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Hausse du prix des carburants : Marée noire de contestations et… interpellations

Les nouveaux prix du diesel et de l’essence ont occupé l’actualité cette semaine. Provoquant même l’interpellation de deux jeunes pour un post sur Facebook.

Quelques lignes. Pour crier son indignation. Un ras-le-bol qui a trouvé écho chez de nombreux facebookeurs qui ont partagé son post. Et en quelques heures, la vie de Yash Ramchurn a pris un tournant inattendu. Il s’est retrouvé au CCID, le jeudi 17 mai, pour s’expliquer sur sa déclaration sur Facebook, appelant au blocage des entrées de la capitale suite à la décision du Petroleum Pricing Committee de revoir à la hausse les prix de l’essence et du diesel. Samad Gunny qui a share son post a connu le même sort (voir hors-texte). Les deux jeunes hommes ont, néanmoins, pu rentrer chez eux après leur interrogatoire. Mais, leur interpellation a indigné de nombreux Mauriciens et a provoqué de nombreuses interrogations sur le rôle du commissaire de police.

 

Toutefois, c’est la majoration des prix des carburants qui a été la vedette de l’actualité, cette semaine. Elle a provoqué des appels à la contestation de politiciens, la colère des consommateurs mauriciens et a fait réapparaitre le spectre d’une hausse en cascade (le ministre du Commerce, Ashit Gungah, s’est exprimé sur ce point : voir hors-texte). Le pain, la paire de dholl puri, le ticket d’autobus coûteront-ils plus cher ? Déjà les stations-service ont menacé de faire grève si leur marge de profit n’est pas revue à la hausse. Cependant, lors d’une rencontre, Ashit Gungah a assuré que leur voix a été entendue (Voir hors-texte).

 

«Stressants»

 

Dans cette marée noire de contestations (notamment sur les taxes du prix du litre du diesel et de l’essence, voir ci-contre) et de revendications, Yash Ramchurn, élu du village de Fond-du-Sac, a vécu son propre drame : «Mercredi, dans la soirée, un officier est venu chez moi pour me dire que j’étais convoqué aux Casernes centrales, le lendemain matin.» Il ne sait, alors, pas exactement de quoi il s’agit : «C’était vraiment stressant.» Mais il se dit que ça doit être en rapport avec son post sur Facebook qui a, selon lui, atteint les 1 700 shares et des milliers de likes quelques heures après sa mise en ligne. Sur le coup, raconte-t-il, il ne s’attendait pas à cet engouement : «J’ai simplement voice out quelque chose. Et j’avais vu qu’à l’étranger, c’était une opération qui avait fonctionné. C’est tout. Ce n’était pas contre le gouvernement, mais c’était en faveur des ti dimounn.»

 

Il ne sait pas si son interpellation a quelque chose à voir avec ses préférences politiques : «En tout cas, je n’ai pas réagi en tant que Rouge. Je suis un conseiller de village, actif dans le social ; tout le monde se plaint de cette augmentation et c’était pour moi impossible de rester insensible. Je ne me bats pas contre le gouvernement mais contre l’injustice.» Face aux policiers, il répond aux questions du mieux qu’il peut, s’interroge sur le pourquoi de son interpellation (y a-t-il eu une déclaration contre lui ?), rappelle qu’il s’agissait d’une idée, pas encore d’un event, et qu’il mentionnait le besoin de se tourner vers le commissaire de police afin d’avoir une autorisation. On vérifie son Facebook et son portable, on lui parle d’accusation de public disorder et de breach of ICTA Act, il se défend : «C’est dur d’être interrogé comme un criminel quand on n’a rien fait. C’était une grosse pression. Chaque mot qu’on dit compte. Je me disais que si je ne répondais pas correctement mo pou retrouv mwa dan kaso.»

 

Qu’en est-il de sa proposition de bloquer les rues de la capitale ? Pour l’instant, Yash Ramchurn ne se prononce pas : «Il y avait un momentum. Les gens voulaient aider, voulaient protester, enn lekip ti fini koumans monte. Mais c’est bête que je mène ça, si zot pou ferm mwa. Il faut que j’attende pour voir.» D’ailleurs, il estime que le mouvement dépasse sa propre personne : «J’ai eu de nombreux soutiens. Et je continue à en avoir. Il est essentiel que ces prix soient revus.» Selon lui, ses quelques lignes sur Facebook parlaient d’une frustration. La sienne et celle de nombreux Mauriciens.

 


 

Samad Gunny : «Ça m’a surpris…»

 

Il le dit. Il a partagé le post de Yash Ramchurn comme des milliers d’autres personnes. Pourquoi a-t-il été interpellé ? Il n’en a aucune idée : «Ça m’a surpris. C’était étrange. Je ne sais pas si c’est à cause de ma carrière en politique.» Ancien conseiller du MSM, ex-président du Reform Party, Samad Gunny est politiquement en mode wait and see. Mais il le rappelle, le fait de partager ce post était un geste apolitique, une réaction de citoyen mauricien : «Je suis contre la hausse de ces prix. Je suis révolté par le nombre de taxes imposé sur le prix de l’essence et par la déclaration de Vishnu Lutchmeenaraidoo, qui circule actuellement sur Facebook, qui disait à l’époque que chaque Rs 3 prélevait sur l’essence financerait le projet de Metro Express.»

 

D’ailleurs, il est parti aux Casernes Centrales sans avocat et a répondu aux questions des autorités : «Les policiers étaient OK.» Ils ont compris, explique-t-il, qu’il vivait un moment difficile : «J’ai perdu ma grand-mère. L’enterrement était vendredi. C’était un moment difficile. Alors ils m’ont laissé partir. Mais je dois rester à leur disposition en cas d’éventuelles questions.» Mais il rappelle, qu’il n’y avait rien de coordonné : «Personne n’allait prendre sa voiture et la laisser sur la route. Il n’y avait ni date, ni heure. Rien n’était décidé. C’était une idée.»

 

Depuis son interpellation, il reçoit de nombreux messages et gestes de soutien. Et Samad Gunny estime ne pas être «échaudé» par ces récents événements. Néanmoins, il ne saurait dire s’il participera ou non à une éventuelle protestation : «J’attends de voir comment les événements vont s’enchaîner avant de me prononcer.»

 

«Motion of disallowance» : une opposition… unie

 

Une décision de Xavier-Luc Duval. Et le leader de l’opposition a déposé une motion of disallowance à l’Assemblée nationale concernant l’augmentation des prix des carburants. Pour le chef de file des Bleus, il s’agit d’une majoration injustifiée. Une décision qui étouffe la population et qui aura un effet négatif sur l’inflation. Tous les partis de l’opposition ont dit qu’ils soutiendront la motion de Xavier-Luc Duval au Parlement. Le dernier en date est Paul Bérenger qui a animé un point de presse, le samedi 19 mai : «C’est une dénonciation et une condamnation unanime de cette augmentation. Sa pe pass tre mal dan popilasion. Nous supporterons la motion.» Il est d’avis que, même au sein du gouvernement, il y a des voix qui s’élèvent contre cette hausse. Ashit Gungah, s’est dit «serein», lors de son point de presse, le samedi 19 mai, face à cette motion : «Je suis prêt à faire face à cette motion. Ce ne sera pas la première fois. Alan Ganoo l’avait déjà fait dans le passé.»

 


 

Les nouveaux prix

 

Rs 52 pour le litre d’essence et Rs 41,90 pour le diesel.

 

 

 

Gérants de stations-service : menace de grève et 2%

 

Ils n’ont pas tardé à réagir. L’augmentation des prix du diesel et de l’essence a provoqué une sortie des membres de la Petrol Retailers Association (PRA) pour que leur marge de profit soit revue à la hausse. Pour se faire entendre, ils ont brandi, comme d’habitude, la menace d’une grève. Une rencontre avec le ministre du Commerce a néanmoins calmé les choses. Ce dernier leur a donné la garantie que leur voix a été entendue. D’ailleurs, un comité technique du ministère et des représentants de la PRA se sont réunis pour en discuter. Prochaine réunion ? Elle est prévue pour la semaine prochaine et le quantum décidé sera présenté au Conseil des ministres. Le président de la PRA a dit que les membres de l’association et lui étaient satisfaits «à ,50%». «Nous devons voir si le quantum nous convient.»

 

Prévoyez du liquide quand vous ferez le plein ! Désormais, les stations-service ont prévu de prélever 2% comme commission sur chaque paiement par carte bancaire.

 

Cascades de hausse de prix : Ashit Gungah sera ferme

 

Il va veiller au grain ! C’est ce qu’a annoncé le ministre du Commerce, Ashit Gungah, lors d’un point de presse, le samedi 19 mai. Pain, farata, dholl puri ou alors ticket d’autobus ne prendront pas l’ascenseur sans qu’il soit mis au courant : «Dans le passé, les marchands de dholl-puri, par exemple, avaient augmenté leur prix sans justification. Nous veillerons à ce que cela ne se reproduise pas.» Comment va-t-il contrôler tout ça ? En plaçant des espions près de chaque marchand ? Il ne le dira pas. Par contre, il a fait un appel aux opérateurs, pou fer enn zefor pour le bien de tous les Mauriciens. Pour le ministre, le prochain budget permettra de freiner les risques inflationnistes. Il a aussi rappelé qu’au vue de la conjoncture internationale, la hausse du prix de l’essence était inévitable.

 

Plus tôt, cette semaine, le ministre avait déclaré qu’il s’agissait d’une situation difficile. Il a fait un appel à la solidarité, qui a été diversement commenté sur les réseaux sociaux : «Bizin marye pike (…) Nous devons agir en patriotes.»

 

Des taxes qui font tiquer…

 

… les Mauriciens. Et aussi les politiciens qui ont repris cette thématique dans leurs différents points de presse en fin de semaine. Navin Ramgoolam a estimé que le gouvernement «pe plim lepep». Paul Bérenger pense qu’il y a un manque de transparence : «Il y a une réelle indignation. Surtout qu’en 2015, lorsque le prix a crash complétement, au lieu de passer cette baisse aux consommateurs, au moins en partie, le gouvernement a multiplié par quatre une taxe, le Build Mauritius Fund.» Sur les réseaux sociaux, les réseauteurs ont compilé ces nombreuses taxes qui viennent gonfler le prix de l’essence. Parmi elles, la Maurice Ile Durable Levy (alors que le MID n’existe plus), la Contribution to Road Development Authority, la Contribution to Rodrigues transportation and storage  et la Contribution to subsidy on LPG, Flour and Rice, entre autres. Certains se sont étonnés de payer 15% de VAT sur les contributions des différents Levy (en plus de 15% payés sur le prix de l’essence). Le ministre du Commerce a, lui, affirmé qu’il fournira plus d’explications sur les diverses taxes au Parlement, ce mardi.

 


 

Marche à Rose-Hill : Jayen Chellum : «Tout, ou presque, est relié au Metro Express…»

 

Il en est persuadé. Le président de l’Association des Consommateurs de l’île Maurice (ACIM) le dit : «Tout, ou presque, est relié au Metro Express. On y voit la démarche générale du gouvernement afin de financer les grands projets d’infrastructures. Nous avions prévenu que pour financer le nouveau projet de transport, il y aurait une augmentation des taxes.» Il parle, évidemment, de la hausse des prix des carburants qu’il condamne. Le projet de privatisation de la CWA va dans le même sens : «Si cet organisme de responsabilité publique n’est plus de la responsabilité du gouvernement, il sera dans une logique de profit, ce qui n’est pas normal.» C’est pour manifester contre ce projet que le ministre Ivan Collendavelloo a mis sur le tapis que Jayen Chellum a organisé, avec d’autres mouvements, une marche, le samedi 19 mai, à Rose-Hill. L’objectif principal : s’exprimer contre le projet de privatisation de la CWA. «Les orateurs ont demandé au Premier ministre de clarifier la situation et de dire qu’il n’y aura ni privatisation ni affermage ni partenaire stratégique.» Pour lui, il s’agit, ainsi, de protéger les employés de cet organisme mais aussi les consommateurs mauriciens. Il a aussi été question de la hausse du prix des carburants.