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Anishta Babooram-Seeruttun : «Les rastas ne peuvent pratiquer leurs rituels à cause d’une loi injuste»

Légiste et membre de la National Preventive Mechanism Division à la Commission des droits de l’Homme, Anishta Babooram-Seerutun est aussi présidente de l’ONG The Rising qui est en opération depuis décembre 2014. Avec les membres de l’association, elle s’est engagée, entre autres, contre la drogue et sa prolifération dans le pays.

Une nouvelle année vient de commencer. Que souhaitez-vous pour le pays ?

 

Je ne souhaite que le meilleur pour Maurice. Moins de perte d’emploi. Une diminution du taux de criminalité. Un vrai combat contre la prolifération de la drogue. Relever ceux qui vivent dans la pauvreté… Si seulement on pouvait concrétiser tous les souhaits ! 

 

Vous êtes engagée contre la drogue et sa prolifération dans le pays. Vous n’avez pas cessé de tirer la sonnette d’alarme sur le danger de ce fléau. Votre engagement a-t-il mené à quelque chose de concret ?

 

L’associationThe Rising est engagée dans le social. Donc, nous avons beaucoup à faire. Nos sept commissions sont débordées de travail, tellement il y a des problèmes à traiter. Comme plusieurs autres ONG, nous aidons à sensibiliser la population sur ce problème épineux. Mais nous craignons que cela ne soit pas suffisant. 

 

Quel bilan faites-vous des accomplissements de The Rising depuis son entrée en opération ?

 

Nous avons pu relever plusieurs familles qui vivaient dans la pauvreté. Nous avons résolu des cas où il y a eu des violations des droits de l’Homme et avons aussi fait des causeries sur le sujet. The Rising a aidé des gens qui ont perdu leur maison et est intervenue dans des cas où des personnes avaient besoin de sang. Nous avons soutenu des sans domicile fixe et mené un combat contre la drogue. Nous avons réuni la société civile pour nous opposer aux amendements injustifiés de la Constitution, surtout dans le contexte de la loi sur la Prosecution Commission. Nous avons aussi lancé The Rising News sur Facebook afin de contribuer à notre manière à créer une prise de conscience sur les problèmes auxquels les Mauriciens font face. Donc, en un peu plus d’un an, le bilan est positif. Nous savons néanmoins que nous avons toujours du pain sur la planche.

 

Vous dites souvent que «notre société est malade». Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?

 

Il y a un effritement des valeurs morales et cela se reflète sur le taux de criminalité qui ne cesse d’augmenter. La courtoisie a presque disparu. Beaucoup de gens cherchent un refuge dans la drogue pour fuir la réalité. On ne peut pas les blâmer. Ils ne sont qu’un produit de la société. 

 

Vous avez dit que «les politiciens ont leur responsabilité dans la dégradation sociale». Comment êtes-vous arrivée à ce constat ?

 

En sus de ne pas apporter leur soutien à la société civile, il y a une hypocrisie de la part des politiciens par rapport aux vrais problèmes de la société. Je ne dis pas que rien n’est fait mais on aurait pu faire mieux. Par exemple, en ce qui concerne le combat contre la prolifération de la drogue, je me suis souvent demandée s’ils se sentent vraiment concernés. Pourquoi n’y a-t-il pas de campagnes de sensibilisation de la part des autorités ? Le gouvernement n’a-t-il pas les moyens pour passer des messages de sensibilisation sur des billboards, à la radio ou à la télévision ? On se sert de la MBC pour la politique. Pourquoi ne pas s’en servir pour sensibiliser la population ? Pourquoi ne pas faire des réunions avec les stakeholders et les écouter afin de mieux combattre ce problème ? Pourquoi la drogue est-elle en libre circulation malgré les efforts fournis par les autorités ?

 

Vous êtes pour la dépénalisation des drogues douces comme le gandia. Pourquoi ? Qu’est-ce que cela changera ?

 

J’ai bien précisé qu’il s’agit de la dépénalisation du gandia dans des cas précis, notamment pour des raisons médicales et culturelles. Prenons l’exemple des rastas. Il y a une discrimination à leur égard. Ils ne peuvent pas pratiquer leurs rituels à cause d’une loi injuste. Mais comme Henry David Thoreau l’a si bien fait comprendre, le refus de coopérer avec le mal est une obligation morale. Tout autant que la coopération avec le bien. Nous nous appelons modernes alors que nous acceptons tranquillement une injustice à l’égard de nos compatriotes. Il nous faut un encadrement légal plus adapté et plus approprié aux spécificités mauriciennes et qui considérera les moeurs et les coutumes.

 

Collaborez-vous avec les autorités ?

 

Dans certains cas, oui. Dans d’autres, nous le ferons uniquement si les autorités démontrent une volonté de collaborer et de changer la situation. On ne peut, à titre d’exemple, continuer à envoyer des toxicomanes en prison au lieu de les traiter. Et on ne peut traiter les toxicomanes si on ne leur accorde pas un programme de substitution approprié. Nous savons tous que le nouveau programme n’a pas vraiment aidé. 

 

Quel est votre message pour les autorités ?

 

Il est temps que le gouvernement revoie sa politique concernant le combat contre la drogue et la pauvreté. C’est un cercle vicieux. Une personne pauvre est une proie facile pour la drogue. La pauvreté est également directement et indirectement liée au non-respect des droits humains. Il faut une refonte du welfare state. On ne peut pas canaliser autant de budget vers la pension de personnes âgées alors que d’autres sections de la population n’arrivent pas à refaire surface et ne reçoivent qu’une compensation de Rs 125 ou Rs 200. Un système socialiste devrait prendre en considération toutes les composantes de la société. Il faut qu’il y ait plus de justice sociale et cela est pratiquement inexistant. Mais qui se soucie d’idéologies et de principes ces jours-ci ?

 

Parlez-nous de The Rising…

 

The Risingest une association de maintenant 60 jeunes – et qui continue d’augmenter – qui sont engagés dans le combat pour une meilleure société. Toutes nos actions sont coordonnées de sorte que nous puissions atteindre notre but. Nous sommes très concernés par ce qui se passe dans notre entourage. Notre message est celui de l’amour. Nous voulons aider les autres. Nous voulons apporter une lueur d’espoir à ceux qui sont dans le besoin. Nous voulons enlever ce voile de souffrance qui couvre tant de gens autour de nous. The Rising, comme le nom le signifie, c’est une nouvelle révolution. Une révolution silencieuse mais certaine. Car chaque ère requiert une révolution et nous croyons que la nôtre requiert un «rising»

 

Bio express

 

Mariée, Anishta Babooram-Seeruttunestmembre de la National Preventive Mechanism Division à la Commission des droits de l’Homme. Elle détient une maîtrise en droit commercial international. «J’ai été dans le social depuis mon très jeune âge à travers l’association féminine dont ma mère est présidente et fondatrice dans le Sud. J’étais aussi très impliquée dans les activités extra-curriculaires au collège Lorette de Mahébourg et ensuite à l’Université de Maurice où j’étais aussi la rédactrice en chef de Zot Newset secrétaire de la Students Union», dit-elle. 

 

Ma semaine d’actu

 

Quelle actualité locale a retenu votre attention ces derniers temps ?

 

L’amendement de la Constitution pour créer une prosecution commission. C’est une nouvelle qui a secoué le pays. Une bonne partie de la société civile s’est indignée parce qu’elle n’a pas été consultée, surtout que l’indépendance d’une institution telle que le bureau du DPP est concernée. Il y a aussi la création de la CSR Foundation qui sera gérée par le gouvernement. On se pose des questions quant à l’ingérence du gouvernement dans le fonctionnement des ONG et quant à l’indépendance de la société civile. Devrons-nous être des activistes de certains partis politiques afin de bénéficier du CSR ? Quels sont les critères ? Nous avons l’impression que le gouvernement veut tout contrôler. Si c’est le cas, nous ne sommes plus une démocratie.

 

Et sur le plan international ?

 

La mutinerie dans une prison de Manaus au Brésil due à une guerre entre des gangs. 60 personnes ont péri lors de cet incident. Quand il y a un silence de la part des autorités par rapport à l’ascendance de la drogue, la situation peut vite dégénérer dans les milieux criminels. Je trouve aussi la politique de démonétisation des billets de Rs 500 et Rs 1000 en Inde une excellente initiative dans la lutte contre l’économie informelle.

 

Que lisez-vous actuellement ?

 

Martin Luther King, Autobiographie.Je dois avouer que ce livre m’inspire beaucoup et renforce mes convictions.