à Maurice et j’ai travaillé pendant longtemps comme employée de maison et je suis très heureuse de fêter mes 100 ans», nous confie Rachel que nous rencontrons chez elle, à Quatre-Bornes, le jour de son anniversaire, en ce mercredi 26 septembre.
Autour d’elle, un joyeux brouhaha. La maisonnette grouille de monde car pour fêter dignement celle qu’ils considèrent tous comme le ciment et la mémoire de la famille, enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants se sont réunis pour cet anniversaire très spécial. «Vous avez vu combien de petits-enfants j’ai», nous lâche la grand-mère heureuse en éclatant de rire avant d’ajouter qu’elle a eu trois enfants dont un est décédé, qu’elle a 15 petits-enfants, 12 arrière-petits-enfants et 7 arrière-arrière-petits-enfants. «J’ai une fille qui est en France et une autre qui est à Maurice», précise Rachel avec un sourire qui ne quitte pas son visage.
Bouquets de fleurs, gâteaux et autres douceurs sont de rigueur pour l’occasion alors qu’une ambiance festive règne dans la maison en ce jour où certains ont fait le déplacement du Canada, de France ou encore de l’île de la Réunion pour venir célébrer, avec Rachel, cette étape importante de sa vie. Les visages affichent des sourires et les cœurs sont remplis de joie alors que les visites se succèdent, certains proches débarquant directement de l’aéroport.
«J’aime lire le journal et aussi chanter…», lance Rachel, avant d’entonner un bout de Ticket de quai, un titre qu’elle affectionne particulièrement et qu’elle aime faire de temps en temps résonner dans sa petite maison pour le plus grand bonheur de son entourage qui la regarde avec des yeux pleins d’amour : «Ce train qui roule dans la nuit, combien de rêves il porte en lui. (...) Y’a toujours quelqu’un qui part. Et qui ne revient pas.»
«Un petit Martini»
En remontant le cours de sa vie, elle ne peut s’empêcher de penser à sa jeunesse : «Je suis issue d’une famille de cinq enfants. J’avais trois frères et une sœur et ils sont tous décédés. Avant, je m’appelais Sayvany Samy. J’ai, par la suite, été baptisée et je suis devenue Rachel.»
Quand on lui demande son plat préféré, elle nous répond sans hésitation : «Kari madras», avant de nous préciser que pour «la réalisation de ce plat, il ne faut pas frire le poisson. C’est ma grand-mère de Beau-Vallon qui m’a montrée comment cuisiner cela». Si pour elle, il n’y a pas de secret pour expliquer sa longévité, la joyeuse centenaire qui adore, de temps en temps, dit-elle, «savourer un petit Martini», aime aussi se mettre devant chez elle et «regarder les passants».
Pour son entourage, Rachel est un véritable exemple de force et de courage. «Elle a travaillé jusqu’à ses 80 ans», nous confie un membre de la famille. Pour Corine qui a fait le déplacement de La Réunion, Rachel a toujours été une personne généreuse. Un fait que confirme Dominique qui vient de France : «Grand-mère a définitivement contribué à faire de nous les personnes que nous sommes aujourd’hui.» Magalie, un autre membre de la famille, est aussi en admiration devant Rachel : «C’est la femme la plus forte que j’ai jamais connue de ma vie…»
C’est avec une autre grande fête, le samedi 29 septembre, que la famille a tenu à célébrer les 100 ans de Rachel et de sa vie dédiée aux autres…