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Aret Kokin Nu Laplaz | Protection des plages : des artistes, avec amour

Nadiyah Sulliman  et Fabien Manuel  espèrent interpeller.

Ils mettent en vente leurs œuvres afin de venir en aide à des citoyens qui se battent pour conserver notre littoral. Un engagement qui touche à l’émotion…

Untrait de crayon pour s’engager. Un coup de pinceau pour interpeller. Des mots récités pour éveiller les consciences. Dans chaque once de créativité, un soupçon d’océan, une mer de bonne volonté, une vague d’engagement. Dans quelques jours (du 3 au 10 mai), des artistes, en tant que Zanfan Lakot,  se regrouperont pour une exposition publique dont le but est de soutenir une cause et d’aider à financer le combat de la plateforme Aret Kokin Nu Laplaz (AKNL). Ce mouvement de citoyens engagés se mobilise actuellement contre l’accaparement des plages et la braderie des ressources côtières orchestrée par l’actuel gouvernement (selon les termes des animateurs d’AKNL) pour des projets hôteliers, entre autres. 

 

Un combat se mène sur le terrain ou en Cour de justice. Mais pas que. Parfois pour interpeller, pour pousser à la réflexion et faire réagir, il faut toucher à l’émotionnel, à ce qui est intangible. C’est là que les artistes entrent en jeu. Et ils seront une vingtaine à l’Artelier qui se trouve à la rue Saint-Louis, à Port-Louis (ce n’est pas très loin du Jardin de la Compagnie). Certains exposeront des dessins, des peintures et des photographies. D’autres, des écrivains et des poètes tels que Shenaz Patel et Michel Ducasse, partageront leurs écrits axés autour de la thématique de la mer et de la plage.

 

Penser autrement

 

Fabien Manuel y sera aussi. À 30 ans, cet habitant de Saint-Pierre fait partie du pool des jeunes artistes. Il est designer à son compte. Photographe, également. C’est d’ailleurs à travers trois clichés qu’il a décidé d’interpeller aux dangers qui guettent notre littoral. Mais aussi d’inviter à s’émerveiller, encore, face à la beauté de nos plages. D’ailleurs, vivre sur une île, c’est avoir une relation intime avec les grains de sable qui s’immiscent, depuis toujours, dans les souvenirs des Mauriciens. Alors, pour le jeune homme, il est impératif d’évoluer. Mais il ne l’entend pas comme certains décideurs pour qui évolution rime avec développement à outrance : «C’est l’heure de changer notre façon de gérer le secteur touristique. Notre littoral n’est pas illimité. Alors, il est temps de penser autrement afin de s’assurer que les Mauriciens et touristes puissent profiter des plages et des lagons.»

 

Et construire des hôtels comme des châteaux de sable, à chaque recoin de plage, n’est pas la solution. Ritesh Kumar, 25 ans, Graphic Designer, photographe, enseignant d’art au secondaire, a essayé de le dire en peinture : «Il y a de l’eau et des gens. Mais aussi un rêve : celui d’une symbiose. Et tout cela montre une chose : que la nature et l’homme ne font qu’un.» Et que respecter la nature, c’est se respecter soi-même. C’est pour cela qu’en tant qu’artiste, cet habitant de Rose-Belle a décidé de prendre les pinceaux pour s’engager. Parfois, il faut quitter l’inconfort de la création pour la brutalité de la réalité. Des deux univers, l’artiste trouve son inspiration : «Je suis un Mauricien. C’est normal que je me sente concerné. Je n’ai pas envie que le peu de plage à notre disposition tombe entre de mauvaises mains.»

 

Il n’imagine pas que le béton remplace les filaos, que les sorties lipie dan disab ne soit plus aussi accessibles, que les pique-niques dan lamanyer et que les couchers de soleil pie dan lo deviennent un luxe. Nadiya Sulliman, qui a une formation de graphiste, vit cet engagement différemment. Plus comme l’expression d’une prise de position à travers son art qu’un militantisme de tous les instants : «J’aime beaucoup le milieu marin. Je vais souvent à la plage, je plonge. Donc, je me sens forcément concernée. Et je me dis : nous sommes une île quand même : si on ne fait rien, que nous restera-t-il ?» De plus, la jeune femme de 28 ans, habitante de Quatre-Bornes, estime que cette exposition collective est une véritable chance de participer à«un beau partage» : «Mon travail n’a rien à voir avec la cause. Mais je la soutiens.» Pour vous plonger dans ses deux dessins, à l’encre de Chine et au crayon aquarelle, il faudra se rendre à l’exposition. 

 

Et là, vous vous laisserez toucher par des embruns de créativité. De là, naîtra sans aucun doute une vague d’amour pour nos plages et le besoin impératif, comme une marée qu’on n’arrête pas, de les protéger. 

 


 

C’est quoi ce combat ?

 

Ça fait un moment déjà que l’Alliance Lepep, menée par le ministre du Logement et des Terres, Showkutally Soodhun, enchaîne des décisions administratives réduisant, selon les membres du mouvement Aret Kokin Nu Laplaz(AKNL), sensiblement la portion de plage accessible au public et empiétant sur les plus belles ressources côtières de l’île (notamment du Sud) pour en faire des projets hôteliers. Blue-Bay, Saint-Félix, Rivière-des-Galets et Bel-Ombre, Pomponette et Plaines-des-Roches sont concernés. C’est toute une partie du sud de l’île qui s’apprête à connaître des changements sans précédent si rien n’est fait pour arrêter ça. Actuellement, une pétition circule pour stopper ce «festival laplaz» (pour la signer, cliquez ici : http://bit.ly/2flGk9a). 

 

Le ministre Soodhun affirme, lui, que ces décisions sont prises pour la création de l’emploi et pour le développement des régions concernées (et que d’autres morceaux de plage ont été proclamés publics). Les protecteurs de l’environnement et les citoyens engagés, eux, refusent de laisser du terrain. Et ils comptent se battre. D’ailleurs, plusieurs Judicial Reviews ont été demandés concernant le changement de statut des plages.