Pa vann nou pei, Pa vann nou lepor, Pa vann nou dilo. C’est le message qu’a porté à bras-le-corps une petite foule de citoyens mauriciens, hier après-midi, lors de la manifestation pacifique organisée par la General Workers Federation (GWF) et la Port-Louis Maritime Employees Association (PLMEA). Ils ont voulu crier leur désaccord face au projet du gouvernement de placer le port entre les mains de Dubai Ports World pour 99 ans et de leur céder la Cargo Handling Corporation Ltd (CHCL) à 75 %, mais aussi contre leur intention de privatiser la Central Water Authority (CWA).
Depuis le début des discussions et des négociations, le mouvement syndical lutte farouchement contre la privatisation éventuelle du port. C’est justement pour dire non à ce projet «fou»que les travailleurs du secteur portuaire, accompagnés de leur famille, des syndicalistes, des militants politiques, énergétiques et écologiques, et de nombreux Mauriciens se sont réunis dans les rues de Port-Louis. Ils ont aussi voulu rappeler aux autorités que le port fait partie du patrimoine, de l’histoire de ce pays et de son peuple, et que le placer entre les mains d’étrangers serait une grande menace pour l’indépendance et la souveraineté de Maurice.
Alain Edouard et Guy Martin, président et secrétaire de la PLMEA respectivement, et suspendus de leur poste par la Cargo Handling Corporation en début d’année, étaient tous les deux entourés de plusieurs autres syndicalistes venus se joindre à leur lutte. Alain Edouard, qui est passé devant le comité disciplinaire il y a quelques jours, attend désormais le verdict qui devrait être rendu le 25 mars. Rappelant le dur labeur de centaines de Mauriciens qui, de génération en génération, ont fait du port ce qu’il est aujourd’hui, Alain Edouard a fait ressortir à quel point il est important de se mobiliser contre la vente de celle-ci aux Dubaïotes : «Ils veulent vendre notre histoire mais ce mouvement, c’est pour dire non à la privatisation du port et de la CWA. Nous avons subi beaucoup de pressions pour arriver jusqu’ici mais nous devons rester mobilisés.»
C’est poussé par ce désir de protéger ce qui appartient aux Mauriciens que la petite foule a marché de l’ex-Albion Dock jusqu’au Jardin de la Compagnie, brandissant banderoles et drapeaux. «Si nous sommes là aujourd’hui, c’est pour défendre notre bien commun. Ce port a été construit par nos familles, c’est ce que la nature nous a donné. Nous sommes là pour défendre notre liberté, notre droit de décider. Vous ne pourrez jamais taire la voix des travailleurs»,a déclaré Ashok Subron de Rezistans ek Alternativ, négociateur de la PLMEA dans le litige qui l’oppose à la direction de la CHCL. La lutte sera longue certes mais ensemble, dit-il, ils braveront la répression et l’intimidation pour protéger ce qui appartient au peuple mauricien et représente son indépendance.