C’est l’histoire d’un jeune Mauricien homosexuel qui, après être passé par plusieurs épreuves – moqueries et autres remarques – de par son orientation sexuelle, savoure aujourd’hui le bonheur d’avoir pu s’unir à l’homme qu’il aime. Il nous raconte son plus beau jour.
Il croyait ne jamais pouvoir vivre ce moment. Lorsqu’il découvre «très tôt» qu’il est gay, ne pas pouvoir se marier fait partie des choses auxquelles Bryan Magon renonce. «Quand j’ai compris que j’avais une orientation sexuelle différente, je me suis dit que je devrais vivre caché, que je ne pourrais jamais vivre une histoire d’amour au grand jour, que je ne pourrais jamais me marier», confie le jeune homme.
Mais depuis samedi dernier, le jeune homme de 24 ans savoure son nouveau bonheur. À 16h15, le 3 octobre, à la mairie de L’Étang Salé Les hauts, à l’île de La Réunion, le Mauricien a, dit-il, vécu le plus beau moment de sa vie : «Après un an et demi à cheminer avec Paul Anglement, mon compagnon (NdlR : un Français installé dans l’île sœur), nous avons décidé de nous unir. Je peux vous dire que c’était un moment magique, ma revanche sur la vie. Pouvoir me marier et afficher mon amour m’aide aujourd’hui à me sentir comme tout le monde, comme tous les citoyens.»
Venir de l’avant et raconter son histoire est, pour lui, une démarche primordiale : «J’ai choisi de venir témoigner, car je veux que la cause homosexuelle avance. Ce n’est pas tabou de pouvoir s’unir à la personne qu’on aime. En parlant de ce sujet, je voudrais inviter les gens à être plus tolérants.»
Sa journée, il en a savouré chaque minute. «J’ai eu droit à mon moment, coiffure et autres soins, sans oublier des petites attentions de la part de mon entourage.», raconte le jeune homme qui regarde aujourd’hui de très loin les moments difficiles, ayant décidé, un matin, de s’assumer, de s’accepter et de vivre pleinement sa vie.
C’est au fil des années, en grandissant, que Bryan, originaire de Sainte-Croix, se rend compte qu’il «n’a rien à se reprocher», qu’il n’a pas à «se sentir différent ou exclu», qu’il n’a pas «à avoir honte» d’être lui-même et que son «seul défaut aux yeux des autres», c’est qu’il «aime une personne du même sexe». Il a choisi de ne pas se préoccuper du qu’en-dira-t-on et de vivre, tout simplement. «Certes, on m’a souvent jugé, on m’a passé des remarques, on m’a fait douter de moi, mais je n’ai jamais choisi d’être ainsi. Bien souvent, ces attaques venaient de mon entourage, des personnes de ma famille, et cela m’affectait. J’ai connu la déprime, la peur, l’angoisse. Mais j’ai décidé d’être fort et de croire en moi.»
S’il comprend toutefois que certaines personnes peuvent ne pas comprendre la réalité des homosexuels, il demande une seule chose : «Qu’on nous respecte, qu’on ne nous méprise pas, qu’on ne nous regarde pas de haut.»
Depuis le jour où il a décidé d’être lui à 100 % sans se cacher, Bryan n’a plus jamais été malheureux. Et aujourd’hui, il avance. «Je fais comme tout le monde», souligne-t-il. Après un coming out un peu houleux – il a toutefois le soutien et la bénédiction de sa mère et de sa sœur –, il a eu la chance de rencontrer sa moitié «sur un site Internet». Tous deux ont d’abord pris du temps pour apprendre à se connaître mutuellement, «comme pour tous les couples». Puis, Bryan a décidé, avec son amoureux, de franchir une nouvelle étape : «Je suis parti à La Réunion pour le rejoindre. Il est aussi venu à Maurice et on s’est rendu compte qu’on pouvait construire quelque chose ensemble.»
La suite de son histoire s’apparente, dit-il, à un véritable conte de fées : «Il y a eu la demande en mariage et toutes les étapes menant à notre grand jour.» Si Bryan avoue avoir craqué pour les yeux de Paul et son charme, Paul, de son côté, met en avant la personnalité de son petit Mauricien qui l’a séduit. Pour le reste, ils se sont laissés porter «par les ailes de l’amour», qui les ont menés jusqu’au mariage.
Veste bleu marine et pantalon blanc pour Bryan. Veste grise et pantalon blanc pour son chéri. C’est entourés de leurs proches – certains, dont deux de ses amis, Joanna Ursule et Kersley Tonta, ont d’ailleurs fait le déplacement de Maurice – qu’ils ont échangé leurs alliances et leur consentement.
Les «oui» ont été prononcés dans des larmes et avec de l’émotion. Puis, le reste a été ponctué de bisous et d’applaudissements. «Comme pour tous les couples qui se marient, on a fait la fête. Je trouve que c’est un très grand pas que la France reconnaissance aujourd’hui le mariage gay. Même si mon contrat de mariage n’a pas force de loi à Maurice, j’estime toutefois avoir fait un bond en avant. J’espère que Maurice aussi ira dans ce sens», déclare le jeune homme qui prépare déjà une autre fête, cette fois avec ses proches à Maurice : «La famille de Paul fera aussi le déplacement.»
Et ce sera alors, pour eux, une autre occasion de célébrer l’amour. Qu’il soit, précisent-ils, entre homosexuels ou pas.
Le Collectif Arc-en-Ciel : «Beaucoup de demandes pour le mariage gay à Maurice»
«Le mariage est un symbole fort pour deux personnes qui s’aiment. Et les personnes homosexuelles veulent, au même titre que tous les citoyens, avoir ce droit», nous fait part un responsable du Collectif Arc-en-Ciel qui milite pour le droit des homosexuels à Maurice. «Cette année, dit-il, nous avons fait une grande campagne autour du droit d’aimer et d’exister. C’était une occasion de rendre visible la communauté. Nous remarquons que les mentalités évoluent. Les gens respectent davantage les homosexuels. Nous remarquons aussi que le mariage gay est une grande préoccupation. Beaucoup espèrent que cela deviendra une réalité chez nous. Mais on le sait, ce sera un long et dur combat. Il y a beaucoup de demandes dans ce sens. D’ailleurs, un dossier a été récemment déposé devant l’Equal Opportunities Commission.»