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Exclusivité | Affaire Michaela Harte : Cinq ans plus tard, John McAreavey se livre à 5-Plus

La plaie ne cicatrice pas. Mais «je me suis résolu à vivre avec ces tragiques événements», a déclaré John McAreavey dans un entretien exclusif accordé à 5-Plus dimanche. Cela fait cinq ans que l’Irlandais attend que justice soit rendue après l’horrible assassinat de sa première épouse, Michaela Harte, alors qu’ils étaient en lune de miel à Maurice. Mais aussi quatre ans depuis que les deux accusés arrêtés dans cette affaire ont été acquittés par le jury aux Assises. John McAreavey revient sur toute l’affaire, sur ses impressions quant à la gestion par les autorités mauriciennes et le système judiciaire. Témoignage.

Cela fait déjà cinq ans que votre première épouse Michaela Harte est décédée dans des circonstances tragiques au cours de votre lune de miel chez nous, et quatre ans que les deux accusés dans cette affaire ont été trouvés non-coupables par les membres du jury aux Assises. Peut-on connaître votre état d’esprit ?

 

Il y a toujours de la douleur et un sentiment de frustration et d’injustice après tout ce temps. Mais je me suis résolu à vivre avec ces tragiques événements. Il est tout de même extrêmement frustrant de savoir que les personnes qui ont tué Michaela sont en liberté et que justice n’a pas été rendue. Je ressens un sentiment d’injustice face à cela et je ferai tout ce que je peux raisonnablement faire pour rectifier cet état de chose. 

 

Avez-vous pu faire votre deuil ?

 

Comme je l’ai dit, je me suis résolu à vivre avec l’acte odieux de ces assassins.

 

Quel est votre point de vue sur toute cette affaire depuis le début ?

 

C’est difficile de trouver assez de mots pour décrire mes sentiments dans une interview. Mais les mots frustration, colère et désillusion résument parfaitement ce que je ressens. Selon moi, il y a eu un manque de sérieux et de vaines promesses des autorités mauriciennes concernant cette affaire. Je n’ai, par exemple, jamais reçu de rapports détaillés des progrès de l’enquête, ni d’informations sur ce qui était fait pour résoudre ce crime. Nous avons placé notre confiance dans le système judiciaire mauricien et soutenu les progrès légaux en espérant que justice serait rendue.

 

J’ai assisté à un long procès de sept semaines, épuisant sur le plan émotionnel, revivant tous les détails de la journée où Michaela a été tuée, certain qu’il y aurait condamnation. À mon avis, cette affaire a été mal gérée depuis le début, mais au-delà de ça, il faut s’en tenir aux faits. Le premier suspect a fait des aveux en présence de son avocat. L’homme de loi a ensuite donné un entretien à une radio où il présentait des excuses à nos familles en précisant que son client n’avait pas l’intention de tuer Michaela, que cet assassinat était un «incident malheureux»qui «a mal tourné», que ce qui était arrivé était triste, mais que c’était un «accident». Et cet avocat a dû se retirer après que les aveux de son client ont été lus en cour.

 

Concernant la thèse que ces aveux n’étaient pas volontaires et avaient été obtenus sous la torture, le suspect a été examiné par trois médecins indépendants qui ont tous confirmé qu’il ne portait aucune blessure. Pour moi, l’autre accusé n’a pas été cohérent et consistant lors de son contre-interrogatoire sur son emploi du temps au moment de l’assassinat de Michaela, alors que la poursuite exposait les contradictions de son alibi. Ça, ce sont des faits.

 

Que pensez-vous de la gestion de cette affaire par les autorités mauriciennes ? 

 

Je suis d’avis qu’il y a eu certaines lacunes dans l’enquête policière. La police aurait pu, selon moi, approfondir certains aspects de l’affaire. La façon dont elle m’a traité depuis le début et a mené cette enquête m’amène à penser que cette affaire a été gérée de manière non professionnelle.

 

Les enquêteurs, me semble-t-il, n’ont pas tout fait pour collecter des preuves concrètes une fois qu’ils ont eu les aveux de Treebhowon et la déclaration d’un témoin oculaire. Lors du procès, la défense a présenté des théories qui me semblent grotesques devant le juge.

 

J’ai aussi eu l’impression que la poursuite a été prise de court sur des aspects qu’elle aurait pu anticiper. Par exemple, j’aurais pensé que toutes les images des caméras CCTV de l’hôtel seraient revues pour être en mesure de dire immédiatement que le couple d’Allemands présenté par la défense sur une vidéo comme étant moi et Michaela, n’était pas nous. 

 

Que pensez-vous du système judiciaire mauricien ?

 

Il nous a laissés tomber. Les conclusions du juge démontraient selon moi les évidences et mettaient en lumière les inconsistances et contradictions contenues dans les témoignages des accusés. Mais les membres du jury ont pris moins de deux heures pour délibérer et ont rendu un verdict de non culpabilité à l’unanimité. Nous ne pouvons que spéculer sur les raisons étant donné que ses membres ne sont pas tenus de motiver leur décision.

 

Beaucoup de questions restent sans réponses. Je comprends qu’à Maurice les jurés sont séquestrés tout au long du procès pour qu’ils demeurent aussi objectifs que possible. Mais cette procédure a-t-elle été respectée ? Ce qui fait que je pense que des enquêtes approfondies auraient dû être menées là-dessus parallèlement à la seconde enquête qui a été ouverte sur l’affaire.

 

Le procès lui-même s’est très mal passé de mon point de vue. Les personnes présentes dans la galerie publique montraient peu de respect pour les autorités présentes en cour. Elles parlaient, faisaient des blagues alors qu’il y avait des auditions des témoins. Ce comportement était pénible à vivre pour notre famille. Venir en cour était une expérience émotionnelle et stressante car nous nous sentions insultés par cette attitude. Nous avons dû faire preuve de beaucoup de patience et de tolérance alors qu’on faisait peu de cas des sentiments de notre famille. La salle était toujours remplie. Des personnes se tenaient partout où elles pouvaient trouver de l’espace au sol. Nous avions l’impression que la salle d’audience s’était transformée en spectacle avec des gens qui entraient et sortaient sans se rendre compte de la gravité de l’affaire et du tort que cela pouvait causer. À mon sens, la presse a aussi failli dans son traitement du procès.

 

Quel est le souhait de votre famille et de celle de Michaela ?

 

Nous voulons que le gouvernement mauricien et le DPP viennent de l’avant pour dire publiquement ce qu’ils comptent faire. En 2012, ils avaient dit que justice serait faite. Nous sommes en 2016 et justice n’a toujours pas été rendue.

 

Votre procès contre Lux* Resorts tient-il toujours ?

 

Je ne peux pas commenter ce sujet géré par mon avocat personnel, Dick Ng Sui Wa. Dans un tout autre sujet, je regrette que ma demande auprès du bureau du DPP pour que mon avocat assiste la poursuite aux assises avait été rejetée.

 

Qu’est-ce qui va se passer maintenant ?

 

Le temps d’attente pour une action du DPP est terminé. Nous avons toujours gardé le silence afin de permettre à celui-ci de faire son travail. Dorénavant, nous allons ouvertement faire part de nos sentiments parce que nous sommes frustrés.

 


 

Un assassinat impuni

 

John McAreavey est en colère. Le bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP) n’ouvrira pas un nouveau procès. Le commissaire de police et l’avocat Dick Ng Sui Wa, qui représente la famille de Michaela Harte, en ont déjà été avisés dans une lettre que leur a adressée Medhi Manrakhan, Principal State Counselau bureau du DPP, le 29 juillet. Dans celle-ci, le bureau du DPP explique que «les nouvelles preuves scientifiques recueillies après le premier procès aux Assisses sont insuffisantes»pour ouvrir un autre procès.

 

L’assassinat de l’Irlandaise reste donc, pour l’heure, impuni. Cette jeune femme de 28 ans a connu une fin tragique à Maurice le 10 janvier 2011. Cette enseignante a été tuée dans sa chambre d’hôtel à l’ex-Legends,à Grand-Gaube. Le rapport d’autopsie indique que la jeune femme est décédée par asphyxie à la suite d’une compression of the neck. Deux suspects avaient été arrêtés, Sandip Mooneea et Avinash Treebohun. Tous deux ont été trouvés non coupables aux assises le 12 juillet 2013.

 

 

Une Special Squad a ensuite été mise sur pied au Central Criminal Investigation Departmentdans le cadre d’une nouvelle enquête policière. Elle a, entre entres, procédé à des interrogations et effectué des tests ADN sur de nouveaux suspects. Cependant, ces preuves ne sont pas suffisantes pour rouvrir un nouveau procès selon le bureau du DPP.

 

Par ailleurs, dans le cadre du procès au civil contre la direction de l’hôtel Lux* (ex-Legends), une compensation a été payée à la famille de la victime. Les Harte et les McAreavey réclamaient Rs 65 millions de dommages à la direction de l’établissement. Me Dick Ng Sui Wa et la direction de Lux* refusent cependant de dévoiler la somme accordée, suivant un accord de confidentialité. Selon la presse irlandaise, il s’agit d’un gros montant, soit d’un des plus gros accordés dans ce genre d’affaires en cour.