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Elle accouche d’un bébé mort-né avant de rendre l’âme | Le drame de Lorna, 17 ans, raconté par sa mère

Mère et fille étaient très complices malgré quelques différends.

Enceinte de huit mois, Lorna a fait un malaise avant d’accoucher par césarienne. Malheureusement, le bébé était déjà décédé depuis trois jours alors que l’adolescente plonge dans le coma. 23 jours plus tard, elle rend l’âme, laissant sa mère dans une tristesse indescriptible. Celle-ci, bouleversée, témoigne.

Elle avait 17 ans. Elle était jeune, pétillante et avait des rêves et des projets plein la tête. Pour elle et son enfant à venir. Car Lorna Pydiah attendait un bébé. Hélas, tout s’est effondré du jour au lendemain. Admise à l’hôpital dans un état grave, la jeune fille a accouché d’un enfant mort-né avant de rendre l’âme elle-même 23 jours plus tard. Depuis, sa mère Priscilla Tohul ne cesse de pleurer, blessée au plus profond d’elle-même par le pire drame qu’un parent puisse vivre : la perte d’un enfant.

 

Même si les médecins l’avaient prévenue que l’état de santé de sa fille était critique et qu’elle ne devait pas garder espoir, elle s’était convaincue que sa petite Lorna s’en remettrait et retournerait vivre avec elle comme au bon vieux temps. Mais l’appel téléphonique qu’elle a reçu dans la soirée du mardi 16 mai a anéanti ses espoirs et a chamboulé sa vie. Au bout du fil, un médecin de l’hôpital Victoria, où sa fille était admise depuis le 23 avril. «Zot finn dir mwa “madam, ou tifi inn desede”. Je me suis sentie très mal. Je ne voulais pas y croire.» Lorna Pydiah a rendu l’âme 23 jours après avoir accouché par césarienne d’un bébé mort-né. 

 

Le dimanche 23 avril, Priscilla rentre de la plage lorsqu’elle apprend que sa fille qui vit chez son petit ami Kevin*, a fait une crise et s’est évanouie. Enceinte de huit mois, l’adolescente est admise d’urgence à l’hôpital de Candos. Elle y accouche peu après d’un bébé mort-né par césarienne. D’après les médecins, le bébé était mort depuis trois jours. Vu que Lorna avait des ecchymoses sur certaines parties de son corps, la police et les médecins ont, dans un premier temps, soupçonné qu’elle a été tabassée par son petit ami, d’autant que, selon sa mère, cela se serait déjà produit dans le passé. 

 

Après une intervention chirurgicale, Lorna est placée sous respiration artificielle. «Je n’ai pu aller la voir que le lendemain car je n’avais trouvé personne pour m’y conduire ce jour-là et il était tard», confie Priscilla.Absence qui a provoqué beaucoup de tensions entre sa famille et celle de Kevin. «On me reprochait d’être une mauvaise mère. Ils m’ont même interdit d’assister aux obsèques du nouveau-né.» 

 

Lorsqu’elle rend enfin visite à sa fille, les médecins la préviennent tout de suite. «Ils m’ont dit qu’il ne faudrait pas que je garde espoir que son état s’améliore.» Mais son cœur de mère ne peut s’y résoudre. Priscilla consacre alors tout son temps à sa fille. Une dizaine de jours plus tard, elle voit une magnifique lumière au bout du tunnel : Lorna sort du coma. «Elle me disait qu’elle rentrerait avec moi à la maison une fois remise. Elle avait décidé de changer de vie pour passer plus de temps avec sa famille. J’attendais ce jour avec impatience.» Mais son bonheur est de courte durée car l’état de Lorna se dégrade à nouveau. «Elle ne s’est plus réveillée jusqu’à sa mort.»

 

Selon l’autopsie, elle a succombé à un «internal organ failure». Par la même occasion, les soupçons des médecins concernant une éventuelle agression sont écartés car les ecchymoses auraient été provoquées par une infection suite au décès du bébé. 

 

Le service de presse de la police indique qu’une enquête est en cours pour faire la lumière sur ce décès mais que, pour le moment, le petit ami Kevin ne sera pas inquiété. Sollicitée pour une réaction, sa famille s’est abstenue de tout commentaire. 

 

«Elle n’avait rien à manger»

 

Les obsèques de Lorna Pydiah ont eu lieu le mercredi 17 mai, et pour Priscilla, le vide s’est installé, dans son cœur et sa maison. «Si ma fille n’avait pas quitté ma maison, rien de tout cela ne lui serait arrivé», ne cesse-t-elle de se lamenter, convaincue qu’elle aurait pu mieux protéger sa fille. Mais Lorna n’en faisait qu’à sa tête depuis qu’elle était tombée amoureuse de Kevin alors qu’elle avait 16 ans. 

 

«Elle a fait sa connaissance sur Facebook, puis ils ont commencé à se voir. Kevin était même venu à la maison. Un mois plus tard, je me suis disputée avec ma fille et elle en a profité pour prendre ses affaires et aller vivre chez lui. J’étais totalement contre mais sa grand-mère m’a demandé de ne pas m’interposer. Ma fille a tout plaqué – les études et un travail qu’elle avait obtenu dans un restaurant à Mahébourg.» Pendant plusieurs semaines, mère et fille ne se parlent plus et ne se voient pas. Mais l’anniversaire du frère aîné de Lorna, le 15 octobre, les réunit à nouveau. «C’est à ce moment-là qu’elle m’a annoncé qu’elle était enceinte.» 

 

Ce jour-là, Priscilla constate que sa fille a aussi des ecchymoses sur le bras et un œil au beurre noir. «Lorsque je l’ai questionnée, elle m’a dit qu’elle avait eu un accident mais je n’étais pas dupe. J’étais convaincue qu’elle subissait des maltraitances mais ne voulait pas se confier. La mère de Kevin, que j’avais eue au téléphone, m’avait affirmé qu’ils se disputaient très souvent.»

 

Les semaines suivantes, Priscilla Tohul n’a pas l’occasion de voir sa fille autant qu’elle l’aurait voulu. Mais elle s’inquiète car les disputes seraient incessantes entre Kevin et Lorna. «Je l’accompagnais à ses rendez-vous chez le médecin mais son petit ami l’empêchait de venir à la maison. Lorna ne se confiait peut-être pas à moi mais était très proche de sa grand-mère qui est décédée il y a quatre mois. Elle lui avait confié que bien souvent, elle n’avait rien à manger. Il n’y avait pas d’eau et d’électricité dans la maison où elle vivait et elle était aussi malmenée par une proche de Kevin.»

 

Ne supportant pas que sa fille enceinte vive dans de telles conditions, elle lui rend visite pour lui apporter à manger. «Elle n’avait l’aide de personne pour les tâches ménagères et racontait que, souvent, il lui fallait attendre la nuit pour se doucher à l’extérieur afin que personne ne la voit. Je me sentais impuissante, je ne pouvais pas l’aider car elle ne voulait pas rentrer. Cela a forcément contribué à ce qui lui est arrivé», regrette Priscilla à qui sa fille manque énormément. 

 

La fin d’un rêve

 

Toutes deux se disputaient souvent, dit-elle, mais étaient aussi très complices. Elles ne pouvaient rester fâchées longtemps. Un brin nostalgique, Priscilla fait défiler dans sa tête tous les bons moments passés avec sa benjamine avant que celle-ci n’aille vivre chez son petit ami.«Lorna avait un tempérament fort mais faisait notre bonheur à la maison. Elle respirait la joie de vivre. Elle adorait passer du temps en famille et immortalisait chaque moment en prenant des photos. Elle adorait faire la cuisine et quand je rentrais à la maison les après-midis, elle avait déjà tout préparé.»

 

En effet, malgré son jeune âge, Lorna «était très indépendante et savait ce qu’elle voulait faire de sa vie. Elle avait la tête sur les épaules. Elle avait peut-être arrêté le collège mais avait commencé à suivre des cours d’art car elle voulait travailler dans ce domaine». Mais tout ce qu’elle avait imaginé pour son avenir, souligne sa mère, elle l’a mis de côté l’année dernière lorsqu’elle était tombée amoureuse d’un jeune homme. Et quelques mois plus tard, elle a rendu l’âme. La fin tragique d’une jeune vie prometteuse, la fin d’un rêve pour Lorna et sa mère. 

(*prénom modifié)