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[INTERVIEW] Dr Poonam Bissessur : «Environ un tiers des abus sexuels sont commis par les enfants»

«De plus en plus, l’Internet et les téléphones portables exposent également les enfants à des risques de violence sexuelle.» Constat de la nouvelle directrice de Pédostop. Elle nous parle de ses priorités.

Vous êtes psychiatre et addictologue. Estimez-vous être la bonne personne pour occuper le poste de directrice de Pédostop ?

 

La bonne personne pour ce job serait une personne qui a une compréhension adéquate des abus sexuels, de la psychopathologie, de la prise en charge des victimes comme des auteurs, des connaissances sur le terrain et au niveau international, et surtout une personne qui pourrait travailler en collaboration avec tous les stakeholders qui luttent contre l’abus sexuel sur les enfants. Mon parcours est marqué par de nombreuses années passées à l’étranger. J’ai travaillé avec des victimes d’abus en Angleterre, en Irlande et en Belgique. La prise en charge était multisectorielle. On travaillait beaucoup avec les médecins, les travailleurs sociaux, les juristes, la police et d’autres organisations. À mon retour dans l’île, j’ai travaillé auprès du ministère de la Santé où j’ai pris connaissance de ce fléau et j’ai constaté qu’il y avait un manque de coordination entre les différents acteurs concernés par cette problématique.

 

Comment comptez-vous changer cela ?

 

Je pense miser sur une politique forte pour lutter contre la violence sexuelle sur les enfants, assurer une prise en charge médico-psycho-sociale des victimes et des ex-victimes d’abus sexuel. On pense aussi protéger toutes les victimes et les ex-victimes, faire respecter les droits de toute personne, rendre la justice efficace, former les professionnels prenant en charge les victimes à la «psychotraumatologie», et plus particulièrement les travailleurs sociaux, psychologues, médecins et autres professionnels de la santé, et informer le grand public sur les conséquences des violences et les mécanismes «psychotraumatologiques», et l’éduquer aux respects des droits humains. 

 

Des campagnes de prévention, il y en a eu beaucoup. Que comptez-vous proposer de plus ?

 

L’abus sexuel se produit souvent dans des milieux censés être les «plus protecteurs», tels que la famille, les institutions, les écoles. Nous sommes tous concernés. C’est une violation des droits fondamentaux de l’homme. Il reste un problème de santé publique impliquant tous les niveaux de la société. On peut l’éviter. Mon souhait est de travailler en étroite collaboration avec tous les stakeholders afin de trouver des solutions pour la protection des enfants et surtout les aider à dénoncer ces crimes. Éradiquer les abus sexuels sur les enfants dans un premier temps semble très difficile mais pas impossible. Nous pouvons avoir une société où les enfants sont exemptés des abus et exploitations sexuels. D’abord, je compte, avec l’appui des stakeholders, effacer la stigmatisation qui est, à tort, rattachée à l’abus sexuel sur les enfants. 

 

On entend de plus en plus parler de jeunes «pédocriminels». Qu’est-ce qui explique cela ?

 

La violence sexuelle sur les enfants touche toute une famille et peut se transmettre à la génération suivante. On sait que les adultes sont souvent auteurs de ces crimes, mais on ne se rend pas compte que les enfants peuvent des fois présenter un risque. Environ un tiers des abus sexuels sont commis par les enfants âgés de moins de 18 ans.

 

Pourquoi cette tendance ?

 

Les raisons sont compliquées et pas toujours évidentes pour expliquer le pourquoi des enfants qui s’engagent dans ces comportements. Certains sont eux-mêmes des victimes d’abus sexuel, émotionnel ou physique, alors que d’autres ont été témoins de la violence physique ou émotionnelle à la maison. Certains ont eu peut-être accès aux matériels de nature sexuelle, comme les films, des jeux vidéo. Pour certains, il peut s’agir d’une phase ou d’une impulsion passagère. D’autres vont continuer à abuser des enfants jusqu’à l’âge adulte. Il est impératif qu’une personne reçoive de l’aide le plus tôt possible.

 

Quelle est la situation concernant les cas rapportés à Maurice ? Vous avez des chiffres ?

 

L’abus sexuel sur les enfants est en grande partie un crime caché. Il est donc difficile d’estimer avec précision le nombre de personnes victimes de violence sexuelle à un moment donné pendant leur enfance. Il y a environ un cas rapporté par jour.
 It is largely under-reported. La violence sexuelle est un phénomène commun à l’échelle mondiale. Dans le monde, environ 1 enfant sur 10, et dans certaines régions 1 sur 3, est abusé sexuellement. «Mauritius is no exception.» Les victimes traumatisées sont souvent abandonnées, elles bénéficient de peu de protection et de soins spécifiques.

 

Selon vous, pourquoi les agressions continuent-elles malgré tout ce qui est fait pour dénoncer ces actes horribles ?

 

Il n’y a pas assez de dénonciations. Cela s’explique par la peur de dénoncer ou encore l’embarras. L’agresseur menace souvent l’enfant. Le plus grand mythe est que les dangers pour les enfants proviennent des étrangers. Or, dans la plupart des cas, l’auteur est quelqu’un que les parents ou l’enfant connaissent. Et l’enfant et la famille lui font confiance. Tous les enfants sont vulnérables aux abus sexuels, en particulier les filles. 

 

Le mode opératoire des abuseurs a-t-il évolué ?

 

La technologie a ouvert de nouvelles possibilités. Internet et les portables ont donné aux prédateurs la possibilité de trouver et d’abuser les enfants d’une nouvelle manière. La montée des périodes économiques difficiles, le peu de soutien disponible pour les enfants qui avaient été victimes de violence sexuelle, favorisent les agressions. Cette augmentation spectaculaire est profondément inquiétante et montre à quel point ce crime effroyable est devenu considérable, en faisant de nombreuses victimes chaque jour. La violence sexuelle peut se produire partout, dans les maisons, les institutions, les écoles et autres. De plus en plus, l’Internet et les téléphones portables exposent également les enfants à des risques de violence sexuelle car certains adultes cherchent à avoir des relations sexuelles avec des enfants. On voit une croissance du nombre et de la circulation des images d’abus d’enfants. Les enfants eux-mêmes se transmettent des messages sexuels ou des images sur leurs téléphones mobiles, appelés sexting, ce qui les met en danger pour d’autres abus.

 


 

Bio express

 

Née Kangloo,  le 21 août 1982, le Dr Poonam Bissessur, directrice de Pédostop, a vécu à Triolet jusqu’à l’âge de 18 ans : «Puis, je suis partie à l’étranger pour faire des études.» Son père Raj est Health and Safety Manager chez Gamma. Sa maman Lalita est Principal Social Security Officer au ministère de la Sécurité sociale. Sa sœur aînée, Reena, est avocate. Mariée à Akil Bissessur, qui est avocat, elle est détentrice d’un Diplôme Universitaire Addictologie océan Indien 2016, Université de La Réunion, d’un titre professionnel particulier de médecin spécialiste, Psychiatrie Adulte, Belgique et d’un Masters Complémentaire en Psychiatrie, Université Catholique de Louvain, Belgique, entre autres. «J’ai commencé ma carrière comme médecin en Irlande. Puis comme Registraren psychiatrie en Angleterre et assistante en psychiatrie en Belgique. Je suis retournée à Maurice en 2013 où j’ai rejoint le service public comme médecin au ministère de la Santé.»