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Béa Johnson : «C’est tout à fait possible de vivre avec moins de déchets»

Ses déchets pour l’année 2016 tiennent dans un bocal d’un litre.

Mondialement reconnue comme «la dame au zéro déchet», Béa Johnson, qui a complètement changé de mode de vie pour faire attention au déchet qu’elle génère, était à Maurice pour animer une conférence-débat le jeudi 11 mai. Elle a parlé de son quotidien qui conjugue simplicité et ingéniosité, avant de reprendre l’avion vendredi matin.

On vous surnomme «le nouveau messie de l’écologie» ou encore «la dame au zéro déchet». Vous êtes aujourd’hui la porte-parole mondiale du mode de vie zéro déchet. Comment devient-on tout cela ?

 

C’est arrivé par hasard. Je n’avais jamais pensé qu’un jour je serais à Maurice pour partager mon mode de vie zéro déchet. C’est en 2006, à San Francisco où nous vivions, que tout a commencé. Là où nous habitions, il fallait prendre la voiture pour aller n’importe où. Nous nous sommes ainsi rapproché du centre-ville pour tout avoir à proximité. Nous avions trouvé la maison idéale et c’est là que nous avions découvert les bienfaits d’une vie simple. Nous nous sommes alors documentés sur les problèmes de l’environnement et ce que nous avions découvert nous a beaucoup attristés, surtout quand nous pensions au futur que nous allions léguer à nos deux enfants. C’est ce qui nous a donné envie de changer notre façon de consommer.

 

Quel changement avez-vous alors apporté à votre vie ?

 

Nous avions commencé à faire attention à notre consommation en énergie et en eau. Ensuite, je me suis tourné vers les déchets. À ce moment-là, le terme «zéro déchet» était utilisé uniquement pour décrire des pratiques industrielles de fabrication ou de gestion de déchet à l’échelle municipale. Ce n’était pas un terme utilisé pour décrire ce qu’on faisait chez soi. C’est en découvrant tous ces sujets que j’ai eu le déclic. Je suis tombée sur le terme zero waste et je me suis dit que c’est un challenge que je vais essayer de relever. 

 

Et toute votre famille vous a suivie ?

 

Pout tout vous dire, les enfants ne se sont même pas rendu compte que nous avions changé notre mode de vie. Nous avions un garde-manger sans emballage et six mois plus tard, les enfants n’avaient rien remarqué. 

 

Qu’en est-il de votre époux ? Il a aussi accepté le changement ?

 

Quand j’avais pris cette décision, les états-Unis étaient en récession. Mon époux avait quitté son emploi pour démarrer un service de conseil en développement durable et on avait très peu d’argent qui rentrait. Financièrement, c’était très difficile. Quand il avait vu que j’allais faire mes courses dans un magasin bio, il m’a dit qu’on ne pouvait pas se le permettre. C’est là que je lui ai demandé de comparer nos relevés de banque avant et après que nous étions passés en mode zéro déchet. C’est là qu’il s’est rendu compte qu’on faisait 40 % d’économie. Dès qu’il a vu ces chiffres, il m’a dit : «Amen Béa, continue.»

 

Expliquez-nous donc c’est quoi le mode de vie zéro déchet ?

 

Notre poubelle est un bocal d’un litre. Tout notre déchet tient dedans (elle nous montre son bocal). Nos déchets pour 2016 tiennent dans ce petit récipient. Ce sont des déchets qu’on n’a pas pu appliquer à ma méthodologie des cinq règles d’or pour mener une vie zéro déchet. Il s’agit donc de : refuser ce dont on n’a pas besoin, réduire ce dont on a besoin, réutiliser en remplaçant tout ce qui est jetable par un alternatif réutilisable et acheter d’occasion si on a besoin, recycler pour la quatrième règle et la dernière régle est le compostage. 

 

Concrètement, comment cela se passe ? Comment vivez-vous ?

 

Chez moi, on vit de façon très minimaliste. Par exemple dans la chambre, il n’y a qu’un lit, il n’y a pas de table de nuit. Je porte un pyjama d’occasion. Pour le petit déjeuner de mes enfants, je leur prépare un sandwich et eux l’emballent dans un furoshiki. C’est un art japonais où on utilise un linge comme emballage. On a un torchon dans lequel on met son déjeuner, ensuite on le roule et on le noue. Le torchon sert à transporter la nourriture, puis comme un set de table et ensuite comme serviette. Et en ce qui concerne la nourriture, il s’agit de tout ce qu’on achète en vrac. Pour limiter ses déchets, c’est efficace. Le nombre d’emballages nécessaires à l’alimentation est effrayant, entre les cartons, sacs, sachets, boîtes… Et acheter en vrac comporte beaucoup d’avantages et permet de ne pas s’encombrer d’emballages inutilement. On achète tout ce qu’on a besoin avec notre propre contenant.

 

Pouvez-vous nous en dire plus ? 

 

Pour se laver, je me sers d’un savon générique, encore une fois sans emballage, avec lequel je me lave le visage, les cheveux et le corps. Mon mari et mes ados l’utilisent aussi pour se raser. Le seul produit que j’achète pour ma peau, c’est une crème teintée avec protection solaire. C’est un produit bio emballé dans du verre. Ensuite, sur mes yeux, j’utilise du khôl, une poudre que je fabrique à partir d’amande brûlée. C’est pareil pour le mascara que je fabrique. Je fabrique la plupart de mon maquillage une fois par an avec très peu d’ingrédients et avec des produits comestibles. Sur mes sourcils, c’est de la poudre de cacao que j’achète en vrac et que je mets après dans un petit bocal. Ça me coûte 72 centimes et ça dure longtemps. 

 

En sus de faire des économies, qu’est-ce que vous apporte ce mode de vie ?

 

Le mode de vie zéro déchet aide à améliorer la santé. On a éliminé tous les produits ménagers. Je nettoie toute la maison avec du vinaigre blanc et de l’eau. Auparavant, quand j’achetais mon mascara, j’avais au moins deux conjonctivites par an. Et là, depuis que j’utilise un produit naturel, je n’en ai plus. Mon mari, lui, avait des sinusites chroniques. Depuis qu’on a adopté un mode de vie zéro déchet, plus rien. Les économies de temps sont aussi énormes. Quand on adopte une vie simple, on a par définition plus de temps. Les gens s’imaginent que je passe mes journées à fabriquer un tas de trucs mais ce n’est pas le cas. C’est tout à fait possible de vivre avec moins de déchets. 

 

En vivant ainsi, vous ne vous privez pas de beaucoup de choses ?

 

C’est tout le contraire de la privation. Lorsqu’on achète un produit à usage unique, pour moi, c’est littéralement jeter son argent. Nous avons changé de mode de consommation. Quand on achète un produit qui est emballé, 15 % du prix couvre le prix de l’emballage. Quand on achète en vrac, d’emblée on fait 15% d’économie. Cela nous a permis de faire beaucoup plus de choses et de vivre des moments qu’on n’aurait pas pu se permettre avant. 

 

Quel conseil donneriez-vous aux Mauriciens pour qu’ils commencent à diminuer leurs déchets ?

 

Tout ce que je peux suggérer, c’est d’essayer d’appliquer les cinq règles citées ci-dessus. Un bon début serait de refuser tout ce qui est superflu : les sachets en plastique qui sont soi-disant biodégradables, les pamphlets publicitaires… Bref, tout ce dont vous n’avez pas forcément besoin. Car une fois chez nous, cela nous encombre. Mon deuxième conseil serait de toujours penser à une alternative réutilisable. Pour tout produit jetable sur le marché, il y a une alternative réutilisable. Par exemple, vous pouvez remplacer les papiers essuie-tout par des chiffons. 

 

Pourquoi avoir accepté de venir à Maurice pour une conférence-débat ? 

 

Mon livre, qui s’appelle Zéro déchet, est traduit en 15 langues. J’ai aussi un blog. Avec tout ça, un mouvement global a vu le jour. Il y a aujourd’hui, des milliers et des milliers de personnes qui ont adopté ce mode de vie. Je suis venue à Maurice suite à l’invitation de Vanessa Béchard de Think Box. Je vais où on me sollicite. Avant Maurice, j’étais en Afrique du Sud où j’ai animé une série de conférences. Mon livre est en vente à la librairie Presse-Book. Mon blog, zerowastehome.com, est aussi disponible pour me suivre. 

 


 

Bio express

 

Originaire du sud de la France, Béa Johnson est devenue la porte-parole mondiale du mode de vie zéro déchet. Paris Match l’a surnommée «le nouveau messie de l’écologie». Inspirant un large public à travers le monde, elle intervient dans des universités, comités d’entreprises et autres salons. Elle a été sacrée aux Green Awards en 2011.